HOFMAIER Karl

Par Brigitte Studer

Né le 17 mai 1897 à Bâle, mort le 19 mars 1988 à Zurich ; typographe de formation ; membre du secrétariat, du bureau politique, du comité central puis secrétaire central du PCS ; au service de l’Internationale communiste (IC) à partir de 1924 où il fut successivement rapporteur, instructeur d’organisation et émissaire de l’IC à Paris.

Né dans une famille ouvrière de six enfants, Karl Hofmaier fut membre de l’ancien Parti communiste, puis du Parti communiste suisse. De juin 1922 à mai 1924, il fut membre de la centrale du PCS.

Il participa au IIIe congrès de l’IC à Moscou et au premier de l’Internationale syndicale rouge. À partir de 1924, il fut au service de l’Internationale, d’abord comme rapporteur pour la France, l’Italie et l’Espagne au département de l’information et des statistiques puis, à partir de 1925, en tant qu’instructeur d’organisation. À ce titre, il fut envoyé en Belgique et en Italie. Selon l’ancien communiste Max Wullschleger, les irrégularités financières pour lesquelles fut accusé son frère, Emil Hofmaier, alors à la direction des JCS, étaient en réalité le fait de Karl. Ce serait sur intervention de l’IC que la responsabilité aurait été attribuée à Emil Hofmaier. Les dossiers de cadres des deux frères démentent cette affirmation. La confusion d’identité fut cependant utilisée lors de l’arrestation de Karl en octobre 1927 par la police italienne. Sans doute pour cacher l’importance de la prise policière (un instructeur de l’Internationale), Karl se fit passer pour Emil ; jusqu’à sa libération, le PCS et lui-même purent tromper aussi bien les autorités italiennes et suisses que l’opinion publique helvétique. Il fut condamné à quinze ans de prison, peine réduite à sept ans par une amnistie partielle. Durant toute son incarcération, le PCS fit campagne pour sa libération, par le truchement d’un Comité pour la libération de Hofmaier qui publia une brochure sur ses conditions d’arrestation et d’incarcération (non sans en exagérer l’atrocité, cf. Hofmaier, der Gefangene Mussolinis), ainsi que sur les interventions des communistes suisses en sa faveur. Karl Hofmaier ne fut libéré qu’au terme de sa peine, en octobre 1934.

Après un rapide passage en Suisse, il retourna en Union soviétique en décembre, invité par le Comité exécutif du Secours rouge international à venir s’y reposer, et où, selon Max Wullschleger, soupçonné d’avoir livré des camarades italiens à la police, il aurait été arrêté pour quelques semaines sur ordre de Togliatti. Mais comme le prouvent les archives du Komintern, il ne fit que se soumettre à une enquête de la Commission internationale de contrôle et de la commission des cadres, dont il ressortit blanchi. D’après les Mémoires de Karl Hofmaier (p. 76), le secrétariat du Comité exécutif de l’IC le chargea, le 21 septembre 1935) sur proposition de Togliatti* de la liquidation du Secours ouvrier international soviétique, tandis que Babette Gross, la compagne de Münzenberg, affirme pour sa part que cette tâche aurait finalement été confiée à un autre permanent du Komintern (Willi Münzenberg, op. cit., p. 287). Karl Hofmaier participa au VIIe congrès de l’IC, puis en novembre 1935, il s’installa à Paris avec son épouse. En tant qu’émissaire de l’IC, il devait y transférer le Secours ouvrier international français sous l’égide du PCF (la compagne de Münzenberg précise qu’il s’agissait d’une fusion avec le Secours rouge, ibid. p. 288) — une façon discrète d’écarter Münzenberg. Toujours selon Karl Hofmaier, la section suisse du Secours ouvrier international (SOI) aurait été alors démantelée. Début mai 1936, Karl Hofmaier se rendit une nouvelle fois à Moscou afin de présenter un rapport à ce sujet. Il serait revenu à Paris vers la mi-mai et les époux seraient rapidement retournés en Suisse, car sa femme allait accoucher.

Karl Hofmaier travailla alors au secrétariat du PCS. En août 1936, les époux s’installèrent à Zurich-Wollishofen à la Siedlung Neubühl, un quartier où vivaient de nombreux artistes. À la Pentecôte, Karl Hofmaier participa au 6e congrès du PCS qui l’élut à sa direction en tant que secrétaire d’organisation avec Humbert-Droz et Bodenmann. À partir de ce moment et jusqu’à son exclusion du Parti suisse du Travail, il fit partie de manière continue des principales instances dirigeantes du PCS : Secrétariat, bureau politique et comité central. Il devint aussi le responsable de la commission d’organisation du secrétariat du PCS créée en 1936 et en 1939, lors du 7e congrès, il fit partie de la commission politique, de la commission des statuts, ainsi que du Présidium du congrès, de même qu’il avait déjà fait partie de celui du congrès précédent. Durant ces années-là, il fut également le trésorier du Parti. Il devait retourner une nouvelle fois en Union soviétique au printemps 1939 avec Léon Nicole ; il fut ainsi un des derniers dirigeants du PCS à se rendre dans la « patrie du socialisme » pendant la période d’avant-guerre. Accusé lors du « procès d’Espagne » en 1938, il ne fut pas inculpé ; il fut par ailleurs un des seuls dirigeants communistes à ne pas être arrêté, s’étant enfui à Paris, ce qui lui permit de prendre la direction du Parti durant cette période. En 1943, il passa néanmoins six mois en prison pour activité communiste illégale.

En 1944, il fut élu secrétaire central du Parti du Travail nouvellement fondé, mais il en fut exclu en 1947 à cause d’un scandale lié à ses méthodes de financement du Parti. Il admit avoir touché 1,6 million de francs pour le Parti suisse du Travail et le Vorwärts, dont il utilisa une partie à des fins personnelles.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article73247, notice HOFMAIER Karl par Brigitte Studer, version mise en ligne le 12 août 2009, dernière modification le 21 août 2010.

Par Brigitte Studer

ŒUVRE : K. Hofmaier, Memoiren eines Schweizer Kommunisten 1917-1947, Zurich, Rotpunkt Verlag, 1978, 303 p.

SOURCES : RGASPI, 439 3 1314, 495 18 1020, 495 19 398a, 495 20 617 et 495 91 211. — Archives fédérales suisses, Berne, E 4320 (B) 1974/47, vol. 14et vol. 81 et E 4320 (B) 1, vol. 11. — Bibliothèque de la Ville, La Chaux-de-Fonds 6. — Fonds Jules Humbert-Droz, La Chaux-de-Fonds, 005379. Stiftung Studienbibliothek zur Geschichte der Arbeiterbewegung, Zurich, KPA-Bae 1, KPA-Ni 1. — Kommunistische Partei der Schweiz, Prüft und urteilt ! Was war und was kommen wird, Bâle, Genossenschafts-Buchdruckerei, s.d. [1939], 64 p. — Les partis communistes des pays latins, op. cit. — P. Stettler, « Selbstporträt eines Schweizer Kommunisten », in : NZZ, 10 juillet 1978. — P. Huber, Stalins Schatten in die Schweiz, op. cit. (ici p. 160171). — Sous l’oeil de Moscou, op. cit — Brigitte Studer, « Ein Prozess in Rom und seine Wiederholung in Moskau. Der Fall des SchweizerKomintern-Instrukteurs Karl Hofmaier », in : Jahrbuch für historische Kommunismusforschung (Mannheim), 1994, no 2, p. 254-274. — Entretien avec Max Wullschleger, 15 mai 1990.

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