JACOB Joseph [JACOB Henri, Joseph] (version DBK)

Par Michel Dreyfus

Né le 19 mars 1896 à Troyes (Aube), mort le 19 juillet 1976 à Vincelles (Yonne) ; ouvrier tisseur ; secrétaire général de la Fédération du textile en 1924-1925 ; membre du comité directeur puis du comité central du PC (1922-1927) ; secrétaire de la région du Nord du PC (1927-1929) ; délégué au Comité exécutif de l’IC en 1926 ; rompt avec le PC et la CGTU en 1932.

Fils d’un tisseur et d’une fileuse, Henri Jacob entra à l’âge de douze ans comme ouvrier bonnetier dans une usine de Troyes. Secrétaire des Jeunesses socialistes de l’Aube en 1914, il était en mai 1920 secrétaire du syndicat du Textile de Troyes qui le délégua au congrès de la CGT. Entré le 30 janvier 1921, au comité exécutif (CE) du jeune PC de l’Aube, il dirigea la grève du Textile de février 1921 et participa, avec Charles Alfred à la création des Comités syndicalistes révolutionnaires de la région troyenne.

Trésorier du Comité troyen d’assistance au peuple russe en 1921, Jacob achemina à Berlin un convoi de vivres pour les victimes de la famine en Russie. En septembre, les délégués russes, empêchés de se rendre au congrès international des ouvriers du Textile, le choisirent comme représentant mais la validité de son mandat n’ayant pas été reconnue, il ne put participer aux travaux du congrès.

En décembre 1921, Jacob fut délégué au congrès de fondation de la CGTU ; le 16 février 1922, il devint secrétaire de la Fédération unitaire du textile et le 23 mai 1922, il fut élu à la CE de la CGTU qui le délégua au IIe congrès de l’ISR à Moscou (novembre 1922). Il participa vraisemblablement au IVe congrès de l’IC tenu ensuite. Il représenta la CGTU lors de la fondation du Comité d’action contre l’impérialisme et la guerre en décembre 1922. Lors du 2e congrès du PC (octobre 1922), il était intervenu en faveur de l’autonomie syndicale et il fut élu au comité directeur comme représentant du Centre.

De retour, avec Pierre Semard*, de la conférence internationale tenue à Essen en Allemagne du 6 au 9 janvier 1923, il fut écroué à la Santé, mis en liberté provisoire le 8 mai, et bénéficia d’un non-lieu en juin. Réélu à la CE de la CGTU lors de son 2e congrès (Bourges, novembre 1923), il participa, les 5-7 décembre au 2e congrès de la Fédération du textile qui vit la fusion avec le Vêtement. En janvier 1924, il fut reconduit au comité directeur du PC.

Participa-t-il au Ve congrès de l’IC ? En tout cas, il fut certainement parmi les 311 délégués présents au IIIe congrès de l’ISR qui se tint immédiatement ensuite, du 8 au 22 juillet 1924 et à l’issue duquel, avec G. Monmousseau*, il entra à son bureau exécutif. À partir du 5e plénum, (mars 1925), il eut des responsabilités dans l’IC. Des missions, parfois dangereuses, lui furent confiées, notamment en Italie fasciste, et il assista en tant que délégué de l’Exécutif au congrès du PC autrichien en 1925. Promu au secrétariat du Présidium de l’IC en février ou mars 1926, il occupa cette responsabilité jusqu’au 7e plénum (fin 1926). En juin 1926, Zinoviev* dont la position ne cessait de s’affaiblir au sein de l’IC et qui cherchait des soutiens, chargea Jacob, en tant qu’émissaire du parti français, de proposer la réintégration de Boris Souvarine* en suggérant qu’on l’envoie en Chine. À partir de mars 1926, Jacob fut un des collaborateurs du Secrétariat latin de l’IC mis en place, comme les autres « secrétariats de pays » à cette date. Un « Jacob » apparaît également parmi les collaborateurs du Secrétariat du Proche-Orient. S’agit-il du même militant ?

Revenu en France le 2 août 1926, il défendit les thèses de Suzanne Girault* lors du bureau politique, tenu les 28-29 octobre. Au CC des 1-3 septembre 1926, Jacob s’opposa à une résolution de Doriot* condamnant l’Opposition et Zinoviev*. Au 3e congrès du Textile (Paris, novembre 1926), Jacob présenta des rapports sur l’unité syndicale et le front unique.

Dans un article paru dans les Cahiers du Bolchevisme le 15 janvier 1927, Semard*, secrétaire du Parti, attaqua Jacob, lui reprochant d’avoir soutenu l’Opposition russe au VIe Exécutif de l’IC en mars 1926 et au 5e congrès du PC (Lille, juin 1926). Tout en lui reprochant de colporter des « ragots », Jacob affirma dans le même numéro s’incliner devant le jugement de l’IC. Il fit sans doute un nouveau voyage à Moscou dont il revint en avril 1927. Cependant, les désaccords persistèrent, en particulier à partir du tournant « classe contre classe ». En janvier 1928, une délégation française se rendit à Berlin pour rencontrer Manouilski*, Kuusinen et Humbert-Droz*. Devenu un des responsables de la région du Nord, Jacob s’y affirma en faveur de désistements au second tour des élections.

Ayant rejoint l’aile « droitière » de Doriot* en cours de constitution, il parvint à entraîner la quasi-totalité des délégués au congrès régional de 1928. Son éviction du CC, intervenue quelques mois plus tard, provoqua la réprobation ouverte de nombreux militants lors du 6e congrès du PC (Saint-Denis, 1929) au cours duquel il intervint en tant que délégué du Nord. Devenu « dangereux » pour la direction du PC, Jacob fit alors l’objet d’une exclusion « en douceur » dans des circonstances où se mélangèrent données idéologiques, marchandages et accusations sordides.

En avril 1930, Jacob fut placé à la direction du Territoire de Belfort. Ses désaccords avec le PC s’aggravèrent et entraînèrent la rupture en mai 1932. Le 25 septembre 1932, lors du congrès de la 5e Union régionale unitaire, Jacob fut écarté de ses fonctions. Toutefois, il poursuivit son militantisme sur le plan local. Début 1936, il obtint un poste administratif de gardien à la mairie de Troyes et le conserva jusqu’en 1942. Secrétaire du comité de Front populaire de Troyes en 1938, il adhéra au Rassemblement national populaire en 1941 puis au Parti populaire français où il fut secrétaire fédéral adjoint. Condamné aux travaux forcés à vie et à la dégradation nationale en décembre 1945, il était en décembre 1953 secrétaire administratif du Syndicat français du cinéma, de la radio et de la télévision puis son vice-président de 1957 à 1958.

Dans l’itinéraire complexe qui conduisit Jacob du communisme à la collaboration, son séjour en URSS en 1925-1926 semble avoir joué un rôle important.

Il était marié et père de deux enfants.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article73273, notice JACOB Joseph [JACOB Henri, Joseph] (version DBK) par Michel Dreyfus, version mise en ligne le 13 août 2009, dernière modification le 13 août 2009.

Par Michel Dreyfus

SOURCES : RGASPI 491 1 239, 492 1 365, 495 163 386, 495 18 427. — Notes de M. Pantéleiev. — Notice par R. Lemarquis, J. Maitron et Cl. Pennetier, DBMOF, t. 32. — Les archives J.-H. Droz, tome 2, Les PC des pays latins…, op. cit. — J.-L Panné, Boris Souvarine. Le premier désenchanté du communisme, Paris, R. Laffont, 1993, 490 p. — R. Tosstorff, « Moscou versus Amsterdam : the Red International of Labour Unions », in The Communist International and its national sections, 1919-1943, sous la direction de J. Rojahn, Berne, Lang, 1996. — P. Huber, « Les organes dirigeants du Komintern… », op. cit.

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