Né le 27 novembre 1875 à Londres ; mort le 16 décembre 1942 à Peaslake, Surrey ; philanthrope, pacifiste.
Né dans une famille de dix enfants, Charles Buxton est le troisième fils de Sir Thomas Fowell Buxton et de Lady Victoria Noel, fille du comte de Gainsborough. L’un de ses quatre frères sera évêque de Gibraltar, un autre deviendra Lord Noel-Buxton*.
Comme son père, Buxton fait ses études secondaires dans la public school de Harrow, puis il va à l’Université de Cambridge, à Trinity College. Ensuite sa fortune personnelle lui permet de consacrer son temps au service de la collectivité. C’est ainsi qu’au début des années 1890, il dirige avec son frère Noël une enquête sur les conditions de vie des classes misérables de Londres. Par ailleurs les deux frères effectuent plusieurs longs voyages à travers l’Europe.
En 1902, Buxton est admis au barreau. Cette année-là il fonde en compagnie de son frère, de James Bryce, le politicien libéral et de Brailsford*, le Comité des Balkans. De 1902 à 1910, il dirige un collège pour ouvriers, le Morley College for Working Men and Women. C’est à la même époque qu’il devient le premier président de la section de la Workers’ Educational Association chargée de couvrir la moitié sud de Londres. Pendant toutes ces années, Buxton mène une vie très simple au milieu des pauvres des quartiers sud de la Tamise.
De 1906 à 1908 Buxton est rédacteur en chef du périodique Albany Review (précédemment : l’Independent Review). Il se présente une première fois aux élections en 1906, sous l’étiquette libérale, dans la circonscription d’East Hertfordshire, mais il est battu. Avec son frère Noel il s’efforce alors d’améliorer le sort des ouvriers agricoles en faisant campagne pour la distribution de lots de terrain aux journaliers et pour un système de retraites sans contribution des intéressés.
À la faveur d’une élection partielle Buxton se présente une deuxième fois à la députation en 1908 : candidat libéral dans le Mid-Devon, il est à nouveau battu. Par contre il sera élu en janvier 1910, mais pas pour longtemps : il perdra son siège aux élections suivantes en décembre de la même année. Comme il est devenu un admirateur de Ramsay Mac-Donald*, ses amis libéraux le soupçonnent de glisser au socialisme. Cela ne l’empêche pas d’être proposé en 1912 comme candidat libéral pour une circonscription de l’East End, Hackney Central, circonscription qui du reste le rejettera en 1916 en raison de son pacifisme déclaré.
En effet, lorsque éclate la guerre de 1914, Buxton s’oppose à l’esprit belliqueux. Avec MacDonald et quelques libéraux, notamment E.D. Morel*, Charles Trevelyan* et Ponsonby*, il participe à l’Union pour le contrôle démocratique (Union of Democratic Control) dont il devient, après Morel, le plus actif militant et l’un des principaux soutiens financiers. En collaboration avec Noel Buxton, il écrit un ouvrage sur les Balkans (The War and the Balkans, 1915) dans lequel il préconise une confédération des États balkaniques et repousse les prétentions territoriales de l’Italie. En 1917, l’Union pour le contrôle démocratique publiera un mémorandum sur les buts de la guerre (Memorandum on War Aims) qui adoptera le point de vue des deux frères à ce sujet.
Au mois d’août 1915, Charles Buxton rédige avec Clifford Allen* et d’autres pacifistes un appel pour une paix négociée (dans cette perspective les États neutres devaient faire office de médiateurs). Et en 1917, il approuve — de même que G.D.H. Cole* et Léonard Woolf* — Brailsford quand celui-ci déclare que la Révolution russe représente un gain moral pour la démocratie et que le moment est venu d’une paix négociée. La même année Buxton adhère à l’Independent Labour Party (ILP) et c’est sous cette étiquette qu’il se présente aux élections générales de décembre 1918. Cependant, comme tous les candidats qui s’étaient montrés hostiles à la guerre, il enregistre une défaite sévère. À partir de 1920, il fait partie du Comité du Labour Party (Labour Party Advisory Committee on International Questions). C’est au titre de secrétaire adjoint de la délégation mixte du parti travailliste et des trade unions que peu après il se rend en Russie. Il séjourne là-bas pendant six mois, vivant au milieu des paysans. Il a relaté cette expérience dans un livre intitulé In a Russian Village (Au cœur d’un village russe).
À Londres, Buxton coopère avec Clifîord Allen, Brailsford et d’autres intellectuels de l’ILP pour élaborer un programme vigoureux visant à convertir l’électorat au socialisme. Ce programme emprunte nombre de ses idées au « socialisme de guilde » (Guild Socialism).
Et pourtant, en partie sous l’influence de Ramsay MacDonald, Buxton abandonne la gauche du mouvement pour rejoindre le centre du Labour. Élu au Parlement en novembre 1922, il perd son siège aux élections suivantes en décembre 1923. Il continue de poursuivre ses grands voyages et en 1929 il est réélu député. L’année suivante il quitte l’ILP, car il est en désaccord avec la volonté du mouvement de rester autonome au sein du Labour Party.
Dans la débâcle travailliste de 1931, Buxton perd encore son siège, mais il continue de s’intéresser à la vie politique et de se rapprocher des travaillistes les plus modérés. Il est de ceux qui espèrent opérer la réintégration de MacDonald au sein du Labour Party. En 1934, il fait partie du Next Five Years Group, organisme inter-parti qui se propose de préparer la reconstruction économique du pays ; et bien que le parti travailliste ait condamné cette tentative, Buxton continue de participer aux travaux du groupe.
Sur le plan international, il cherche à apaiser la tension entre l’Allemagne et la Grande-Bretagne et fait partie d’un groupe anglo-allemand qui tend vers le même but. S’il soutient la Société des Nations dans l’affaire des sanctions contre l’Italie, il se décide à rompre avec le Labour Party quand celui-ci se déclare favorable à l’usage de la force contre le fascisme. En 1939, Buxton était prêt à laisser à l’Allemagne les mains libres à l’Est (de manière à faire contrepoids à la puissance soviétique), en échange de garanties de paix à l’Ouest et dans l’Empire britannique. Il n’est pas plus écouté que pendant la Première guerre mondiale. Mais il est paradoxal de constater qu’il réclame alors vis-à-vis d’Hitler le type même d’accord secret qu’il avait vigoureusement condamné de 1914 à 1918.
Pendant tout l’entre-deux-guerres Buxton a consacré une grande partie de son activité aux affaires coloniales, en particulier à l’Afrique. À cette époque, si l’on excepte le petit groupe d’« intellectuels » auquel appartenaient Buxton et sa femme, rares étaient les politiciens travaillistes qui s’intéressaient à ces problèmes. Buxton, quant à lui, avait des idées très arrêtées — renforcées de surcroît par ses nombreux voyages et ses amitiés africaines — sur les droits des autochtones et sur le développement des peuples colonisés. Et il se fait le pionnier d’idées (telles que la priorité des intérêts des peuples colonisés ou le devoir de la puissance coloniale de préparer à l’autonomie les peuples indigènes) idées qui finiront — mais bien plus tard — par être admises par tous.
Buxton n’a jamais été un opportuniste. C’était au contraire un homme de principes (il était quaker). Malgré un tempérament assez personnel, et de l’avis même de ses critiques, il est resté un idéaliste généreux.
ŒUVRE : Buxton est l’auteur de très nombreux livres et articles. Il a publié notamment : The Secret Agreements (Les accords secrets), Londres, 1918. — In a Russian Village (Dans un village russe), Londres, 1922. — The Race Problem in Africa (Le problème racial en Afrique), Londres, 1931. — The Alternative to War (Prévenir la guerre), Londres, 1936.
BIBLIOGRAPHIE : C.A. Cline, Recruits to Labour, New York, 1963. — M. Gilbert, R. Gott, The Appeasers, Londres, 1963. — M. Swartz, The Union of Democratic Control and British Politics during the First World War, Oxford, 1971.