GIUDICELLI Robert

Par Gérard Leidet, Antoine Olivesi

Né le 14 octobre 1911 au hameau de Chisa à Ventiseri (Corse), abattu le 8 août par la Gestapo, mort le 14 août 1944 à Lyon (Rhône) ; instituteur à Marseille ; membre du Parti communiste, membre du comité central des Jeunesses communistes ; résistant.

Robert Giudicelli
Robert Giudicelli

Robert Giudicelli était le plus jeune d’une famille de six enfants vivant de l’agriculture et de l’artisanat (cordonnerie). Sur le registre de naissance, le père était cordonnier et la mère sans profession. Après avoir obtenu son certificat d’études primaires à Ghisonaccia, il vint à Marseille, où résidait une de ses sœurs, pour suivre des études primaires supérieures, puis entra à l’École normale d’instituteurs d’Aix dans la promotion 1929-1932. Au début des années 1930, il adhéra à la Fédération unitaire de l’enseignement puis au Syndicat national des instituteurs, lors de la fusion, à la fin de 1935. Après avoir été nommé à Saint-Mitre (Bouches-du-Rhône), il enseigna à Septèmes (Bouches-du-Rhône) aux côtés d’Antonia Gérardy et Henri Tranchier puis rejoignit l’école de la rue du Poirier située entre la mairie et les Accoules dans les vieux quartiers de Marseille.

Robert Giudicelli adhéra au Parti communiste en 1934. Deux ans plus tard, il participa au VIIIe congrès national des Jeunesses communistes qui se tint à Marseille du 27 au 30 mars. Au mois de juin suivant, il fut élu membre du bureau régional de cette organisation. Le 14 juillet 1937, il entra au comité central des JC. A Marseille, il fut le principal collaborateur de Victor Joannès qu’il remplaça lorsque celui-ci fut appelé à Paris.

En 1936, Robert Giudicelli participa aux actions du Front populaire. La direction du Parti communiste lui refusa d’aller combattre en Espagne avec les Républicains parce qu’elle jugeait plus utile sa présence à Marseille. Le 2 octobre 1939, il fut classé parmi les militants communistes suspects.

A la déclaration de guerre, en septembre 1939, Robert Giudicelli rejoignit son nouveau poste d’affectation à Carbini dans le sud de la Corse. Au mois de mai 1940, selon plusieurs témoignages, sous les drapeaux, il demanda au général Mollard, commandant en chef des troupes dans cette île, ce qu’il comptait faire en cas de débarquement de l’ennemi. Le général répondit : « je résiste » ! Ces mots de cet officier, démis de ses fonctions peu après, marquèrent fortement son esprit.

Démobilisé après la signature de l’armistice en juin, Robert Giudicelli retourna à Marseille en août 1940. Il reprit ses fonctions de membre du comité central des JC. Un soir, probablement vers la fin de l’année, il se rendit à Port-de-Bouc où il rencontra François Caparros, chargé de reconstituer les JC locales. Les services de police qui le suivaient de près lui attribuèrent l’organisation d’un lancer de tracts des Jeunesses communistes dans les salles de cinéma de Marseille, le 5 décembre 1940. Révoqué de l’enseignement par arrêté préfectoral du 2 janvier 1941 pour avoir quitté son poste sans autorisation, il fut interpellé le 5 janvier à Toulouse (Haute-Garonne) où le Parti communiste l’avait envoyé pour rassembler les membres de la jeunesse communiste de la région. Il fut jugé une deuxième fois par la Cour de Justice qui le condamna la réclusion à perpétuité.

Robert Giudicelli se trouvait dans la prison « Bellevue » de Saint-Étienne quand, le 25 septembre 1943, un commando de FTPF le libéra avec trente autres camarades. Il combattit alors avec les FTPF dans la région lyonnaise où il fut chargé de l’organisation des partisans sous le pseudonyme de « colonel Germain ». Le 8 août 1944, à l’île-Barbe (Lyon), sur un pont enjambant la Saône, il fut pris au piège par la Gestapo. Grièvement blessé au cours de la fusillade et emmené rue de Bonnel, il y fut torturé pendant cinq jours sans que l’ennemi parvienne à le faire parler. Il décéda quelques jours avant la libération de Lyon.

Des obsèques solennelles lui furent rendues le 1er novembre 1944 à Marseille. Deux autres jeunes militants communistes, Vincent Faïta et Jean Robert, guillotinés le 22 avril 1943 dans la cour de la maison d’arrêt de Nîmes, furent associés à cet hommage. La rue de la Colline dans le quartier marseillais d’Endoume où il avait vécu devint rue « Robert Giudicelli ». Deux villages dans lesquels il enseigna au début des années 1930 honorèrent sa mémoire. Son nom fut donné à une artère de Saint-Mitre et à l’école du centre de Septèmes-les-Vallons (associé dans le cas de Septèmes à celui d’Henri Tranchier, un autre instituteur résistant). La plaque commémorative de l’École normale d’Aix-en-Provence indiquait Robert Giudicelli parmi les instituteurs « résistants fusillés par les allemands » (Robert Daugey, Paul Di Lorto, Louis Porta, Albert Pougaud, Lucien Toulmond, Henri Tranchier et Louis Vignol).

Robert Giudicelli fut inhumé dans son village natal en Corse au milieu des paysages qu’il associa dans un même amour avec sa famille – sa mère surtout – dans ses écrits de prison. A cet égard, Louis Gazagnaire publia en 1974 un livre à la mémoire de Robert Giudicelli où il évoqua – par les lettres de ce dernier – son enfance en Corse et ses réponses aux juges de Vichy lors de son procès. « Je ne suis pas de ceux qui désespèrent, de ceux qui pleurnichent et s’affaissent. Je fais partie de cette armée immense de cette humanité qui espère, qui se tourne vers le Levant, là où le soleil triomphe des brumes de la nuit. »

Par décret du 10 janvier 1947 (publié au JO 11/01/1947) Robert Giudicelli obtint à titre posthume la Médaille de la Résistance (Sources : l’Ordre de la Libération).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article73303, notice GIUDICELLI Robert par Gérard Leidet, Antoine Olivesi, version mise en ligne le 14 août 2009, dernière modification le 28 octobre 2022.

Par Gérard Leidet, Antoine Olivesi

Robert Giudicelli
Robert Giudicelli

ŒUVRE : Nombreux articles dans Rouge-Midi entre 1936 et 1939. - Ecrits de prison, carnets comprenant des textes relatifs à l’histoire sociale de la France (Révolution de 48, Commune de Paris), les philosophes du XVIIIe siècle, l’encyclique Rerum Novarum sur la condition des ouvriers, les artistes de la Renaissance…).

SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, M 6/10809, rapport du 29 juin 1935 ; M 6/10933, rapport du 2 octobre 1939. — Arch. Com. de Marseille, listes électorales de 1939. — Service historique de la Défense, Caen AC 21 P 193360 (nc). — Rouge-Midi, 1er octobre et 2 novembre 1944. — Louis Gazagnaire, Message d’un héros de notre temps (préface de F. Billoux), 1974 (photos). — Robert Mencherini, Vichy en Provence ; Midi rouge, ombre et lumières, tome 2, Paris, Syllepse, 2009. — Témoignages (novembre 2002) de son neveu, René Giudicelli, et de Jacqueline Faïta. — Article nécrologique de François Caparros par Germain Laffont dans La Marseillaise de février 1995. Notes de Renaud Poulain-Argiolas. — SHD Vincennes.

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