HAAS-PICARD Raymond

Par Gilles Morin

Né le 27 septembre 1906 à Paris, mort le 13 août 1971 à Paris ; cadre puis préfet ; militant socialiste et résistant, représentant du PS clandestin à Londres (1943-1944) ; membre de différents cabinets ministériels, collaborateur de Jules Moch*.

Docteur en droit, diplômé de l’École des hautes études commerciales et du Centre de perfectionnement dans l’administration des affaires de la Chambre de commerce de Paris, Raymond Haas-Picard, après son service militaire qu’il accomplit d’octobre 1926 à octobre 1927, fut tout d’abord chef de service à la Banque de Paris et des Pays-Bas, en 1928. Mais il militait par ailleurs à l’Union des techniciens socialistes (UTS) depuis 1934 et, abandonnant cette carrière d’avenir, il répondit à l’appel de Jules Moch pour rejoindre le service de l’État lors du Front populaire. Dans le premier cabinet de Léon Blum (juin 1936), il fut chargé de mission auprès de Jules Moch au secrétariat général de la Présidence du Conseil, comme spécialiste des questions financières. Puis il suivit Jules Moch au ministère des Travaux publics, où il devint chef de cabinet, fut chef adjoint du cabinet d’André Février, ministre du Travail du troisième ministère Chautemps (juin 1937), enfin chef de cabinet de Jules Moch, ministre des Travaux publics (mars 1938). Dans l’intervalle, il avait été nommé chef de service du ministère de l’Intérieur.

Mobilisé d’août 1939 à août 1940, Raymond Haas-Picard entra dans la Résistance. Avec Jules Moch, il quitta la France en 1942 et arriva à Londres en passant par l’Espagne, au terme d’un périple de 120 jours. Il s’engagea en février 1943 comme volontaire dans les Forces françaises libres. Le Populaire clandestin saluait leur arrivée commune avec Jules Moch, affirmant que « le lieutenant Haas » aurait « rendu de nombreux services à notre organisation ». Il joua un rôle dans la pacification entre socialistes à Londres, divisés entre pro-gaullistes et antigaullistes regroupés dans le Groupe Jean-Jaurès, animé par Louis Lévy* et Georges Gombault*. Le secrétaire général du Comité d’action socialiste de la zone sud, Daniel Mayer*, en mission à Londres en mai 1943, l’associa à la co-rédaction du manifeste socialiste, avec Georges Boris, Gombault et Louis Lévy. Haas-Picard rédigea le « chapeau » introductif de ce texte qui unifiait les exilés, puis fut ensuite adopté par le parti clandestin dans les deux zones en France, fournissant un manifeste programme qui facilita l’unification socialiste le 17 juin 1943. Il participa aux activités du groupe Jean-Jaurès à Londres et s’adressa aux Français par la BBC à l’occasion du 1er mai 1944, comme représentant du PS clandestin à Londres. Il occupait cette fonction depuis le départ de Félix Gouin pour l’Afrique du Nord fin 1943. Il invitait les travailleurs à des arrêts de production, des sabotages, des exécutions, afin de manifester « sa haine de l’ennemi et de ceux qui le servent ».

Raymond Haas-Picard, après la Libération, fut nommé préfet de 3e classe en octobre 1944 et servit les ministres socialistes de l’Intérieur qui se succédèrent de 1945 à 1949. Dans le cabinet du socialiste Adrien Tixier*, il fut directeur adjoint au ministère de l’Intérieur, responsable du « bureau politique » du ministère en octobre 1945. Après la démission du général de Gaulle et la mort de Tixier, il demeura au cabinet de son successeur, André Le Troquer*, comme directeur des affaires générales et fut nommé préfet de 1re classe, hors cadre. En 1947, il fut nommé secrétaire général de la Préfecture de police, puis devint directeur du cabinet de Jules Moch dans les cabinets Schuman, Marie et Queuille (1947-1949). Il devait, une nouvelle fois, être l’assistant principal du ministre de l’Intérieur qui fit face aux grands mouvements sociaux de l’automne 1947 et des années de guerre froide qui débutaient.

Lorsque Jules Moch quitta le gouvernement, Raymond Haas-Picard fut nommé préfet de la Côte-d’Or, en 1949-1954, avec le titre d’Igame en 1951. Il fut annoncé comme devant succéder à Jean Baylot à la tête de la Préfecture de police en juillet 1954. L’année suivante, il poursuivit sa carrière en étant nommé préfet des Bouches-du-Rhône, puis fut désigné comme préfet coordonnateur de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur en 1961. Il avait été brièvement rappelé au ministère pour diriger le cabinet de Jules Moch durant la crise de mai 1958. En octobre 1963, il fut nommé préfet de la Seine, succédant à Jean Benedetti. Son nom avait été avancé par la presse en 1958 puis en 1962 pour remplacer Pelletier puis Papon. Il conserva ses fonctions jusqu’en septembre 1966, où il demanda sa mise en congé spécial. Il retrouva alors, après cette carrière administrative, des fonctions dans le privé. Il fut nommé président de l’Union des chambres syndicales de l’industrie du pétrole et, l’année suivante, président des chambres syndicales de raffinage du pétrole, des transports pétroliers et de la distribution des produits pétroliers. Dans ces sociétés, il avait la fonction de représenter les intérêts de l’État, dont les industries de raffinage et de recherches n’étaient pas jusqu’alors dans la chambre syndicale.

Raymond Haas-Picard devait en outre être nommé administrateur de la Banque de Paris et des Pays-Bas en 1968, de la société du Louvre (Hôtels et magasins), de la société Le Nickel, des établissements Henri J. de Tabet en 1969 et des hôtels Lutétia et Terminus en 1970. Il mourut le 13 août 1971 à son domicile parisien.

Il était grand officier de la Légion d’honneur, titulaire de la rosette de la Résistance et de la médaille des évadés.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76799, notice HAAS-PICARD Raymond par Gilles Morin, version mise en ligne le 28 mars 2010, dernière modification le 8 juillet 2010.

Par Gilles Morin

SOURCES : Arch. Nat., F/7/15525, n° 10563 ; F/1a/3235. — Le Populaire clandestin, juillet 1943. — Paris-Presse, 15 juin 1963. — Le Monde, 16 août 1971. — Nouveau dictionnaire national des contemporains, Paris, J. Robin, 1964. — Jules Moch, Une si longue vie, Robert Laffont, 1976.

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