Par Peter Huber
Né le 10 janvier 1878 à Herrliberg (Zurich), mort le 25 février 1954 à Bâle ; syndicaliste, délégué aux IIIe (1921) et Ve (1924) congrès du Komintern.
Peintre sur verre, syndiqué depuis 1900, et membre du PS depuis 1904, Hermann Kündig accomplit son tour d’Allemagne et travailla à Berlin, où il joua, en 1906, un rôle important dans le mouvement des peintres sur verre. Rentré en Suisse, il s’établit à Zurich. Licencié en 1912 pour sa participation à la grève générale locale, Kündig vécut une période prolongée de chômage. Il partit à Bâle où il trouva un emploi auprès de la coopérative d’alimentation.
Simple militant dans la coopérative d’abord, puis délégué à l’Union des syndicats de Bâle (Arbeiterbund), il fut très actif, pendant les années de guerre, au sein de la fédération du Syndicat du commerce, des transports et de l’alimentation. Jouant un rôle de premier plan dans les deux grèves générales de 1918 et 1919, Kündig futélu secrétaire ouvrier en 1920. À l’aile gauche du PS, et favorable à l’adhésion à la nouvelle Internationale, il suivit, à la fin de l’année 1920, la majorité du PS cantonal qui décida de se constituer section du PCS. En juin 1921, le cartel syndical bâlois l’envoya à Moscou pour participer à la fondation de l’lSR ; il assista également, en tant qu’invité, au IIIe congrès du Komintern (1921).
En raison des multiples défections de cadres syndicaux du PC pendant tout l’entre-deux-guerres, en particulier de 1923 à 1930, Kündig symbolisa pour le travail syndical du PCS, la continuité. Aucun dirigeant syndical du Parti — à l’exception peut-être de M. Bodenmann — n’appartint durant autant d’années au corps dirigeant du PCS, et siégea en même temps, presque sans interruption, au législatif cantonal. Durant toute la période de l’entredeux-guerres, Kündig fit partie du comité central ; en 1931, il accéda au Secrétariat, poste qu’il dut céder, dès décembre, à la direction Humbert-Droz, tandis qu’il put conserver son mandat au bureau politique.
En tant que président du cartel des syndicats bâlois à majorité communiste Kündig put assister jusqu’en 1927 aux réunions de la commission syndicale de l’Union syndicale suisse (USS), et y défendre les propositions du PCS. Durant le rapprochement des syndicats anglais et russes, lors de la création du Comité syndical anglo-russe (1925-1926), Kündig profita de cette dynamique unitaire pour demander aux instances de l’USS un appui sans réserve à cette initiative combattue par la Fédération syndicale internationale. En juillet 1925, lors d’une réunion de la commission syndicale, Kündig proposa l’envoi en URSS d’une délégation de l’USS pour étudier les possibilités d’une réunification des deux internationales syndicales. Ces propositions furent régulièrement balayées par une majorité écrasante des délégués modérés.
Avec Kündig à sa tête, le cartel syndical bâlois fut exclu de l’USS en septembre 1927, pour avoir appuyé un référendum du PCS contre la nouvelleloi sur la fonction publique négociée entre l’État et l’USS. Ainsi, à Bâle, la scission syndicale se fit fin 1927 déjà , et cela malgré les efforts désespérés du PCS, et de Kündig en particulier, pour demeurer au sein de la centrale réformiste. Kündig resta secrétaire des syndicats exclus, qui se transformèrent, au début de la Troisième période, en « Opposition syndicale rouge ».
Après un deuxième voyage à Moscou, en tant que délégué du PCS au Ve congrès du Komintern (1924), et peu après l’exclusion de l’USS, Kündig y retourna pour participer au IVe congrès de l’ISR (1928), où il consulta ses responsables de l’Internationale syndicale révolutionnaire sur la stratégie à suivre. De retour en Suisse, devenu responsable du journal syndical Roter Gewerkschafter jusqu’en 1932, il resta fidèle au Parti pendant toute la période ultragauche. Orateur traditionnel des « syndicats rouges » lors du Premier mai séparé, il ne put freiner l’effritement des effectifs et la progression des syndicats modérés créés par l’USS. En 1935, les appels répétés de Kündig aux syndicats majoritaires en faveur d’une réunification négociée n’eurent aucun écho ; il ne resta que la reddition, c’est-à -dire la dissolution de l’organisation et l’affiliation individuelle aux syndicats.
Réélu au comité central lors du 6e congrès (mai 1936), toujours député au Grand Conseil bâlois, il ne se représenta plus en 1938 et disparut aussi de la scène syndicale. Dans l’immédiat après-guerre, il devint membre du Parti suisse du Travail. Ses dernières années, jusqu’à la mort, furent marquées par la pauvreté.
Par Peter Huber
SOURCES : RGASPI, Dossier personnel, 495 274 203 ; 492 1 370. — ARF, Dossier personnel, E 21 9076. — Vorwärts (Basel) 27 février 1954. — P. Stettler, Die Kommunistische Partei der Schweiz (1921-1931), Berne, Francke Verlag, 1980, p. 509. — B. Degen, Das Basel der andern. Geschichte der Basler Gewerkschaftsbewegung, Basel, Z-Verlag, 1986, p. 124. — P. Huber, Kommunisten und Sozialdemokraten, op. cit., p. 168, 422-430. — B. Studer, Un Parti sous influence. Le Parti communiste suisse, une section du Komintern, 1931 à 1939, Lausanne, L’Âge d’Homme, 1994, p. 671.