BLANC Alexandre, Marius, Henri

Par Jacques Girault, Justinien Raymond, Francis Roux

Né le 14 septembre 1874 à Camps (aujourd’hui Camps-la-Source, Var), mort le 26 août 1924 à Alfortville (Seine) ; instituteur ; syndicaliste CGT ; militant socialiste, puis communiste ; député du Vaucluse.

Compère-Morel, Encyclopédie socialiste, op. cit.

Fils de Louis, Jean-Baptiste Blanc, boulanger, et de Charlotte, Rose, née Boyer, Alexandre Blanc fut élève-maître à l’École normale d’Avignon (1890-1893) puis fut, à sa sortie et jusqu’en 1906, instituteur dans le Vaucluse et élu par ses collègues au conseil départemental de l’enseignement primaire en 1901 et en 1904. Secrétaire du IIIe congrès des Amicales d’instituteurs à Marseille (5-8 août 1903), il en présida une séance. Le 26 novembre 1905, il signa le Manifeste des instituteurs syndicalistes comme membre du conseil départemental du Vaucluse. Le 3 octobre 1912, il fut élu membre du conseil fédéral des syndicats d’instituteurs. Alexandre Blanc fut également militant de la Libre Pensée du Vaucluse et, le 4 avril 1904, il représenta le département au congrès de la Libre Pensée du Var au Luc.

Alexandre Blanc avait rejoint les rangs de la Fédération socialiste du Vaucluse en 1900, au lendemain de son congrès d’Avignon au cours duquel elle rompit avec le POF et entraîna dans l’autonomie la plupart des groupes socialistes du département. Resté célibataire, orateur à la parole entraînante, il se donna tout entier à la propagande.
À partir de 1903, il joua un rôle déterminant dans la Fédération. Le 4 décembre 1904, au congrès de Cavaillon, il en devint le secrétaire général. La Fédération ayant adhéré peu après au Parti socialiste français, A. Blanc lui donna une orientation telle, qu’avant l’unité de 1905 elle était déjà en contact étroit avec la Fédération adhérente du Parti socialiste de France qui s’était développée parallèlement. L’unité fut donc facilement réalisée le 27 mai 1905 et, si Vaillandet du PS de France fut le premier secrétaire de la Fédération unifiée, quand il fut déplacé à Bordeaux en septembre, A. Blanc lui succéda. Il représenta la Fédération du Vaucluse aux congrès nationaux du Parti socialiste à Limoges (1906) et à Saint-Étienne (1909).

En 1906, les groupes de l’arr. d’Orange le présentèrent aux élections législatives et, si l’on en croit le Journal des instituteurs du 13 septembre 1906, il eut « l’appui moral et pécuniaire de l’Amicale » des instituteurs (600 F fournis par la souscription). Au premier tour, il groupa 3 340 voix sur 22 217 inscrits. Le 20 mai, au second tour, sur 17 421 suffrages exprimés, il fut élu par 8 665 contre 6 428 et 1 927 au candidat de droite Ducos et au député nationaliste sortant Loque. Alors, au congrès fédéral de Pertuis (Vaucluse), il abandonna le secrétariat de la Fédération. Battu en 1910, au deuxième tour, avec 6 991 voix, il reprit son poste d’instituteur et continua à militer. Le 10 mai 1914, l’arr. d’Orange le renvoya à la Chambre par 8 838 voix contre 7 986 au député de droite sortant Lacour, sur 20 797 inscrits et 16 827 suffrages exprimés. Durant ces deux législatures, il siégea à la commission de l’Enseignement et des Beaux-Arts.

Au cours de la guerre de 1914-1918, A. Blanc fut un ardent adversaire de la politique d’union sacrée et de défense nationale inconditionnelle pratiquée par le Parti socialiste SFIO. Deux fois il avait été élu sur des professions de foi très explicites. « Mon programme s’appuie naturellement sur les principes du socialisme, déclarait-il en 1906 : conquête des pouvoirs publics, entente internationale des travailleurs et transformation de la société capitaliste en société collectiviste. » S’il préconisait des « réformes transitoires » : monopole de l’enseignement gratuit à tous les degrés, suppression des conseils de guerre, représentation proportionnelle, droit syndical aux fonctionnaires, journée de huit heures, impôt progressif sur le revenu, il affirmait : « Il faut obtenir davantage » ; et il ne semblait pas l’attendre de l’action parlementaire, si l’on en juge par cet appel : « Soyez les artisans de votre libération économique. Ouvriers et paysans, constituez-vous en parti de classe, sur le terrain de la lutte des classes, et réclamez énergiquement la totalité du fruit de votre labeur. »

Sa profession de foi en 1914 rend le même son, comme il le soulignait lui-même : « Le candidat n’a pas changé, le programme non plus. C’est le programme intégral du Parti : entente internationale des travailleurs ; conquête des pouvoirs publics ; transformation de la propriété capitaliste en propriété collectiviste. Si votre verdict ne m’est point favorable, ajoutait-il, je reviendrai à mes fonctions d’instituteur, sans amertume et sans découragement. Simple militant ou élu, mon ambition sera toujours de travailler modestement, mais sans trêve, à la libération économique et politique du prolétariat... » (Arch. Ass. Nat.).

Le tempérament révolutionnaire d’A. Blanc qu’expriment ces proclamations, son pacifisme et son internationalisme de tradition jauressienne peuvent expliquer l’attitude qu’il prit, avec Raffin-Dugens et Pierre Brizon venus comme lui de l’enseignement primaire et primaire supérieur. Après la naissance du mouvement minoritaire en Haute-Vienne (mai 1915) qui mettait fin à l’apparente unanimité de la SFIO face à la guerre, il allait, avec ses deux collègues, rejoindre un troisième courant, d’extrême-gauche, zimmerwaldien, en assistant à la conférence socialiste internationale de Kienthal (Suisse) du 24 au 30 avril 1916.

Convoqué par la CAP, A. Blanc répondit par lettre qu’il avait agi à titre personnel et se trouvait en complète harmonie avec les décisions des congrès internationaux ; et la Fédération du Vaucluse se solidarisa unanimement avec son élu. Blanc appartint au Comité pour la défense du socialisme international constitué en octobre 1916. Il signa le long appel qu’adressa ce comité aux Fédérations socialistes à la veille du congrès national de 1916. Il se séparait de la majorité « sur les responsabilités de la guerre », « sur la campagne des haines », « sur la participation ministérielle » et préconisait « la reprise des rapports internationaux ». Jusqu’à la fin du conflit, Blanc combattit toute participation ministérielle du Parti socialiste et tout soutien d’un quelconque cabinet de guerre.

La paix rétablie, la Fédération du Vaucluse le mit en tête d’une liste purement socialiste pour les élections de 1919. Il en fut le seul élu avec 14 576 voix sur 47 428 votants et un quotient de 11 636. En février 1920, il participa au congrès socialiste de Strasbourg comme délégué du groupe parlementaire. Il fut élu au conseil d’administration du Populaire. Le 1er mai 1920, il prit part à la manifestation et y fut victime de violences policières.
Au nom du Comité de la IIIe Internationale, il se prononça cette même année pour la Résolution d’adhésion (voir Introduction). Au nom du Comité, il signa la motion Loriot-Souvarine (dite Cachin-Frossard) et, au congrès de Tours, fut assesseur de la séance du 30 décembre (après le départ des minoritaires). Au nom du Vaucluse, 42 mandats sur 46 allèrent à l’adhésion. Il fut désigné comme membre du comité directeur issu du congrès. Le 4 janvier 1921, il était désigné pour les commissions de propagande et des archives. En 1924, malade, il ne put faire acte de candidature. Réintégré dans l’enseignement au début du mois d’août 1924, il fut aussitôt mis en congé de maladie avec traitement pour trois mois mais mourut le 26 de ce même mois.

L.-O. Frossard, instituteur lui aussi et premier secrétaire général du PC, mais qui prit vite le chemin du retour et le suivit très loin, a campé sans complaisance son compagnon d’un moment : « Barbiche à l’impériale, cravates écarlates, petit chapeau rond à la Dranem. Député d’Orange, toutes les cigales du Midi chantaient dans sa gorge, mais leur chant ne s’échappait qu’en sons rauques, parfumés d’ail et d’absinthe... » (G. Duveau, Les Instituteurs, Paris, 1957, p. 161). Mais personne ne mit en doute la sincérité de cet homme combatif, toujours égal à lui-même, qu’il fut député ou simple militant.

Il était marié et père de deux enfants dont un adoptif.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article73181, notice BLANC Alexandre, Marius, Henri par Jacques Girault, Justinien Raymond, Francis Roux, version mise en ligne le 9 août 2009, dernière modification le 14 avril 2020.

Par Jacques Girault, Justinien Raymond, Francis Roux

Compère-Morel, Encyclopédie socialiste, op. cit.

ŒUVRE : A. Blanc a collaboré aux journaux suivants : La Provence, quotidien socialiste de Marseille (de septembre 1911 à sa disparition au début de 1912). — Le Populaire du Midi. fondé à Nîmes en 1912. — Le Populaire de Paris, quotidien du soir, organe des minoritaires dont le 1er numéro parut le 10 avril 1918. — La Vague, hebdomadaire dirigé par Pierre Brizon, organe des Kienthaliens dont le 1er numéro parut le 5 janvier 1918. — Le Parti radical et le Parti socialiste dans le Vaucluse, Cavaillon, 1904. — L’Humanité, par exemple l’article « Ex-camarades » paru le 16 février 1920. — Député, préface de Maurice Allard, Paris 1912.

SOURCES : Arch. Nat., F7/12992. — Arch. Nat. dossier biographique. — Arch. Dép. Vaucluse, 1 M 827, 855, 3 M 280, 10 M 29. — Hubert-Rouger, La France socialiste, pp. 143-144. — Les Fédérations socialistes III, pp. 49 à 82, passim ; pp. 523-524, 529, 530-547, passim, 566-567. — Compte rendu sténographique du congrès du Parti socialiste SFIO à Tours (25-30 décembre 1920), Paris, 1912, pp. IX, XX, XXI, XXII, 117. — État civil de Camps-la-Source. — J. Chuzeville, Un Court moment révolutionnaire, la création du Parti communiste en France, Libertalia, 2017.

ICONOGRAPHIE : Hubert-Rouger, op. cit., p. 507. — La France socialiste, op. cit., p. 144.

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