VANDEL Michel. Pseudonyme : KERJAN dans la clandestinité

Par Nadia Ténine-Michel

Né le 25 avril 1914 à Paris (XIe arr.), mort à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) le 6 juin 2004 ; ouvrier maroquinier, puis permanent syndical et politique ; secrétaire de la fédération communiste de Seine-et-Oise (1948-1966) et membre du comité central.

Benjamin d’une famille de six enfants originaire de Varsovie(Pologne) où son père était ouvrier fabriquant de lanternes de fiacres et sa mère coiffeuse. Les parents de Michel Vandel émigrèrent en Argentine en 1905 après la guerre russo-japonaise que son père avait faite, puis vinrent en France en 1912. Abraham Vandel fut d’abord métallurgiste (chez Renault pendant la guerre), puis ouvrier maroquinier. C’était une famille juive sans attaches religieuses et de sympathies révolutionnaires. Seule, la mère parlait surtout le yiddish. Un frère et un beau-frère de Michel Vandel moururent à Auschwitz.

Il se maria en 1947 avec Germaine Herry, fille d’un ouvrier carrier du Finistère, femme de chambre à Paris, puis ouvrière chez Wonder à Saint Ouen (Seine, Seine-Saint-Denis) où il la rencontra au début de la guerre. Elle devint ensuite son agent de liaison dans la Résistance et fut décorée de la médaille du combattant. Ils eurent deux filles : l’une professeure agrégée de lettres, l’autre responsable du service d’enseignement de la ville de Bezons (Val-d’Oise).

Michel Vandel passa sa jeunesse à Paris dans le quartier de Belleville déjà très bigarré. Il obtint son certificat d’études primaires en 1925 et choisit de travailler, poussé par le refus des injustices et non par la misère. Ouvrier maroquinier dans de petites entreprises fabriquant des sacs de qualité, il dut parfois se faire embaucher dans l’imprimerie durant la crise des années trente. Il appréciait aussi les distractions de la jeunesse ouvrière : sport, bals où il jouait du violon en amateur, théâtre gratuit en faisant la « claque ». Il adhéra aux Jeunesses communistes vers seize ans, fréquenta l’Université ouvrière et la salle « La Bellevilloise » qui projetait des films soviétiques. Après son service militaire en 1934-1935, au premier Zouaves à Casablanca (Maroc), Michel Vandel prit une part active à la grève de 1936, fut élu délégué du personnel de l’entreprise Lehman, rue des Haudriettes et adhéra au PCF. Pendant le Front populaire, il organisa des sorties théâtrales pour la fédération des Cuirs et Peaux. En 1937, il devint permanent syndical, secrétaire du syndicat parisien de la maroquinerie, membre de la commission administrative de la fédération nationale des Cuirs et Peaux, ainsi que de la commission exécutive de l’Union départementale CGT de la région parisienne.

Ayant approuvé le pacte germano-soviétique, Michel Vandel fut mobilisé le 28 août 1939 et resta durant la « drôle de guerre » à la frontière luxembourgeoise. Pour se prémunir d’une éventuelle répression, il fit savoir à ses camarades qu’il était communiste et sut se rendre populaire en participant à un orchestre dans son unité. Celle-ci passa en Belgique le 10 mai 1940, combattit à Namur et Charleroi, puis se replia vers Paris. Son bataillon fit ensuit retraite vers le sud-ouest. Ses membres reçurent la croix de guerre.

Michel Vandel fut démobilisé en Dordogne. Rentré à Paris chez ses parents alors malades, il reprit contact avec Eugène Hénaff, André Tollet, Charles Michels et accepta d’entrer dans la clandestinité. Il échappa de la sorte à une arrestation le 5 octobre 1940 et trouva momentanément du travail grâce à un patron qui acceptait des militants clandestins. Il fit donc toute la Résistance au sein des structures syndicales des anciens unitaires. Dès l’automne 1940, il organisa des « comités populaires », petits groupes menant dans les entreprises une action revendicative légale en même temps que de la propagande illégale. Les débuts en furent difficiles : Vandel se heurta plus encore à la désorientation qu’à la peur des militants qu’il connaissait. Il avait la responsabilité des Cuirs et Peaux, du Textile et de l’Habillement auxquels s’ajoutèrent ensuite le verre, le Papier-carton et les industries chimiques. À la fin de 1940 existaient une centaine de ces comités dans la région parisienne. En 1942, Michel Vandel était avec Maurice Sentuc* responsable d’une des deux directions syndicales interbranches de la région parisienne. Il était intégré à la direction de l’Union départementale comprenant la Seine, la Seine-et-Oise et une partie de la Seine-et –Marne, qui tenait une réunion hebdomadaire
Pour le 14 juillet 1944, il fut l’organisateur d’une grande manifestation de Puteaux à Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine).

En avril 1944, Michel Vandel fut nommé membre du comité départemental de Libération (CDL) de Seine-et-Oise comme représentant de la CGT et participa à sa première réunion tenue au Raincy (maintenant Seine-Saint-Denis). Mais c’est à Paris qu’il prit part aux combats de la Libération, responsable du quartier de la Bourse du travail, rue du Château d’eau en liaison avec un bataillon de francs tireurs et partisans chargé des Halles. Vandel ne se rendit donc à Versailles (Seine-et-Oise devenue Yvelines) qu’après la libération de la ville par les troupes alliées pour installer le CDL, présidé par le communiste Serge Lefranc*, à la préfecture vers le 26 août 1944. Il en fut le vice-président chargé de la commission des affaires sociales. Au même moment lui fut confié le secrétariat départemental de la CGT au sein d’une vaste Union de la région parisienne puisqu’il était déjà membre de son CDL, alors qu’il ne connaissait de la Seine-et-Oise que ses lieux touristiques.Ceci illustre bien la pénurie de cadres de la CGT dans ce département comme ailleurs : le secrétaire d’avant-guerre Varloteau n’y était pas remis en place ; une répression très dure y avait sévi ; on y trouvait des noyaux industriels notables, mais encore dispersés. Les effectifs de la CGT y étaient au neuvième rang français, alors que la population du département était au troisième rang avec 1 400 000 habitants.

Michel Vandel habita de 1944 à 1947 à Paris, dans le XIIIe. Il s’installa en Seine-et-Oise en 1947, d’abord à Mesnil le Roi (maintenant Yvelines), puis à Argenteuil (Val–d’Oise). Il accéléra son apprentissage du terrain en devenant en 1945 conseiller général dans le canton plutôt conservateur de Maisons-Laffitte, grâce à une élection triangulaire. Président de la commission des Travaux publics, il se consacra au déblaiement, puis aux débuts de reconstruction d’un département très éprouvé par les bombardements (au treizième rang des départements sinistrés). Dès la Libération, il siégeait au bureau de la fédération communiste, d’abord de la région Ouest, puis de la Seine-et-Oise quand le PCF se calqua sur la structure administrative en juin 1945.

En mai 1948, Michel Vandel dut brusquement abandonner le syndicalisme auquel il se vouait depuis plus de dix ans pour devenir secrétaire de la fédération communiste de Seine-et-Oise, une des plus grosses de France, en remplacement de Robert Ballanger, alors évincé du poste. En même temps que ce dernier, la majeure partie de la direction fédérale était remplacée. C’était donc une tâche très délicate qu’il devait remplir jusqu’ au partage de la fédération en 1964.. Son autorité ne cessa de s’y renforcer, comme le notait un observateur lors d’une campagne électorale. Il avait dû parfaire sa connaissance des hommes, différents de ceux de la mouvance syndicale et d’un département très divers et en pleine croissance démographique et industrielle. En 1950, il entra au comité central comme suppléant, puis titulaire en 1956, là encore en remplacement de Robert Ballanger et en tant que secrétaire d’une importante fédération. Il y travailla à la commission d’organisation au côté d’Auguste Lecoeur* et devait lui porter la première critique concernant les « instructeurs de cellule « à la session du 6 mars 1954 du comité central.

En 1964, la fédération de Seine-et-Oise, d’une étendue et d’une lourdeur excessives, fut divisée en deux en attendant le découpage définitif du département. Michel Vandel resta secrétaire de la partie nord puis en 1966 abandonna sur sa demande cette charge qu’il estimait « pas facile » et resta membre du bureau fédéral du Val-d’Oise. En 1964, il passa du comité central à la commission centrale de contrôle financier où il resta jusqu’en 1976 et collabora avec Jacques Duclos à la commission de propagande.

Avant tout homme d’appareil, Michel Vandel eut peu de mandats électifs. Il fut à deux reprises candidat aux élections législatives, en 1962 dans la 11e circonscription de Seine-et-Oise et en 1967 dans la même devenue 9e de Seine-Saint-Denis. Il avait perdu en 1951 son siège de conseiller général de Seine-et-Oise, mais fut de 1967 à 1979 conseiller général du Val d’Oise, mandat qu’il estimait plus adapté à une direction fédérale que celui de député. Il cessa progressivement ses activités militantes dans les années soixante dix tout en collaborant avec les vétérans du PCF et il approuva l’évolution du parti impulsée par Robert Hue.

Michel Vandel fut décoré de la croix de guerre 1939-1940 à titre militaire, de la médaille de la Résistance et en 1999 de la Légion d’honneur.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article74484, notice VANDEL Michel. Pseudonyme : KERJAN dans la clandestinité par Nadia Ténine-Michel, version mise en ligne le 5 octobre 2009, dernière modification le 21 décembre 2019.

Par Nadia Ténine-Michel

SOURCES : Arch. Dép. Seine-et-Oise, 1 W 372,417,428,432,471,978, 985,992 ; 1201 W39 ; compte rendu du conseil général 1945. — Arch. du PCF. — Arch. M.Vandel. — Entretiens avec Michel Vandel, 2 et 10 février 1998. — La Renaissance de Seine-et-Oise, 3 novembre 1962.

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