DEGERT Robert, Jean, Christian [dit Falot]

Par Daniel Grason, Michèle Rault

Né le 14 février 1923 à Paris (XIVe arr.), exécuté sommaire le 1er août 1944 à Montrouge (Seine, Hauts-de-Seine) ; courtier en assurances ; résistant FTPF domicilié à Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne).

Robert Degert
Robert Degert

Robert Degert était le neveu de Joseph Degert, né le 29 septembre 1896 à Tarnos (Landes), militant du Parti communiste, membre du comité des chômeurs d’Ivry en 1927 et secrétaire de la section locale du Secours rouge international en 1929 et 1936. Le père de Robert Degert, infirmier, mourut alors que son fils Robert était très jeune ; ce dernier vécut alors à l’hospice d’Ivry-sur-Seine où sa mère Gabrielle, née Lavallée était infirmière ; puis Robert Degert demeura chez sa mère, 7 avenue de la République à Ivry-sur-Seine.
Titulaire du certificat d’études primaires, Robert Degert était employé d’assurances dans un cabinet de courtage dans le IIIe arrondissement de Paris. Il quitta ce travail en mars 1943. Il partit à Brest (Finistère) où il travailla pour l’organisation Todt. Là il fit la connaissance de Marcel Laurent qu’il connaissait de vue, car il avait habité près de chez lui. Ils travaillèrent dans plusieurs fermes du pays breton et revinrent en région parisienne en janvier 1944.
À la fin février ou au début mars 1944, Robert Degert, dit désormais Falot, entra dans une organisation de résistance luttant contre les Allemands en même temps que Marcel Laurent ; en fait tous les deux devinrent membres du bataillon Vengeance des FTP (région P 6) ; Marcel Laurent, qui était chef de groupe transmettait les ordres. Le 15 avril, Robert Degert participa à sa première action, la réquisition de tabac chez un buraliste de Chelles (Seine-et-Marne), avec Roger Salomon dit Rochard, Marcel Laurent dit Raymond Fabre, Leblanc et deux autres membres de l’organisation.
À la mi-mai, Robert Degert participa avec Marcel Laurent, Claude Guy dit Martin, et Balan, dont véritable nom resta inconnu des autres membres de l’équipe, à un attentat contre un herboriste de Savigny-sur-Orge (Seine-et-Oise, Essonne). L’opération avait été remise plusieurs fois, l’homme étant absent ; celui-ci était accusé d’avoir dénoncé des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO), et, selon Roger Salomon, d’avoir fait incorporer de force une quarantaine de jeunes dans la LVF et la Milice. Un pistolet automatique 7,65 mm à la main, Marcel Laurent entra dans la boutique, commanda de la menthe et tira... une seule fois : lors de sa première action armée, la peur paralysa son bras. L’herboriste fut légèrement touché au cou.
La même équipe opéra à Choisy-le-Roi (Seine, Val-de-Marne), une boulangerie fut délestée de ses tickets de pain.
Les groupes FTP étaient faiblement armés, un ordre fut donné : tuer un militaire allemand et récupérer son arme. Le 26 juin 1944 à Montrouge, les quatre membres de cette même équipe croisèrent un militaire allemand dans une rue où il y avait peu de monde ; Marcel Laurent et Claude Guy étaient sur le trottoir d’en face, il était 15 h 45, Robert Degert et Balan tirèrent. Frédérick Zavetzke, un sous-officier allemand membre d’une formation de chars de combat, s’effondra, touché de deux balles dans la tête, une à l’abdomen et une à la main droite ; Marcel Laurent ramassa son arme. Les quatre membres de l’équipe réussirent à prendre la fuite sans être inquiétés. Un gardien d’une usine toute proche aperçut un corps humain allongé, il pensa qu’une personne avait eu un malaise. Ayant constaté qu’il s’agissait d’un meurtre, il alerta des cheminots allemands. La Feldgendarmerie fut prévenue, les services de la police allemande confièrent l’enquête à la Brigade spéciale no 2 (BS2).
Le 30 juin, un rendez-vous était fixé Porte d’Italie, Paris (XIIIe arr.) ; un véhicule Citroën attendait, ce véhicule avait été volé à l’École des arts et manufactures, communément appelée École Centrale Paris et installée alors rue Conté à Paris (IIIe arr.). À l’intérieur se trouvaient Georges Schlepp, Marcel Laurent, Claude Guy et deux inconnus. Avec Robert Degert, ils se rendirent à Vitry (Seine, Val-de-Marne) chez un buraliste. Ceux qui pénétrèrent chez le buraliste étaient armés, l’un d’eux annonça « On vient chercher le tabac ! » Georges Schlepp sortit avec trois sacs contenant le butin : cinq cartouches de Gauloises et deux cent quarante paquets de tabac. Le lendemain Marcel Laurent donna quelques paquets de cigarettes et de tabac à Robert Degert.
Roger Salomon avait rendez-vous avec Robert Degert, le 5 juillet à 8 heures 30, rue de Lancry à Paris (Xe arr.). Les deux hommes furent maîtrisés par six inspecteurs de la BS2. Roger Salomon était l’un des responsables, il recevait des appointements mensuels de trois mille francs. Robert Degert était porteur d’une fausse carte d’identité au nom de Robert Kerviles. Les policiers perquisitionnèrent son domicile, situé dans un hôtel meublé, 18 rue Raspail à Ivry-sur-Seine. La chambre était louée sous sa fausse identité depuis le 3 juillet. Un pistolet automatique 7,65 mm de marque Teuf-Teuf fut saisi.
Robert Degert fut interrogé dans les locaux des brigades spéciales. Il déclara aux policiers, concernant sa participation aux actions, que c’était Marcel Laurent qui transmettait les directives ; ce dernier lui donnait de temps à autre des tickets d’alimentation et quelques centaines de francs. Sur l’attentat de Montrouge, il déclara : « L’ordre était venu par l’intermédiaire de Marcel Laurent, mais nous ne voulions pas exécuter ces ordres, qui nous paraissaient trop dangereux et qui nous répugnaient. » Il affirma : « Je n’ai jamais connu le nom de l’organisation à laquelle j’appartenais. J’ignorais complètement qu’elle était d’obédience communiste. »
Outre Robert Degert et Claude Guy d’Ivry-sur-Seine, et Marcel Laurent de Vitry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne), d’autres membres de l’organisation furent arrêtés : Georges Schlepp d’Argenteuil (Seine-et-Oise, Val-d’Oise) et Raymond Jozon de Puteaux (Seine, Hauts-de-Seine) ; tous les cinq furent fusillés.
Arrêtés également, Albert Mansion, Roger Salomon, Eugénie Laurent l’épouse de Marcel Laurent, Lucien Angelard et son épouse Jeanne Angelard furent déportés le 15 août 1944.Le convoi partit de la gare de Pantin, les installations de la gare de l’Est ayant été détruites par la Résistance. Albert Mansion, Roger Salomon et Lucien Angelard arrivèrent le 20 août 1944 à Buchenwald (Allemagne), ils furent transférés à Dora, ils décédèrent à Ellrich, Albert Mansion le 18 janvier 1945, Roger Salomon le 9 mars et Lucien Angelard le 4 avril. Eugénie Laurent fut déportée à Ravensbrück ; affectée au commando de Torgau, elle mourut à Ravensbrück le 21 décembre 1944. Jeanne Angelard déportée à Ravensbrück fut libérée en avril 1945 à Schönefeld.
Incarcéré à Fresnes le 13 juillet 1944, mis à la disposition des Allemands, Robert Degert fut exécuté le 1er août 1944 avec Marcel Laurent et Claude Guy, à l’angle des rues Fontenay et Marcel-Sembat, à Montrouge, là où le sous-officier allemand avait été abattu. Une fiche était épinglée sur Robert Degert, elle portait ces mots : « Ici, j’ai tué un soldat allemand, voilà pourquoi j’ai été exécuté. »
Le lendemain 2 août plusieurs bouquets de fleurs furent déposés par des passants là où furent trouvés les trois corps. Une infirmière en tenue déposa une gerbe. Devant ces manifestations de sympathie à l’égard des trois résistants, la police municipale se déploya et invita les passants à circuler. À 17 heures, plusieurs personnes déposèrent une gerbe au monument aux morts de la ville, distant d’un kilomètre. Un ruban portait l’inscription : « Hommage aux fusillés de ce matin ».
Les obsèques de Robert Degert eurent lieu le 5 août 1944, une cérémonie religieuse se déroula à l’église Saint-Pierre et Saint-Paul, à Ivry-sur-Seine. Il fut inhumé dans le cimetière communal.
La ville de Montrouge apposa une plaque commémorative le 1er novembre 1944, signée du Comité local de libération, sur le lieu des trois exécutions : « Fusillés à cette place par l’envahisseur hitlérien ».
Le 9 juin 1945, Louis Figard, beau-père de Robert Degert, porta plainte contre les inspecteurs qui l’avaient arrêté. Il déclara : « Je les considère comme étant à l’origine de sa mort. »
Robert Degert fut reconnu « Mort pour la France » par le ministère des Anciens Combattants le 20 juillet 1953, et le titre d’« Interné Résistant » lui fut accordé le 12 mars 1956. Il reçut la Médaille de la Résistance par décret du 2 avril 1959, publié au JO le 8 avril 1959.
Le 27 juillet 1945, le conseil municipal d’Ivry-sur-Seine décidait de donner à la rue de Gournay, le nom de Robert Degert ; le 30 juillet 1945, le conseil municipal attribua son nom à une rue de Vitry-sur-Seine.
Le nom de Robert Degert figure sur les monuments aux morts 1939-1945 d’Ivry-sur-Seine et de Montrouge, et à Montrouge sur la plaque commémorative de la mairie.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article75021, notice DEGERT Robert, Jean, Christian [dit Falot] par Daniel Grason, Michèle Rault, version mise en ligne le 11 novembre 2012, dernière modification le 22 novembre 2022.

Par Daniel Grason, Michèle Rault

Robert Degert
Robert Degert

SOURCES : Arch. PPo, BA 2104, PCF carton 16, KB 1, KB 23, KB 86, 77W 864, GB 190 (Photo), IML 1944. — DAVCC, Caen (Notes Delphine Leneveu), AC 21 P 331985 et AC 21 P 630824. — SHD Vincennes GR 16 P 165299. — FMD, Livre-Mémorial. — Arch. mun. Ivry-sur-Seine. — Arch. com. Vitry-sur-Seine, 1BIB25. — État civil.

PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 190.

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