Né le 9 mai 1889 à Newport, Monmouthshire ; mort le 3 mars 1939 à Montana, Suisse ; socialiste et pacifiste.
Originaire d’un milieu aisé (son père était un homme d’affaires), Clifford Allen fait ses études dans des écoles privées avant d’entrer à l’Université de Bristol avec l’intention de devenir prêtre. Il est alors anglican et conservateur, mais il commence à s’intéresser aux questions sociales. En 1908 encore, lorsqu’il arrive au collège de Peterhouse, à Cambridge, il pense toujours au sacerdoce. Là, cependant, il se lie d’une profonde amitié avec Rupert Brooke, le poète et St John Ervine, l’auteur dramatique — tous deux fabiens. Allen se convertit alors à un socialisme modéré et s’inscrit à la section fabienne de l’Université de Cambridge. Parallèlement, sous l’influence de Lowes Dickinson*, il adopte des vues agnostiques.
Lorsqu’il quitte Cambridge, en 1911, Allen est nommé secrétaire d’un comité formé de membres du parti travailliste et de l’Independent Labour Party (ILP), comité dont la mission est de lancer, sous le nom de Daily Citizen un quotidien officiel du mouvement ouvrier. Le premier numéro du Citizen paraît le 8 octobre 1912, mais il doit faire face à la concurrence du Daily Herald, journal socialiste non officiel lancé quelques mois auparavant par Lansbury*.
Ce sont en vérité les convictions pacifistes d’Allen qui l’ont fait connaître du grand public. Quand la guerre de 1914 éclate, il adopte une attitude d’opposition absolue à la guerre. Dans la brochure qu’il publie alors, « l’Allemagne a-t-elle raison et l’Angleterre tort ? » (Is Germany right and Britain wrong ?), il impute la responsabilité de la guerre au seul capitalisme ; en compagnie de Fenner Brockway* et d’autres pacifistes, il lance un mouvement contre la conscription : la No-Conscription Fellow-ship. Emprisonné en 1916 parce qu’il refuse d’être mobilisé, puis relâché, il est de nouveau emprisonné à deux reprises (la seconde fois, il est condamné à deux ans de travaux forcés). Lui qui avait toujours été de santé fragile, il voit son état s’aggraver à la suite de cette condamnation. Parmi ceux qui prennent alors sa défense, l’on compte Bernard Shaw*. Comme plusieurs des objecteurs de conscience emprisonnés appartiennent à des familles influentes, ils disposent de certains appuis auprès des autorités, et c’est ce qui permet à Allen de faire partie du groupe de ceux qui sont relâchés en décembre 1917. Après quelques mois en maison de repos, il est gagné aux idées du « socialisme de guilde » vers la fin de 1918 en même temps qu’il milite activement à l’ILP.
Au cours des années suivantes, Clifford Allen joue un rôle de premier plan à l’ILP Élu en 1921 trésorier du parti, il pousse beaucoup à la transformation du journal The Labour Leader qui en 1922 prend le nom de New Leader avec Brailsford* comme rédacteur en chef. La même année, Allen réorganise complètement la direction du parti et en 1923, il en devient président. Cependant en 1925, il démissionne de son poste à la suite de critiques affirmant que la direction du parti est de plus en plus dominée par les intellectuels d’origine bourgeoise et également en raison de désaccords avec James Maxton*. À partir de cette date, tout en se considérant toujours comme socialiste, Allen n’aura plus beaucoup de rapports avec la gauche. Il continue de travailler au Daily Herald (dont il assume même la direction de 1925 à 1930). Resté personnellement lié avec Ramsay MacDonald*, il prend le parti de celui-ci lors de la crise de 1931 et de la scission qui s’ensuit.
Durant les années 1930, la carrière d’Allen fut essentiellement consacrée à la défense de la paix entre les peuples. Depuis janvier 1932, Allen, élevé par MacDonald à la pairie, porte le titre de Lord Allen of Hurtwood (ce qui a contribué à l’éloigner de beaucoup de ses anciens amis) et garde encore l’espoir d’influencer la politique officielle du mouvement travailliste. Malgré sa mauvaise santé, il continue à s’intéresser aux problèmes sociaux, mais avec la montée du nazisme, il se convainc que sa mission fondamentale est la sauvegarde de la paix. À ses yeux, il n’existe qu’une solution — négocier, et il pense avoir un rôle important à jouer à cet égard. Dans ce dessein, il rend visite aux hommes politiques en place, notamment Benes et Hodja en Tchécoslovaquie, Ribbentrop en Allemagne. Rien d’étonnant dès lors à ce qu’il soutienne à fond la po litique de Chamberlain et les accords de Munich, mais il ne vivra pas assez longtemps pour assister à leur échec : entré dans un sanatorium suisse à la fin de 1938, il y meurt quelques semaines plus tard. Selon son vœu, ses cendres seront éparpillées dans le lac de Genève.
Lady Allen (1897-1976) a contribué au développement des écoles maternelles et des terrains de jeux pour enfants en Grande-Bretagne (adventure playgrounds).
ŒUVRE : Plusieurs brochures, notamment : Is Germany right and Britain wrong ? (L’Allemagne a-t-elle raison et l’Angleterre tort ?), Londres, 1914. — Labour’s Future at Stake (L’avenir du Labour en question), Londres, 1932. — Britain’s Political Future (L’avenir politique de la Grande-Bretagne), Londres, 1934. — Peace in our Time (La paix en notre temps), Londres, 1936.
BIBLIOGRAPHIE : A. Marwick, Clifford Allen : the open conspirator, Edimbourg, 1964. — M. Gilbert, Plough my own Furrow : The Story of Lord Allen of Hurtwood, Londres, 1965. — M. Allen, M. Nicholson, Memoirs of an Uneducated Lady : Lady Allen of Hurtwood, Londres, 1975. — J. Bellamy et J. Saville (éd.), Dictionary of Labour Biography, t. II.