BURT Thomas

Né le 12 novembre 1837 à Murton Row, Northumberland ; mort le 12 avril 1922 à Newcastle ; syndicaliste et député libéral.

Thomas Burt est né dans une famille de mineurs. Son père offre l’image de la trilogie classique : membre de l’Église méthodiste primitive, adepte de la tempérance, syndicaliste militant. Du côté de sa mère, on est mineur de génération en génération. Le grand-père maternel, Thomas Weather-burn, s’occupe de l’éducation de l’enfant, et c’est à ce vieux mineur que plus tard Burt attribuera l’essentiel de sa réussite dans la vie.

Si les Burt et les Weatherburn (comme la plupart des familles de mineurs du bassin minier du Durham-Northumberland) sont des méthodistes primitifs convaincus (à cette branche du non-conformisme ont appartenu quantité de pionniers du syndicalisme et du socialisme britannique), Thomas Burt, pour sa part, n’a jamais adhéré formellement à la secte.

L’instruction du jeune garçon reste à un niveau très rudimentaire. Une des raisons tient aux activités syndicales du père qui l’exposent à maintes reprises aux représailles patronales. Or comme en général les logements dans les corons appartenaient au propriétaire de la mine, chaque fois qu’un mineur était renvoyé, il perdait à la fois son travail et son toit. C’est pourquoi l’enfance de Thomas Burt est ponctuée de déménagements forcés et du coup sa fréquentation de l’école n’a pu être qu’intermittente.

Le lendemain de son dixième anniversaire (minimum légal pour être embauché) Thomas Burt entre à la mine. Au cours de sa carrière de mineur, il parcourra tous les échelons de la hiérarchie des travailleurs du fond. Lui que la tradition militante des siens a fait grandir dans une ambiance de lutte syndicale, il se lance à son tour dans l’action dès l’âge de seize ans. Mais pour cela il prend conscience très vite qu’il lui faut compléter son instruction. Aussi se met-il à lire avidement. Plus tard, il considérera Ruskin* comme l’un des auteurs qui l’ont le plus marqué et il aura une réputation de vaste culture.

Pendant la première moitié du XIXe siècle le syndicalisme des mineurs dans le nord-est de l’Angleterre n’avait connu qu’une existence spora-dique. La dureté de la répression patronale, jointe à une véritable oppression politique, avait engendré dans tout le bassin un climat d’affrontement et de haine sans équivalent dans les autres secteurs industriels — (du moins pour une période aussi longue : de là chez les mineurs un très fort sentiment de solidarité de classe).

C’est en 1863 que se constitue, dans le Northumberland, la première association des ouvriers de la mine, la Miners’ Mutual Confident Association : organisation qui va durer des années avec l’aide de Burt (il en est le secrétaire de 1865 à 1913). Bien que l’existence de travail de Burt se soit déroulée dans une industrie riche en conflits du travail et en luttes politiques, lui-même a toujours été réputé pour l’insistance qu’il mettait à utiliser toutes les procédures possibles de conciliation avant d’adopter l’arme de la grève. En fait, s’il a agi ainsi, c’est qu’il avait compris que les mineurs se trouvaient en position d’infériorité dans les négociations. Seulement ce qui pouvait être vrai au commencement de sa vie de militant syndicaliste n’était peut-être plus aussi évident une fois consolidée l’organisation des trade unions. Quoi qu’il en soit, Burt est resté fidèle à ces principes aussi longtemps qu’il a exercé des responsabilités syndicales. Et c’est lui qui, en 1894, après des années d’effort, a obtenu la mise sur pied d’une procédure de conciliation dans les charbonnages du Northumberland. Dans le domaine du trade-unio-nisme comme sur le plan politique, Burt est l’exemple parfait du militant Lib-Lab (Liberal-Labour) qui a dominé la vie sociale jusqu’aux années 1880, date à laquelle la renaissance du socialisme commence à modifier le paysage politique.

C’est en 1873 que Burt est choisi comme candidat libéral pour représenter au Parlement la circonscription de Morpeth, dans le Northumberland. Il est élu en 1874, ainsi qu’un autre dirigeant mineur, Alexander Macdonald*. Ce sont les deux premiers syndicalistes à entrer au Parlement. Pendant la campagne électorale, Burt avait présenté aux électeurs un programme typiquement radical, avec pour revendications essentielles, le Home Rule pour l’Irlande, le suffrage universel, une indemnité parlementaire, un nouveau découpage électoral, l’instruction gratuite et laïque, le désétablissement de l’Église anglicane, la suppression des lois sur la chasse, la réforme agraire.

Aux Communes, Burt n’a pris que rarement la parole, mais à chaque fois qu’il l’a fait, on l’a écouté avec attention. Son nom est associé à une législation sociale importante : législation qui n’a rien de spectaculaire, mais qui visait avant tout à l’amélioration effective des conditions de vie et de travail des salariés dans une perspective de changement lent de la société. Burt en effet s’accommodait d’une politique des petits pas (« gradualisme »). Dans le gouvernement libéral de 1892-1895, Burt occupe un poste subalterne de secrétaire parlementaire du ministre du Commerce (parliamentary secretary to the Board of Trade). Il quittera le Parlement en 1918 seulement, avec le titre de « père de la Chambre » (qui désigne le député ayant la plus grande ancienneté parmi les parlementaires des Communes).

Membre influent du Trades Union Congress, Burt a présidé le congrès tenu en 1891 à Newcastle. En même temps il a été le délégué des mineurs à de multiples conférences internationales. Mais il se trouve en désaccord avec les nouveaux courants qui commencent à se manifester dans le monde du travail aux alentours de 1885 ; en particulier il s’oppose aux revendications socialistes et au mot d’ordre du Parti ouvrier indépendant. D’autre part, lorsqu’en 1889 est fondée la Fédération des Mineurs (Miners’ Federation of Great Britain) son influence contribue à maintenir en dehors les bassins du Northumberland et de Durham : il faudra attendre 1908 pour que ces deux bastions du trade-unionisme Lib-Lab s’affilient finalement à la fédération.

En matière de politique étrangère, Burt, sans être un véritable pacifiste, était très préoccupé par la menace grandissante de conflit européen. C’est lui qui préside de 1882 à 1914 la Ligue internationale pour la paix.

Mais les ennuis de santé commencent à accabler Burt, et pendant les trois dernières années de sa vie, il est pratiquement cloué au lit. À vrai dire, depuis longtemps, il se trouvait dépassé. Tant par sa vie que par son œuvre, il représente le syndicalisme victorien à la veille de l’émergence du travaillisme.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article75340, notice BURT Thomas, version mise en ligne le 12 décembre 2009, dernière modification le 12 décembre 2009.

ŒUVRE : Lecture on the Life and Work of Joseph Cowen (Conférence sur Joseph Cowen, sa vie, son œuvre), Newcastle, 1911. — Thomas Burt… An Autobiography (Thomas Burt, Mémoires), Londres, 1924.

BIBLIOGRAPHIE : Gilbert Boucher, Étude sur les « Trade Unions » : un député ouvrier anglais, Paris, 1892. — T.G. Meech, From Mine to Ministry. The Life and Times of the Right Honourable Thomas Burt, Londres, 1908. — A. Watson, A Great Labour Leader. Being a Life of the Right Honourable Thomas Burt, Londres, 1908. — E. Welbourne, The Miners’ Unions of Northumberland and Durham, Cambridge, 1923. — R.P. Arnot, The Miners… 1889-1910, Londres, 1949 ; The Miners : Years of Struggle, Londres, 1953. — Joyce Bellamy, John Saville (éd.), Dictionary of Labour Biography, t. 1, 1972.

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