SALA Méliton, Pierre, Gilles

Par André Balent

Né le 15 décembre 1899 à Tòrrec (commune de Vilanova de Meià, province de Lérida), mort le 18 mars 1945 en déportation à Fallesrleben( Allemagne) ; chauffeur de la laiterie Domenech de Bourg-Madame (Pyrénées-Orientales) ; militant du PC français à Bourg-Madame ; résistant.

Méliton Sala naquit dans un petit village de la Serra de Montsec, massif pré-pyrénéen. Fils cadet d’un petit paysan de la casa cal Botiguer, Jean Sala et de Rose Ribaudàs, il dut quitter son village pour trouver un emploi. Installé d’abord à Puigcerdà en Cerdagne espagnole, il s’y maria en 1923 avec Dolors Sala (1905-1979) de cal Casanova de Tòrrec. Le couple eut cinq enfants nés en 1924, 1926, 1928, 1931 et 1939. Méliton Sala s’installa ensuite à Ur, en Cerdagne française, à trois km de Puigcerdà. Il s’embaucha au chantier de construction du tronçon de voie ferrée de 7 km entre Bourg-Madame et Latour-de-Carol – Enveitg où il devint spécialiste dans la manipulation des explosifs. Titulaire du permis de conduire, il fut embauché comme chauffeur à la laiterie Domenech qui recueillait le lait produit en Cerdagne et en assurait la distribution à Perpignan et dans la plaine roussillonnaise. Son métier lui permettait de parcourir les régions de montagne de l’ouest des Pyrénées-Orientales, (Cerdagne, Capcir et Haut Conflent) et de nouer de nombreux contacts dans beaucoup, de villages.

Partisan de la république en Espagne, Méliton Sala fut, avant 1939, un militant du de base du Parti communiste auquel il adhérait dès 1936. Pendant la Guerre Civile espagnole, il participa à des activités clandestines d’aide à la République (sans doute après avril 1937 lorsque les anarchistes de la FAI eurent perdu le contrôle de Puigcerdà) : à plusieurs reprises, il conduisit à Puigcerdà des camions d’armes en provenance de la région parisienne avec la complicité de douaniers français. En février 1939, il reçut à son domicile des parents ou des habitants de Tòrrec, qui lors de la Retirada, s’enfuirent lors de l’offensive franquiste en Catalogne.

Il résidait avec sa famille à Bourg-Madame puis au hameau d’Hix (commune de Bourg-Madame). À partir de l’automne 1943, il devint l’un des « passeurs » principaux du réseau Ak-Ak dirigé, en Cerdagne par des militants communistes, le docteur Victor Kapler*, de Saillagouse et Raymond Gaillarde* agriculteur de Llo, son principal contact. Mais il se rendait à l’occasion à Saillagouse où il rencontrait Antoine Cayrol*. Il assurait avec Gaillarde, son principal contact, l’acheminement vers Barcelone de courrier scellé (pour les services secrets britanniques ou les résistants français de l’extérieur) qui provenait le plus souvent de Toulouse, mais aussi de Perpignan, par chemin de fer, dans des bidons de lait vides de Domenech.. Il fit passer la frontière à des soldats des forces alliées et à des fugitifs divers, parfois candidats à l’enrôlement dans les forces de la France Libre. L’itinéraire pédestre qu’il empruntait le plus souvent allait d’Hix, à proximité de la frontière, jusqu’à Queixans, village de Cerdagne espagnole où se trouvait une gare du chemin de fer de Puigcerdà à Barcelone. Méliton Sala se rendit plusieurs fois à Barcelone afin d’apporter du courrier au consulat britannique. En janvier 1944, en revenant de Barcelone, il passa dans son village natal. Certains de ses enfants, comme Rose (née en 1926) et Roger (né en 1931) participèrent à l’occasion à certaines missions. Il fut, d’après Antoine Cayrol en contact avec Josep Mas i Tió*, l’atypique guerrillero actif en Cerdagne française. Mais son fils Roger ignore tout de ces relations.

Méliton Sala fut arrêté par les Allemands le 8 février 1944 après avoir été dénoncé. Il fut d’abord détenu à Bourg-Madame à l’hôtel Buscail où résidaient les Allemands, avant d’être transféré en mars à la citadelle de Perpignan. Le maire collaborationniste de Bourg-Madame affilié à la Milice, Thomas Casals, refusa d’intervenir en sa faveur auprès des Allemands (« Pour un Espagnol, je ne peux rien faire », dit-il en catalan) et suggéra à sa famille de saisir le consul d’Espagne à Perpignan ! En avril, il se trouvait au camp de Compiègne et fut ensuite déporté en Allemagne à Neuengamme et à Fallersleben où il mourut.

Contacté par Antoine Cayrol*, son fils aîné (prénommé aussi Méliton, né le 27 mai 1928) et son épouse, aidés de leurs autres enfants (dont Roger) continuèrent le « travail » pour le réseau Ak-Ak et celui des « travaux ruraux ».

Son acte de décès en déportation fut transcrit le 31 décembre sur le registre de l’état civil de Bourg-Madame.

Après la Libération, Méliton Sala reçut à titre posthume la croix de guerre avec étoile de vermeil et fut cité le 21 mars 1949 à l’ordre de l’Armée, recevant le grade de sous-lieutenant. Il fut aussi décoré de la médaille de la résistance française, à titre posthume, le 22 septembre 1953. Son nom est l’un des trois qui figure sur l’atypique monument aux morts de Bourg-Madame, inauguré seulement en 1995.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76390, notice SALA Méliton, Pierre, Gilles par André Balent, version mise en ligne le 20 février 2010, dernière modification le 12 septembre 2014.

Par André Balent

SOURCES : AC Bourg-Madame, registre de l’état civil, acte de décès retranscrit le 31 décembre 1946. — André Balent, « La mémoire des première et deuxième guerres mondiales à Bourg-Madame (Pyrénées-Orientales). Réflexions autour d’un monument aux morts », Le Midi rouge, 12, Montpellier, 2008, pp. — Ramon Gual & Jean Larrieu, « Vichy, l’occupation nazie et la résistance catalane », II b « De la Résistance à la Libération », Terra Nostra, n°93-94-95-96, Prades, 1998, p. 592, 968, 969. — Ferran Sánchez Agustí, Espías, contrabando, maquis y evasión. La II guerra mundial en los Pirineos, Lérida, Editorial Milenio, 2003 [en particulier, pp. 251-269 : « El agente Melitón Sala »]. — Entretien avec Roger Sala, fils de Méliton Sala, Bourg-Madame, 26 juillet 2004. — Entretien avec Antoine Cayrol, Saillagouse, 12 juillet 2004.

ICONOGRAPHIE : Gual & Larrieu, op. cit., p. 968.

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