ORAGE Alfred Richard

Né le 22 janvier 1873 à Dacre, près de Bradford, Yorkshire (aujourd’hui West Yorkshire) ; mort le 5 novembre 1934 à Londres ; journaliste socialiste.

Le père d’Alfred Orage, un fermier devenu instituteur, étant mort peu de temps après la naissance de son fils, la mère retourne au village familial de Fenstanton, dans l’Huntingdonshire, pour y élever très pauvrement ses quatre enfants. Mais le fils du châtelain, qui a remarqué les dispositions intellectuelles du jeune garçon, intervient pour qu’il puisse poursuivre ses études et l’aide à entrer dans une École normale de l’Oxford-shire. En 1893, Orage est nommé instituteur dans une école primaire de Leeds où il enseigne pendant une dizaine d’années.

C’est en entendant Tom Mann* à Sheffield qu’Orage, conquis par l’éloquence de l’orateur, se convertit au socialisme. Du coup, il contribue à la création d’une section locale de l’Independent Labour Party (ILP) et participe à de nombreux meetings en plein air à Leeds. En 1900, Orage rencontre Holbrook Jackson et fonde avec lui le Leeds Art Club. Mais le tournant décisif de son existence se situe vers 1905-1906. C’est alors en effet qu’il renonce à l’enseignement pour aller tenter sa chance dans les milieux littéraires de la capitale. Ses premiers travaux sont des introductions à l’œuvre de Nietzsche, pour qui il éprouve de l’admiration, et il écrit par ailleurs plusieurs articles dans des publications théosophiques, car son penchant pour la philosophie fait de lui depuis quelques années déjà un adepte convaincu de la théosophie.

Orage sera bientôt rejoint à Londres par son ami Jackson et tous deux fondent l’Arts Group sous les auspices de la Société fabienne. Tandis que Bernard Shaw* et Sydney Olivier* encouragent cette initiative, les Webb* se montrent très réservés et l’Arts Group se séparera de la Société au bout de quelque temps. En 1907, Jackson et Orage — financièrement soutenus par Bernard Shaw et un théosophe rallié aux idées d’Orage — rachètent un hebdomadaire, New Age ; sous l’impulsion dynamique d’Orage, le périodique réunit les plus brillants journalistes du temps et ouvre ses colonnes à de nouveaux auteurs encore inconnus. Comme Jackson démissionne dès 1909, c’est Orage qui dirige seul le journal jusqu’en 1922. Tout en étant l’œuvre de Fabiens convaincus, New Age réussit à maintenir son indépendance et sert de moyen d’expression aux divers courants du socialisme sans se lier à aucun d’eux. Par exemple, New Age soutient Grayson* dans ses démêlés avec le Labour Party et Grayson lui-même collabore au journal pendant une brève période. C’est le moment où le tirage atteint son chiffre le plus élevé, aux alentours de 22 000 exemplaires.

A l’actif de New Age il faut aussi mentionner son action en faveur du socialisme de guilde, qu’il contribue très largement à lancer, en particulier en accueillant régulièrement les articles de Samuel Hobson* qui développe les thèses majeures du socialisme de guilde : contrôle ouvrier, nouvelle organisation du travail, participation des travailleurs à l’entreprise. Orage accueille aussi dans New Age le projet de Crédit social du major C.H. Douglas.

Au lendemain de la guerre, Orage se tourne vers les sciences occultes. Il subit l’influence de l’occultiste Ouspensky qui le dirige vers le mystique russe Gurdjieff dont Orage devient le disciple. Il quitte New Age en 1922 pour aller passer un an à Fontainebleau où se trouve l’institut de Gurdjieff et il se rend ensuite aux État-Unis pour y faire connaître la doctrine du maître. De retour en Grande-Bretagne en 1930, Orage se passionne à nouveau pour la théorie du Crédit social de Douglas, mais devant les résistances qui se manifestent à son projet de reprendre la direction du New Age, il lance son propre journal, le New English Weekly (Le nouvel hebdomadaire anglais), avec l’aide financière d’amis américains adeptes du Crédit social. Effectivement, le nouvel hebdomadaire devient l’organe du mouvement pour le crédit social et Orage se fait le propagandiste des thèses de Douglas à la fois en Grande-Bretagne et dans les colonies.

Il meurt subitement âgé de soixante et un ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article75758, notice ORAGE Alfred Richard, version mise en ligne le 7 janvier 2010, dernière modification le 7 janvier 2010.

ŒUVRE : Friedrich Nietzsche : The Dionysian Spirit of the Age (F. Nietzsche, l’esprit dyo-nisien de son temps), Londres, 1906. — Consciousness : Animal, Human and Superhuman (Connaissance animale, humaine, surhumaine), Londres, 1907. — An Alphabet of Economics (Données d’économie), Londres, 1917. — Political and Economic Writings (A propos de politique et d’économie), Londres, 1936.

BIBLIOGRAPHIE : P. Mairet, A.R. Orage : A Memoir, Londres, 1936. — S.G. Hobson, Pilgrim to the Left, Londres, 1938. — W. Martin, « The New Age » Under Orage, Manchester, 1967. — Idem, Orage as Critic, Londres, 1974. — F. Matthews, « The Ladder of Becoming : A.R. Orage, A.J. Penty and the Origins of Guild Socialism in England », Ideology and the Labour Movement, D.E. Martin et D. Rubinstein eds, Londres, 1979. — L. Welch, Orage with Gurdjieff in America, Londres, 1982. — Dictionary of National Biography, 1931-1940. — Joyce Bellamy, John Saville (éd.), Dictionary of Labour Biography, t. VI.

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