TREVELYAN Charles Philip

Né le 28 octobre 1870 à Londres ; mort le 24 janvier 1958 à Wallington, Northumberland (aujourd’hui Tyne and Wear) ; pacifiste et socialiste.

Le père de Charles Trevelyan, Sir G.O. Trevelyan, était un homme d’État libéral qui occupa plusieurs postes ministériels dans les gouvernements de Gladstone et qui s’était rendu célèbre par ses efforts (qui aboutissent en 1884) pour étendre le droit de vote aux ouvriers et par son projet de loi en faveur des petits fermiers écossais, en 1886.

Charles Trevelyan fait des études secondaires à Harrow, puis entre à Trinity College, Cambridge. Il fait ensuite, pendant une année, fonction de secrétaire de Lord Houghton, lord lieutenant en Irlande. En 1895, il se présente aux élections législatives comme candidat libéral dans une circonscription ouvrière de Londres, Lambeth-nord ; battu, il entreprend alors un long voyage à travers le monde (Canada, Afrique du Sud, Australie, Extrême-Orient). De retour, il entre en 1896 au conseil de l’enseignement primaire de Londres (London School Board) sous l’étiquette de progressiste ; cependant, il s’est lié d’amitié avec les Webb* et plusieurs radicaux, notamment Bertrand Russell*, Herbert Samuel et Ramsay Mac-Donald*.

En 1899, Trevelyan entre au Parlement comme député libéral d’une circonscription du Yorkshire, Elland, qu’il va représenter jusqu’en 1918. Il devient secrétaire parlementaire du ministre de l’Éducation nationale en 1908, mais il démissionne en août 1914 en signe de protestation contre l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne et participe avec MacDonald, Norman Angell* et E.D. Morel* à la création de l’Union of Democratic Control. Cet organisme, hostile à la guerre, réclame une paix négociée et veut tenter de prévenir les conflits à venir par la pratique systématique de la diplomatie au grand jour. Insensible à l’hostilité de l’opinion publique, indifférent aux attaques, même corporelles, Trevelyan maintient inflexiblement ses positions pacifistes et continue de dénoncer la politique guerrière du gouvernement. En 1916, il accuse celui-ci de vouloir prolonger la guerre jusqu’à ce que les Russes s’emparent de Constantinople ; il écrit au président Wilson une lettre ouverte dans laquelle il lui demande de sommer les belligérants de faire connaître leurs buts de guerre. Et lorsque la section libérale de sa circonscription exige sa démission, il refuse, en s’abritant derrière l’autorité de Burke.

Il préside le Conseil national de la paix et il se fait un ardent défenseur des objecteurs de conscience et de leurs droits. Il entre en 1917 au « Club 1917 » qui réunit radicaux et socialistes ; convaincu que l’impôt sur les valeurs foncières constitue le remède à tous les maux de la société, il fait du Club une plate-forme du radicalisme et du socialisme.

Candidat indépendant aux élections de la victoire, il est battu, et en 1919, il s’inscrit au parti travailliste qu’il considère comme l’héritier du radicalisme. Il estime en effet que les libéraux n’ont su, ni s’opposer aux négociations secrètes avant ou après la guerre, ni faire prévaloir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes dans les traités de paix. Aussi, Trevelyan devient-il un des principaux porte-parole du Labour en matière de politique étrangère ; farouche adversaire du Traité de Versailles, en qui il voit le germe d’une nouvelle guerre, il se fait l’avocat de l’amitié avec la Russie, de la réhabilitation de l’Allemagne et de la révision de fond en comble des traités de 1919-1920. Lui qui avait applaudi aux quatorze points du président Wilson, et qui avait vu en ce dernier le porte-parole des peuples, il considère maintenant la SDN comme une coalition des puissances impérialistes unies contre les pays vaincus.

Revenu au Parlement en 1922, comme député de Newcastle, il est nommé ministre de l’Éducation nationale dans le premier gouvernement travailliste (1924). Il s’efforce de mettre en pratique le projet travailliste Secondary Education for All (enseignement secondaire pou tous) qu’avait élaboré Tawney* ; il rétablit la plupart des crédits supprimés par les économies massives de Geddes en 1922-1923, l’objectif étant de garantir l’égalité scolaire entre les enfants, notamment par le développement des bourses.

Après l’échec de ce premier gouvernement travailliste, Trevelyan critique durement Ramsay MacDonald pour sa duplicité et il s’efforce d’empêcher qu’il soit réélu leader du parti. Pour lui, il faut faire en sorte que les gouvernements travaillistes à venir soient tenus de mettre en œuvre une législation socialiste et c’est à cela qu’il s’emploie avec Oswald Mosley* et Fred Jowett* lorsqu’est débattu en 1928 le programme « Le Labour et la nation ».

Pendant la grève générale de 1926, il avait fait fonction d’« émissaire spécial » du TUC auprès du Comité de grève du Northumberland et du comté de Durham réunis. Ces activités ne l’empêchent pas de continuer de s’intéresser à la politique étrangère. Il plaide en faveur de l’autonomie de l’Egypte et de l’Inde et déclare que la Chine est menacée, non par le bol-chevisme, mais par l’impérialisme.

Trevelyan est de nouveau ministre de l’Éducation nationale dans le second gouvernement travailliste (1929-1931). Il échoue dans son projet de prolonger la scolarité obligatoire jusqu’à l’âge de quinze ans, et il démissionne en mars 1931 car il redoute des restrictions budgétaires. Il est très critique à l’égard de la ligne suivie par Snowden*, le chancelier de l’Échiquier, car il estime que la prospérité dépend du pouvoir d’achat des masses. Pour lui, l’application d’une vraie politique socialiste, permettrait de vaincre le chômage mais pour cela il faudrait changer les dirigeants du Labour.

Battu aux élections de 1931, Trevelyan adhère à la Socialist League dès sa fondation en 1932 et il fait partie de l’exécutif. Il continue de réclamer une politique réellement socialiste, notamment lors des congrès du parti travailliste. En 1933, il soutient que la seule arme contre la guerre, c’est la grève générale. En 1935, il condamne vigoureusement l’agression italienne contre l’Abyssinie, puis en 1936-1937, le soutien apporté par les leaders du Labour à la politique de non-intervention en Espagne. Très lié à Cripps* et à Bevan*, il est exclu du parti en même temps qu’eux en mars 1939. Grand admirateur de l’URSS, il célèbre les réalisations soviétiques avec un enthousiasme croissant.

Depuis 1931, Trevelyan avait ouvert sa propriété de Wallington aux rencontres des « rebelles » et il en avait fait en même temps un centre d’éducation pour adultes. En 1941, il fait don à la fois de ce domaine et de celui de Morpeth au National Trust.

Comme son ami Noel-Buxton*, Trevelyan est un de ces radicaux de l’Establishment qui ont passé du libéralisme au socialisme sans abandonner leur milieu. C’est seulement vers la fin de sa vie qu’il s’éloigne de l’activité politique et il meurt, quelque peu oublié, à l’âge de 88 ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article75867, notice TREVELYAN Charles Philip, version mise en ligne le 11 janvier 2010, dernière modification le 11 janvier 2010.

ŒUVRE : The Union of Democratic Control : Its History and its Policy (Histoire et politique de l’Union du contrôle démocratique), Londres, 1919. — From Liberalism to Labour (Du libéralisme au travaillisme), Londres, 1921. — Why Russia Will Win (La Russie vaincra), Londres, 1944.

BIBLIOGRAPHIE : R.W. Lyman, The First Labour Government, 1924, Londres, 1957. — A.J.P. Taylor, The Troublemakers, Londres, 1957. — C.A. Cline, Recruits to Labour, New York, 1963. — R. Skidelsky, Politicians and the Slump, Londres, 1967. — M. Swartz, The Union of Democratic Control and British Politics during the First World War, Oxford, 1971. — A.J.A. Morris, C.P. Trevelyan, 1870-1958 : Portrait of a Radical, Belfast, 1977. — B. Pimlott, Labour and the Left in the 1930s, Cambridge, 1977. — Dictionary of National Biography, 1951-1960.

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