HUICQ Janine, Henriette, Léone

Par Madeleine Singer

Née le 1er août 1927 à Paris (Ve arr.), morte le 11 août 2019 à Bourges (Cher) ; professeur certifiée de dessin et arts appliqués ; membre du bureau national du SGEN de 1958 à 1962.

Janine Huicq était l’aînée des six enfants de Marcel Huicq, mécanicien Diesel qui devint électro mécanicien. Celui-ci avait épousé Louise Clément, comptable, et avait eu avant-guerre des activités politiques dont il ne parlait jamais devant ses enfants. Janine Huiq fit ses études à l’École des Arts appliqués, rue Duperré à Paris, obtint en 1947 le diplôme de fin d’études et y prépara l’entrée à l’ENSET. Sortie de l’École en 1950 avec le CAPET de dessin et arts appliqués, elle fut nommée au collège technique de filles de Roubaix, puis mutée en 1956 à l’École du vêtement à Paris. Détachée au Syndicat général de l’Éducation nationale (SGEN) en 1958, elle partit en 1962 en Algérie et enseigna au lycée technique de filles Le Caroubier, à Hussein Dey, dans le grand Alger. Elle revint en France en 1966 et exerça au lycée national technique mixte de Bourges où elle prit sa retraite en 1987.

Par un professeur de français de l’École Duperré, laquelle était une pacifiste convaincue et active, elle avait connu la vie et l’exemple de Gandhi qu’elle admirait beaucoup. Aussi à partir de 1945, durant dix ans, elle participa pendant les vacances aux chantiers du service civil volontaire international (SCVI) à Grenoble, Blois, Fribourg (Allemagne), etc. Elle avait la responsabilité de gérer le budget, de nourrir environ 15 à 20 personnes pendant six semaines, bref d’être un peu la « mère », comme dans la maison des ouvriers qui font le tour de France. Elle fut notamment responsable du chantier de Vézelay organisé avec la participation de Pax Christi. Non-syndiquée pendant son séjour à l’ENSET, elle adhéra au SNET à la sortie pour remercier ce syndicat de l’avoir prévenue de son affectation à Roubaix bien avant le ministre. Mais en lisant le bulletin syndical, elle ne fut pas d’accord avec ses orientations et démissionna. Or à cette époque, elle faisait partie des Equipes techniques dans le cadre de la Paroisse universitaire ; au cours des sessions d’été, elle connut le SGEN par l’intermédiaire d’une collègue et fut séduite par le caractère général du syndicat ainsi que par son affiliation confédérale. Elle y adhéra donc en 1953 et fréquenta l’Union locale CFTC de Roubaix.

Mutée à Paris en 1956, elle alla proposer ses services au SGEN. Sa présence au bureau national- Enseignement technique est attestée dès qu’en octobre 1957, Syndicalisme universitaire put publier des comptes rendus des réunions grâce à l’arrivée d’une permanente pour l’Enseignement technique, Huguette Pelletier*. Aussi lorsque l’année suivante cette dernière dut rejoindre un poste dans l’Éducation nationale pour bénéficier de l’intégration des licenciés d’enseignement dans le cadre des certifiés, c’est Janine Huicq qui lui succéda et qui pendant quatre ans se dépensa sans compter. Elle lança tout-de-suite une enquête sur les sections industrielles féminines car certaines spécialités étaient en déclin et il fallait se préoccuper des sections nouvelles (industrie de la radio, de l’électronique, aide-chimiste, etc). Puis ce furent des enquêtes sur les conditions des rentrées scolaires : locaux, personnel, etc. Les réponses reçues lui permirent en 1961 d’intituler ironiquement « Brillante rentrée » un tableau qui donnait de longues listes d’établissements où des élèves avaient été refusés à l’entrée d’un lycée technique, où il y avait des classes de plus de 35 élèves, alors que l’enseignement se déroulait dans des conditions de fortune (classes dans des dortoirs, dans un grenier, etc) et était dispensé par un nombre impressionnant d’auxiliaires.

En même temps elle rendait compte, dans Syndicalisme universitaire, aussi bien de la journée nationale de promotion supérieure du travail (10 octobre 1960), que de la réorganisation du ministère : le décret du 1 er juin 1960 avait créé une direction générale de l’organisation et des programmes scolaires qui coiffait les trois directions du Premier degré, du Second degré et de l’Enseignement technique, lesquelles devenaient des sous-directions. Par la rubrique Enseignement technique, elle tenait les adhérents au courant de tout ce qui concernait les promotions, les titularisations, les mutations. Elle avait été élue à la commission administrative paritaire des certifiés (CAPN) dès 1954 en qualité de suppléante de Georges Lenormand, professeur de dessin industriel au lycée Dorian à Paris ; elle le fut à nouveau en 1960, comme suppléante de Jean-Marie Legrand, professeur de dessin industriel au collège technique Diderot à Paris. Mais en outre de 1958 à 1962, elle siégea ès- qualités dans toutes les commissions où le SGEN n’avait pas d’élu, en vertu d’une décision du Ministère qui autorisait la présence des secrétaires syndicaux.

Élue au comité national en décembre 1958, elle siégea dès lors également au bureau national. Elle représenta le SGEN à la commission CFTC de formation professionnelle : elle en faisait des comptes rendus, soulignant la nécessité d’augmenter le nombre des participants dans les sous-commissions de cet organisme. Elle fut également secrétaire du technique pour l’académie de Paris jusqu’à ce qu’elle put en 1960 être remplacée par Huguette Pelletier.

La tâche de Janine Huicq devint particulièrement lourde en 1961-1962. En effet François Royoux, certifié lettres-histoire au lycée technique d’Angoulême, avait accepté en septembre 1960 de devenir secrétaire national de l’Enseignement technique, mais à titre provisoire : il voulait rester en province et ne pas venir régulièrement à Paris. Comme on ne découvrait pas le « vrai responsable » qu’il attendait, il cessa ses fonctions à la rentrée de 1961. Janine Huicq dut alors pour le congrès de 1962 présenter au nom du bureau Enseignement technique le rapport d’activité et le rapport d’orientation. Lors de la réunion Enseignement technique, elle rappela aux congressistes que les tâches réclamées par eux dépassaient les possibilités actuelles du bureau et demanda qu’on définît une orientation plus modeste. Elle donna en octobre 1962 un dernier éditorial : « A nouvelle vocation, dispositions nouvelles ». Les élèves entrant en lycée technique non plus en Quatrième, mais en Seconde, le travail exigé des professeurs changeait considérablement ; il était urgent de leur donner le temps nécessaire pour préparer leurs cours et se tenir au courant de l’évolution technique.

Elle quittait peu après la France. En effet pendant la guerre d’Algérie, elle avait assuré des liaisons avec l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) ; elle recevait notamment les coups de téléphone à retransmettre à un membre du bureau national car sa ligne n’était pas surveillée comme celles de Paul Vignaux, Jean Brocard, Claude Bouret ou Claude Pinoteau*. Dès les accords d’Evian, elle avait postulé une nomination en Algérie afin de répondre à la demande de coopérants formulée par l’UGTA. Dans ce pays elle fut membre de l’Association générale de l’enseignement public (AGEP), constituée le 11 novembre 1962 pour regrouper les adhérents SGEN, car un syndicat étranger n’était pas autorisé dans cet État nouvellement indépendant. Dans le cadre de cette association, elle fut responsable de l’Enseignement technique. En même temps elle s’efforça pendant un an d’aider les enseignants algériens à mettre sur pied leur organisation syndicale, vu son expérience d’ancien permanent national. Dans son quartier, elle s’occupa de la préparation au certificat d’études de jeunes garçons, puis de l’alphabétisation des femmes.

À son retour en France, elle fut responsable SGEN de son établissement à Bourges et candidate en 1969 lors des élections à la CAPN des certifiés. Quand elle fut à la retraite, elle s’occupa de la préparation des petits déjeuners dans le cadre du Secours catholique, prit en charge la trésorerie des retraités SGEN du Cher, devint membre de leur conseil départemental et menait encore de front toutes ces activités en 1997.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76426, notice HUICQ Janine, Henriette, Léone par Madeleine Singer, version mise en ligne le 23 février 2010, dernière modification le 6 mars 2021.

Par Madeleine Singer

SOURCES : M. Singer, Le SGEN 1937-1970, Thèse Lille III, 1984, 3 vol. (Arch. Dép. Nord, J 1471) ; Histoire du SGEN, 1987, PUL. — École et Éducation (1954-1955). — Syndicalisme universitaire (1955-1969). — Lettres de Janine Huicq à M. Singer, 16 mars 1978, 2 mars 1995, 22 avril 1997, 17 juin 1997 (archives privées).

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable