PARANT Marcel

Par Jean-Pierre Bonnet et Éric Nadaud

Né le 13 février 1909 à Châlons-sur-Marne (Marne), mort le 19 mars 1990 à Reims (Marne) ; chef de brigade d’ouvriers ; secrétaire de l’Union Est et membre du bureau de la Fédération CGT des cheminots (1944-1945, 1958-1965).

L’un des six enfants d’un cheminot, Marcel Parant renonça en raison de la situation matérielle de sa famille à son désir de devenir instituteur, et travailla vers l’âge de quinze ans comme coursier de la maison de commerce à succursales Mielle. Il fit ensuite son apprentissage aux chemins de fer, passa l’examen pour devenir agent de conduite, mais dut se contenter, pour cause de daltonisme, de travailler en atelier. Il poussa sa carrière jusqu’au rang de chef de brigade d’ouvriers. Au début des années trente, il épousa Yvette Harmand, employée de teinturerie et socialiste, dont il eut un fils en 1933, Vivian, qui fut plus tard ouvrier métallurgiste à Billancourt, puis vendeur.
Dès les années trente, il déploya une grande activité militante sur de multiples terrains, politique, associatif et syndical. En 1932 ou 1933, il fut l’un des fondateurs du groupe des Jeunesses socialistes de Châlons-sur-Marne. Il prit part à la constitution à Châlons du Groupe théâtral Jean Jaurès, dans le cadre duquel il joua des rôles avec sa mère. Il fut également de ceux qui lancèrent l’Association sportive des cheminots de Châlons, l’ASCC, encore en activité en 2002, dont il anima tout particulièrement la section de football.
Syndicaliste d’origine confédérée, Marcel Parant avait œuvré en faveur de la réunification syndicale en 1934-1935. Secrétaire du syndicat unifié de Châlons-sur-Marne (Marne), où il exerçait comme ajusteur, il fut élu en juin 1936 à la commission administrative fédérale par le congrès de l’Union des syndicats de la Région Est. Il devint aussi, en 1938, secrétaire du secteur syndical de Châlons. La même année, il représenta au congrès fédéral le syndicat des cheminots de Reims (Marne), qui comptait alors 1 600 adhérents. Il fut élu par le congrès que tint la Fédération des cheminots les 27-30 juin 1938 membre du conseil fédéral au titre de la Région Est.
Dans la crise qui frappa la Fédération des cheminots et la CGT à partir du 24 août 1939 à la suite du pacte germano-soviétique, il se rangea du côté de la majorité des ex-confédérés. Lors de la conférence nationale extraordinaire qui réunit le 17 décembre 1939 les représentants du conseil de la Fédération des cheminots et des conseils d’administration des Unions de Région, il signa au nom de la Région du Nord la résolution présentée par le secrétaire fédéral Jean Jarrigion, qui assurait la direction fédérale et confédérale du soutien des militants responsables de la Fédération contre les minoritaires.
Quand survint la guerre avec l’Allemagne, en septembre 1939, il fut mobilisé dans l’artillerie lourde. Une fois démobilisé, il reprit son travail dans les chemins de fer à Châlons. Il fut de ceux qui, hostiles au régime de la Charte du travail, organisèrent la présence dans les syndicats officiels pour y défendre les intérêts des cheminots et contrecarrer l’influence des vichystes et des collaborateurs. Il s’engagea en outre très tôt dans la résistance contre l’Occupant. D’octobre 1940 à janvier 1941, il aida à l’évasion des prisonniers enfermés dans la caserne Chanzy de Châlons. En février 1941 il entra à Libération-Nord, à la demande de Raymond Guyot. À partir de cette date, il organisa ou commit de nombreux actes de sabotage et travailla à la collecte pur les Alliés de renseignements sur les déplacements des troupes allemandes. Il fut perquisitionné par la Gestapo en février 1941, puis en juin et octobre 1942, et dut finalement quitter son travail et plonger dans la clandestinité pour échapper à l’arrestation, puis revint à Châlons pour y développer la résistance. Chargé en juin 1944 par Libération-Nord de la coordination du Mouvement pour les quatre départements de l’Aisne, de la Meuse, de la Marne et des Ardennes, il participa en août aux combats pour la libération de Paris. À la Libération, il constitua à Châlons le Comité de Libération des cheminots. Son engagement précode et ses actions de sabotage et de renseignement lui valurent de multiples décorations.
Après la Libération, il s’établit à Paris, divorça de sa première épouse et s’y remaria, en 1955, avec Jacqueline Virot. Il se consacra principalement à ses activités de responsable syndical à la Fédération des cheminots. Dès septembre 1944, sitôt la Fédération reconstituée, il appartint au bureau exécutif fédéral, comme représentant de la Région Est. En 1945, il était secrétaire de la Section technique des dépôts. En 1946, il devint responsable fédéral aux Sports et aux loisirs, et fut l’un des sept représentants de la Fédération à la commission centrale des Sports et loisirs créée par la SNCF, au titre de la région Est. Au congrès de 1945, Marcel Parant ne fut pas maintenu au bureau fédéral. La décision d’abandonner le principe de parité avait en effet diminué la représentation des ex-confédérés. En 1946, il fut nommé responsable fédéral aux Sports et loisirs. C’était un poste important à une époque où la CGT avait décidé de s’impliquer pleinement dans la vie associative et culturelle et cherchait à y placer des gestionnaires expérimentés.
Hostile à la scission syndicale, resté à la CGT en 1947, Marcel Parant siégeait à la commission exécutive de la Fédération, ainsi que dans les intances de l’Union Est dont il était secrétaire général adjoint. Quoique non communiste, il suivit sans difficulté la ligne officielle de la CGT. Il fut l’un des signataires, le 19 octobre 1948, du communiqué des secrétaires non communistes de la CGT qui flétrit « les accusations du ministre de l’Intérieur Jules Moch, qui prétendait que le Kominform était derrière la grève des mineurs ». Il entra au bureau fédéral au congrès de 1958 comme représentant de la Section technique nationale Matériel et traction. Il fut réélu jusqu’au congrès de novembre 1965, date à laquelle il devint « collaborateur du bureau fédéral » au titre de l’Union fédérale des cheminots retraités, dont il fut l’un des dirigeants.
Il défendit en même temps la cause du socialisme de gauche. Alors qu’il avait repris à la Libération sa carte de militant socialiste, il rejoignit fin janvier 1948 le Mouvement socialiste unitaire et démocratique, constitué par les dirigeants de la tendance Bataille socialiste qui venaient de se séparer de la SFIO, et prit part au congrès national qui, en septembre 1948, décida de transformer le Mouvement en Parti socialiste unitaire. Adhérent du XVIIIe groupe de Paris du PSUD, puis du Parti socialiste unitaire, il appartint au comité fédéral de la Région parisienne du PSU, où il avait notamment la charge des relations avec le Parti communiste. En 1950, il était le secrétaire général adjoint de la Fédération de la Région parisienne. Au plan national, il fut élu par le congrès de septembre 1948 membre du comité directeur du PSU. En décembre 1949, lors du second congrès du parti, il manqua de peu d’être réélu au comité directeur. Cependant, il y revint en juin 1950, en remplacement d’un membre du CD alors exclu pour titisme. Il y demeura jusqu’au congrès d’avril 1952. Il fut pour le PSU un propagandiste utile, dans la mesure où il exploita les possibilités de contacts que lui offraient ses tournées de responsable syndical sur les lignes de l’Est pour recruter des adhérents et diffuser la presse du parti. Au sein du PSU, il appartint à la tendance la plus « antitiste ». Il fut l’un des signataires de la motion présentée début décembre 1949 par le XIIIe groupe parisien au congrès de la Fédération de la Région parisienne, qui désignait le gouvernement de Tito comme « un danger mortel pour la classe ouvrière et les travailleurs du monde entier » et un ennemi du socialisme ». Il milita également pour l’appel de Stockholm contre l’arme atomique, en tant que socialiste unitaire et responsable de la CGT, mais aussi d’adhérent du Mouvement de la paix. Après 1952 il se montra moins actif sur le terrain politique. Cependant, il réaffirma ses confictions socialistes de gauche à la fin des années 1950, en adhérant au Parti socialiste autonome, en 1959, puis au Parti socialiste unifié.
Il prit sa retraite en 1968 et passa ses vingt dernières années avec son épouse dans le Béarn.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article7261, notice PARANT Marcel par Jean-Pierre Bonnet et Éric Nadaud, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 26 janvier 2012.

Par Jean-Pierre Bonnet et Éric Nadaud

SOURCES : Arch. Fédération CGT des cheminots. — Arch. A. Seurat. — Arch. Jacqueline Parant. — Procès-verbaux des réunions du comité directeur du PSUD et du PSU. — La Bataille socialiste, 1948-1950. — La Tribune des cheminots, dont le n° 673, mars-avril 1990. — Comptes rendus des congrès fédéraux. — Jean Gacon (dir.), Batailles du rail, Paris, Fédération des cheminots, Messidor, 1986. — Maurice Choury, Les Cheminots dans la Bataille du Rail, Paris, Librairie académique Perrin, 1970, p. 105. — DBMOF, tome 38, p. 35. — Abbé Pierre Gillet, Châlons sous la botte. Souvenirs de la Résistance à Châlons-sur-Marne et dans l’arrondissement 1940-1945, Cahiers Châlonnais, n° 3, 1984. — Notes de Gilles Morin et de Georges Ribeill. — Entretiens avec Vivan Parant et Jacqueline Parant, née Virot, octobre 2002.

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