MARTELET Jules

Par Notice reprise et complétée par Michel Cordillot

Né le 27 septembre 1843 à Saint-Brice-Courcelles (Marne), mort le 26 avril 1916 à l’hospice d’Ivry (Seine) ; peintre décorateur ; membre de l’Internationale ; élu membre de la Commune de Paris ; membre du PO, puis du POSR allemaniste.

Un rapport de police du 1er avril 1879 (notice contumace) s’exprime ainsi à son sujet : « Martelet était de sa profession peintre sur verre et avait, en 1863, quitté son pays pour ne plus y reparaître entre l’inscription et le tirage au sort de sa classe. Il serait alors venu s’établir à Paris, où il aurait depuis cette époque exercé la profession de peintre en décors. Sous le gouvernement de la Défense nationale, il aurait, d’après les renseignements de la police, servi comme simple garde au 136e bataillon de la Garde nationale. Plus tard, il figure comme délégué au 103e bataillon.

« Martelet passait pour un des membres actifs de l’Internationale, fréquentant les clubs [...], mais il était fort peu lettré ».

Durant le Siège, Martelet semble avoir été proche des blanquistes et collabora aux côtés de Sapia, de Raoul Rigault et de Georges Bertin à La Résistance, « organe démocratique et social du XIVe arrondissement ». Il prit part aux journées révolutionnaires des 31 octobre 1870 et 22 janvier 1871 et fut « un des promoteurs les plus actifs du 18 mars » ; il s’empara de la mairie du XIVe arr.

Pendant le Siège de Paris, il fit partie du Comité central républicain des vingt arrondissements.
En tant que délégué de ce Comité, il fut un des signataires de l’Affiche rouge du 6 janvier 1871, proclamation au peuple de Paris pour dénoncer « la trahison » du gouvernement du 4 septembre et pour mettre en avant trois mots d’ordre ; Réquisition générale, rationnement gratuit, attaque en masse. Elle se terminait par ces mots : « Place au peuple ! Place à la Commune ! » Voir Ansel. Il collabora à la Résistance, d’abord, « organe démocratique et social du XIVe arr. » et, plus tard, « organe démocratique et socialiste, journal de la Ligue républicaine ».

Martelet, qui habitait, 3, rue Niepce, XIVe arr., fut élu membre de la Commune le 26 mars avec 5 912 voix sur 6 570 votants dans le XIVe arr. Il fit partie, le 29 mars, de la commission des Services publics, non réélu le 21 avril ; il vota pour le comité de Salut public. Avec Ostyn, il avait représenté la Commune aux obsèques de Pierre Leroux, le 14 avril. Fin mars, il appartint à la commission municipale provisoire du XIVe arr. de Paris — voir Henry Lucien.

Durant la Semaine sanglante, Martelet se battit courageusement. Le 28 mai, il était avec le dernier carré rue de la Fontaine-au-Roi (XIe arr.). Il y fut blessé à la jambe, mais parvint néanmoins à s’échapper. Le 16e conseil de guerre le condamna par contumace, le 27 février 1873, à la déportation dans une enceinte fortifiée.

Martelet se réfugia d’abord en Suisse. Arrivé à Genève à pied durant l’été 1871, il y vécut pendant un an en donnant des leçons ; il partit ensuite à La Chaux-de-Fonds, où il travailla brièvement comme professeur au collège municipal, mais aussi comme peintre en bâtiment. Il coopéra à la fondation de la société des proscrits dite « l’Égalité » à Genève. Il signa à ce titre l’adresse de condoléances envoyée aux familles de Ferré, Rossel et Bourgeois après leur exécution. Il aurait également participé, si l’on en croit J.-B. Dumay, au Congrès de l’AIT organisé au Locle par la Fédération jurassienne en mai 1872 en tant que délégué de la Société des proscrits ; mais comme son nom ne figure pas sur la liste officielle des délégués, il se peut qu’il y ait en fait assisté à titre personnel, à l’instar de nombreux autres militants.

Il passa ensuite en Belgique, où il arriva le 29 juin 1873. Il s’installa à Bruxelles, où il prit langue avec l’Internationale et assista à diverses réunions discrètement surveillées par la police. Resté en contact avec la Fédération jurassienne (il demanda en juin 1874 une « carte de membre central », c’est-à-dire de membre individuel non affilié à une section), il assista par ailleurs en septembre 1874 sous le pseudonyme de Van Wedemer au congrès fédéraliste de l’AIT. Il y représenta la section Ferré de Paris, ainsi que la Fédération liégeoise en remplacement de Mayeu. Bien qu’ayant soutenu De Paepe à l’occasion du débat concernant le rapport sur les services publics que ce dernier avait rédigé et qui fit l’objet de critiques de la part des anarchistes, il n’en défendit pas moins des positions proches des thèses bakouninistes : « Tout ce qui travaille doit s’unir, non pour conquérir un pouvoir quelconque, mais bien pour obtenir la négation de tout gouvernement politique, qui pour nous ne veut pas seulement dire oppression, mais fourberie et mensonge (…). »

Il émigra ensuite à Londres (et non aux États-Unis, comme cela a parfois été affirmé de manière erronée, par suite d’une confusion avec son cousin Célestin Martelet (voir ce nom). Son départ semble être intervenu entre le 6 avril 1875, date à laquelle il assistait encore à une réunion à Bruxelles et le 7 février 1876, date à laquelle on signale qu’il ne vient plus aux réunions. Sa présence à Londres est attestée de manière certaine début juillet 1878, par une lettre adressée à Jules Vallès, avec qui il entretenait des rapports suivis. Vivant dans le plus grand dénuement (au point qu’une souscription fut ouverte à son profit dans la proscription en août), il avait en outre été victime d’une agression de la part d’un autre exilé qui le trouvait trop empressé auprès de son épouse, ce qui lui occasionna un arrêt de travail de deux semaines.

Il était de retour en France en 1881. Il revint se fixer à Paris dans le quartier qu’il occupait avant la Commune, le XIVe arr. (150 av. du Maine, 14 rue Chatelain puis 16 impasse Bournisien). Il milita dans ce quartier d’abord à la FTSF puis au POSR. Il se présenta aux élections municipales dans le quartier du Petit-Montrouge en 1881 comme candidat du PO, il obtint 3,45 % et en 1893 dans le quartier de la Salpétrière (Paris, XIIIe arr.) où il obtint, comme candidat du POSR, 1,77 %. En mai 1898, il fut candidat allemaniste aux élections législatives à Paris.

Il collaborait dès 1881 au journal de Blanqui, Ni Dieu ni maître. À cette même date, il était membre du cercle d’Études sociales du XIVe arrondissement (quartier de Plaisance), dont il fut le délégué au congrès du PO à Reims (1881) et au congrès de Saint-Étienne (1882). Il opta alors pour les possibilistes. Martelet participa également au congrès de la FTSF à Paris (1883), à Rennes (1884) et à Châtellerault (1890). À l’occasion de la scission qui intervint lors de ce congrès, Martelet rallia le POSR allemaniste. Il fut délégué à son congrès de Saint Quentin (1892). En 1897, il figurait encore au nombre des candidats à la députation présentés à Paris par les Allemanistes.

En 1897, il vendit une partie de ses livres, brochures et journaux au Musée social de Paris (certains de ses documents comportent des annotations manuscrites).

Entré à l’hospice d’Ivry, il y fit la connaissance, par l’intermédiaire de Maxime Vuillaume, de Lucien Descaves qui en fit son Gerberoy dans Philémon, vieux de la vieille. Dans L’Humanité du 13 avril 1908, il signait un texte en tant que « président de la Fraternelle des anciens combattants de la Commune ». Le 2 février 1914, le même journal signalait que Martelet était désormais « secrétaire honoraire » de l’association.
Il mourut à Ivry en 1916 et fut incinéré au Père Lachaise le dimanche 30 avril 1916.
Il était marié, père de deux enfants.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article75972, notice MARTELET Jules par Notice reprise et complétée par Michel Cordillot, version mise en ligne le 18 janvier 2010, dernière modification le 22 novembre 2022.

Par Notice reprise et complétée par Michel Cordillot

SOURCES : Arch. Nat., BB 24/864, n° 6575. — Arch. PPo., B a/435 (rapport du 28 mai 1876) et listes de contumaces. — P. V. Commune, op. cit., — L. Descaves, Philémon..., op. cit., p. 278 et 301. — Arch. Gén. Roy. Belgique, dossier de Sûreté n° 265439 (en 1880). — J.-B. Dumay, Mémoires d’un militant ouvrier du Creusot. — M. Charnay, Les Allemanistes, Paris, Rivière, 1912. — F. Sartorius, J.-L. De Paepe, Les Communards en exil. État de la proscription communaliste à Bruxelles et dans les faubourgs (1871-1880), Bruxelles, 1971. — G. Delvau, Jules Vallès en exil à Londres, 1871-1880, Paris, Bordas, 1971. — Jacques Freymond (ed), La Première Internationale. Recueil de documents, tome IV, Genève, Droz, 1971. — Hubert Wouters, Documenten Betreffende de Geschiedenis des Arbeidersbeweging ten Tijde van de Ie Internationale (1866-1880), Louvain, Nauwelaerts, 1971, vol. 2. — René Rousseau, Charbonneau et Martelet. Les oubliés de l’histoire de la Commune, Paris, Éditions IGC, 1994. — Lettre de Mme M.-C. Martelet, 20 février 1995. — Michel Offerlé, Les socialistes et Paris, 1881-1900. Des communards aux conseillers municipaux, thèse de doctorat d’État en science politique, Paris 1, 1979. — État civil, Ivry-sur-Seine. — Renseignements communiqués par la famille. — Notes de Julien Chuzeville.

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