Né le 4 octobre 1883 à Porth, district de Rhondda ; mort le 31 octobre 1935 à Merthyr Tydfil, South Wales ; ouvrier mineur, syndicaliste et socialiste.
Fils de John et Jane Ablett, Noah est né dans une famille de mineurs. Il est l’avant-dernier de onze enfants — un rang qui lui a permis, selon sa propre expression, d’échapper « à la pauvreté et aux souffrances d’une famille nombreuse ouvrière ». Il fréquente même l’école primaire supérieure de Ferndale. Sans doute se destinait-il alors à la prédication car, dès l’âge de douze ans, il prêche dans les chapelles méthodistes.
Pendant quelques années Ablett travaille à la mine. Il se met ensuite à étudier en vue d’une carrière dans le service des impôts. Un grave accident au fond anéantit ce projet quand il apprend de son médecin que ses blessures le rendent inapte pour la fonction publique. Il n’a pas encore dix-huit ans. Reprenant alors le métier de mineur, il s’engage de plus en plus dans le syndicalisme. On ne sait pas à partir de quand il est devenu socialiste. Mais il écrira plus tard que ce sont les ouvrages de Blatchford* et de Marx qui l’ont influencé. À l’évidence le tournant de son évolution intellectuelle se situe vers 1907. À cette date il obtient une bourse, comme mineur, pour aller au collège fondé pour les ouvriers à Oxford, Ruskin College. Ablett fait partie du premier groupe de mineurs de Galles du Sud à être admis au collège.
Quand il quitte Oxford, Ablett est devenu un socialiste militant en même temps qu’un adepte du syndicalisme révolutionnaire. Par son goût pour la théorie comme par son ardeur de propagandiste, il est certainement le plus, remarquable des anciens étudiants de Ruskin College pour la période antérieure à 1914. Lorsque sont fondés successivement la Plebs League (octobre 1908), puis le collège marxiste de Londres, le Central Labour College (1909), Ablett, au prix d’un immense effort, organise des cours de marxisme dans toutes les vallées minières du pays de Galles (lui-même avait joué un rôle de premier plan dans la création du Central Labour College).
Vers la même époque, Ablett est élu vérificateur syndical des poids, à Mardy. Au début de 1911, il entre au conseil exécutif de la Fédération des mineurs de Galles du Sud. La même année, il joue un rôle décisif dans les débats du Comité de grève (Cambrian Committee) et dans les négociations qui mettent fin à la grève des houillères. Au cours de ces discussions Ablett manifeste une opposition farouche envers William Abraham*, le président du Comité, et envers les autres vétérans. Avant même qu’Ablett ne revint d’Oxford, Noah Rees avait constitué un groupe de militants plus jeunes pour débattre des questions du jour, tant professionnelles que politiques. Lorsque Ablett les rejoint, ensemble ils créent en 1911 un « Comité officieux de réforme » (Unofficial Reform Committee) avec W.H. Mainwaring* comme secrétaire. C’est en bonne partie ce comité qui provoque la défaite du vieux leader lors du renouvellement du Conseil exécutif de la Fédération des mineurs de Grande-Bretagne à l’automne de 1911. C’est également dans cette atmosphère bouillonnante et fiévreuse qu’est rédigée la fameuse brochure The Miners’ Next Step publiée en 1912. Si les rédacteurs en sont restés volontairement anonymes, on connaît les noms des huit mineurs désignés pour élaborer le texte. Parmi eux, quatre selon certains, six selon d’autres, ont écrit la version finale : Noah Ablett, George Dolling, CL. Gibbons, Will Hay (directeur du South Wales Worker), W.H. Mainwaring et Noah Rees. Les deux derniers mineurs seraient D. Densley et T. Smith.
The Miners’ Next Step est apparu comme l’expression parfaite des thèses du syndicalisme révolutionnaire. Pourtant ni Ablett ni ses compagnons n’étaient de purs syndicalistes révolutionnaires, au sens rigoureux du terme. Les deux idées de base d’Ablett depuis son entrée au conseil exécutif de la Fédération des mineurs de Galles du Sud, ce sont d’une part l’organisation d’un grand syndicat d’industrie pour tous les mineurs de Grande-Bretagne, d’autre part le salaire minimum. Toute sa vie, il est resté fidèle à ces deux revendications.
Au moment de la Première guerre mondiale, Ablett partage les positions de l’Unofficial Reform Committee. Lorsque au milieu de juillet 1915, éclate la grève des mineurs, dont les journaux britanniques et français rendent largement compte, Ablett y joue un rôle central en compagnie des autres membres du conseil exécutif de la fédération. En 1917, il fait partie des représentants des mineurs du Sud Galles à la fameuse Convention de Leeds du 3 juin. La même année, il dépose devant la Commission d’enquête sur le malaise ouvrier (Commission of Enquiry into Industrial Unrest). En 1918, Ablett est élu délégué des mineurs, à Merthyr, et le reste jusqu’à la fin de sa vie. De 1921 à 1926, il fait partie de l’exécutif de la fédération des mineurs de Grande-Bretagne. Mais finalement, en dépit de sa forte personnalité, c’est un homme qui n’est jamais parvenu aux plus hautes responsabilités. Candidat des mineurs gallois pour le poste de secrétaire général de la Fédération des mineurs de Grande-Bretagne, il est battu au quatrième et dernier tour par Frank Hodges* (celui-ci obtient 31 189 voix contre 26 176 à Ablett.) Et lorsqu’en décembre 1923 Hodges, élu au Parlement, est contraint d’abandonner le secrétariat général de la fédération, c’est cette fois A.J. Cook* qui passe devant Ablett après plusieurs tours de scrutin.
Grand orateur, Ablett est resté un socialiste militant jusqu’à sa mort. Avec son don de la persuasion il a exercé une influence considérable sur des générations de mineurs gallois, et par ailleurs il a toujours été très actif à la Plebs League. Au moment de la grève générale de 1926 on le trouve au premier rang du combat : son action lui vaut même d’être arrêté et condamné à une amende à la suite d’un discours jugé incendiaire. Cependant à partir de là il se trouve peu à peu éclipsé par d’autres leaders. Et comme par ailleurs il développe son penchant pour la boisson (qui avait déjà joué contre lui dans sa carrière syndicale) cela tend à compromettre son rayonnement.
Il meurt à cinquante-deux ans d’un cancer, laissant une veuve et des enfants.
ŒUVRES PRINCIPALES : Easy outlines of Economics (Données simples d’économie), Oxford, 1919. — What we want and why (Ce que nous voulons et pourquoi), en collaboration, Londres, 1922.
BIBLIOGRAPHIE : K.O. Morgan, Wales in British Politics, 1868-1922, Cardiff, 1963, 2e édition, 1970. — W.W. Craik, The Central Labour College, 1909-1929, Londres, 1964. — J. Bellamy et J. Saville (éd.), Dictionary of Labour Biography, t. III.