WILSON Harold [WILSON James Harold]

Né le 11 mars 1916 à Huddersfield, West Yorkshire ; Premier ministre travailliste.

Originaire d’une famille de petite bourgeoisie — son père était technicien chimiste dans une entreprise — Harold Wilson obtient, après des études secondaires au lycée, une bourse pour l’université d’Oxford à Jesus College. Brillant étudiant il décroche la mention très bien à son diplôme de PPE (philosophie, science politique, économie). Il devient d’abord l’assistant de recherche de Sir William Beveridge, puis il est élu fellow d’University College. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il entre dans la fonction publique, d’abord comme chargé de mission pour les affaires économiques auprès du Cabinet de guerre, ensuite comme directeur du service économique et statistique du ministère de l’Énergie et des Carburants, de 1943 à 1944.

Pendant ses années d’étudiant, Harold Wilson n’avait manifesté aucun penchant particulier pour la politique mais en 1945 — il a alors vingt-neuf ans — il entre à la Chambre des Communes comme député travailliste d’Ormskirk (à partir de 1950, il représentera la circonscription d’Huyton, autre banlieue de Liverpool). Dans le gouvernement Attlee*, il fait son apprentissage en occupant les fonctions de secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics (1945-mars 1947) puis du ministre du Commerce extérieur (mars-octobre 1947). Octobre 1947 marque pour lui une grande promotion, puisqu’il se voit offrir la présidence du Board of Trade, c’est-à-dire le ministère du Commerce, qu’abandonne Stafford Cripps*.

En avril 1951 Wilson démissionne avec éclat du gouvernement en compagnie d’Aneurin Bevan* et de John Freeman à l’occasion du budget présenté par H. Gaitskell* qui abandonne le principe de la gratuité totale du Service national de Santé. Pendant quelques années Wilson fait partie du groupe rebelle des « bevanistes », en conflit continuel avec la ligne officielle du parti. Cependant, en 1954, lorsque Bevan démissionne du Cabinet fantôme, le Shadow Cabinet, c’est Harold Wilson qui le remplace, décision aussitôt interprétée comme le signe d’une faille entre les deux hommes. Dorénavant, Wilson s’affirme le principal porte-parole du Labour pour les affaires économiques et l’on s’attend à ce qu’il devienne chancelier de l’Échiquier le jour où les travaillistes reviendront au pouvoir.

En 1955 lorsque Attlee quitte la direction du parti c’est Hugh Gaitskell qui lui succède, sans que Wilson prenne une part notable aux controverses qui entourent cette élection, ni d’ailleurs aux débats internes qui agitent le mouvement travailliste au cours des années suivantes. Cependant, au congrès travailliste de Scarborough, en 1960, il pose sa candidature au poste de leader et obtient quatre-vingt et une voix contre cent soixante-six à Gaitskell. Deux ans plus tard, il se présente contre George Brown* à l’élection au poste de leader adjoint du parti mais Brown l’emporte avec cent trente-trois voix contre cent trois à son rival. Entre-temps Wilson est devenu le porte-parole parlementaire du parti pour les affaires étrangères.

Lorsque Gaitskell meurt en janvier 1963, l’élection de son successeur constitue un moment décisif pour le mouvement travailliste. George Brown, le leader adjoint, et Harold Wilson sont tous deux candidats ; Brown est soutenu par l’aile droite du parti tandis que Wilson — bien qu’il ait abandonné ses positions des années 1950 à la gauche du parti — incarne une politique de centre gauche. Contre lui cependant jouent certaines de ses attitudes équivoques lors des controverses des six années écoulées, ce qui lui vaut la méfiance d’un certain nombre de travaillistes. Pourtant, le 14 février 1963, il est élu à la tête du parti au deuxième tour de scrutin. Devenu leader de l’opposition, il constitue un Cabinet fantôme dans lequel avec une grande habileté il s’entoure de quelques représentants de la droite tout en réservant le pouvoir au centre et en donnant quelques satisfactions à la gauche (alors que Gaitskell avait gouverné en s’appuyant exclusivement sur la droite du parti).

Debater de premier ordre et excellent parlementaire, Wilson est le seul de tous les leaders travaillistes à n’avoir jamais eu l’expérience du militant de base (Gaitskell avait au moins passé un an au milieu des mineurs des Midlands alors qu’il enseignait à la Workers’ Educational Association). Parfaitement représentatif de la nouvelle classe moyenne de gestionnaires et de techniciens de l’Angleterre d’après 1945 Wilson prend pour thème de la campagne électorale de 1964 la nécessité d’une « révolution scientifique et technique ». Les élections ayant donné aux travaillistes une légère majorité sur les conservateurs et les libéraux, le Labour Party revient au pouvoir après treize années d’opposition et gouverne avec un relatif succès. Aussi en 1966 Wilson décide de provoquer de nouvelles élections afin de consolider sa position et il obtient une majorité confortable. Pourtant les quatre ans de gouvernement travailliste de 1966 à 1970 se soldent, de l’avis de nombre de ses supporters, par un échec. En politique intérieure, le gouvernement doit faire face à plusieurs crises financières — entraînant, en particulier, la dévaluation de la livre en 1967 — et il s’avère incapable de mener à bien la plupart des réformes sociales et économiques qu’on attendait de lui. En politique étrangère, son attitude vis-à-vis de la Communauté économique européenne est ambiguë et il cautionne l’engagement américain au Vietnam. Il est vrai que les divisions au sein du mouvement travailliste étaient très profondes et Wilson a eu l’habileté de maintenir une certaine cohésion dans le gouvernement et le parti (sans cependant échapper au reproche de politicien manœuvrier et peu fiable).

En juin 1970, malgré les mauvais résultats obtenus par le Labour aux élections partielles et en dépit de sondages défavorables, Wilson appelle les électeurs aux urnes. C’est une défaite pour les travaillistes, et Wilson est tenu pour responsable d’une grave erreur de calcul politique. Une fois dans l’opposition, il publie « Le gouvernement travailliste 1964-1970 : un témoignage » (The Labour Government 1964-1970 : A Personal Record, 1971), ouvrage dans lequel il tente de justifier sa politique. Mais le gouvernement conservateur échoue à son tour devant les difficultés économiques et sociales du pays. A la suite des élections de février 1974 le Labour revient au pouvoir et Wilson forme son troisième cabinet : cette fois un cabinet travailliste minoritaire. Cependant, en octobre de la même année se déroulent de nouvelles élections qui donnent au parti un nombre accru de sièges, à la différence des élections de 1924 et de 1931 qui avaient été défavorables au gouvernement travailliste minoritaire. Cette fois, le Labour dispose d’une légère majorité sur les partis d’opposition. En définitive Wilson, pendant le temps où il a été leader du Labour, a réussi à gagner quatre élections sur cinq (1964, 1966, février 1974, octobre 1974), ne perdant que celles de 1970.

Brusquement en mars 1976, Wilson annonce qu’il démissionne de son poste de Premier ministre et il est fait chevalier. A partir de cette date, il n’a plus d’influence politique au sein du parti.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article75897, notice WILSON Harold [WILSON James Harold], version mise en ligne le 11 janvier 2010, dernière modification le 11 janvier 2010.

ŒUVRE : New Deal for Coal (Nouveaux projets pour les charbonnages), Londres, 1945. — In Place of Dollars (A la place du dollar), Londres, 1952. — The War on World Poverty (Guerre à la pauvreté mondiale), Londres, 1953. — Purpose in Politics (Sur la politique), Londres, 1964. — The Labour Government 1964-1970 : A Personal Record (Le gouvernement travailliste 1964-1970 : un témoignage), Londres, 1971. — The Governance of Britain (Gouverner la Grande-Bretagne), Londres, 1976. — Final Term : the Labour Government 1974-1976 (Le dernier engagement, le gouvernement travailliste, 1974-1976), Londres, 1979. — The Chariot of Israel (Le char d’Israël), Londres, 1981.

BIBLIOGRAPHIE : A.A. Rogow, The Labour Government and British Industry, 1945-1951, Oxford, 1955. — D. Smith, Harold Wilson, Londres, 1964. — L. Smith, Harold Wilson : the Authentic Portrait, Londres, 1964. — P. Foot, The Politics of Harold Wilson, Harmondsworth, 1968. — B. Lapping, Labour Government 1964-1970, Londres, 1970. — G. Brown, In my Way, Londres, 1971, traduction, « Lord George Brown, Mémoires de Choc », Paris, 1973. — R. Miliband, Parliamentary Socialism, 2e éd. Londres, 1973. — D. Howell, British Social Democracy, Londres, 1976. — J. Gormley, Battered Cherub, Londres, 1982.

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