HENNEGUELLE Henri

Par Yves Le Maner, Gilles Morin

Né le 11 juin 1908 à Fruges (Pas-de-Calais), mort le 27 décembre 1983 à Saint-Léonard (Pas-de-Calais) ; instituteur ; militant et élu socialiste du Pas-de-Calais ; maire de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) de 1945 à 1947 et de 1953 à 1977, conseiller général, député (1945-1958) puis sénateur (1967-1974) du Pas-de-Calais.

Henri Henneguelle dans les années 1940.
Henri Henneguelle dans les années 1940.
Assemblée nationale, Notices et portraits, 1946.

Fils d’un cordonnier-cabaretier et d’une commerçante, Henri Henneguelle, après des études au cours complémentaire de Fruges, entra en 1925 à l’École normale d’instituteurs d’Arras et fut nommé instituteur à Boulogne-sur-Mer. Il effectua son service militaire à l’école d’application du génie à Versailles. Il se maria en décembre 1930 à Boulogne-sur-Mer avec Marie Mazurier.

Dès son entrée en fonctions en 1929, Henri Henneguelle adhéra au syndicat des instituteurs puis devint, au début des années 1930, secrétaire adjoint de la sous-section cantonale de Boulogne du Syndicat national. Devenu secrétaire de cette sous-section du Syndicat national des instituteurs de Boulogne et ses environs (deux cents adhérents), en 1935, membre du comité de l’Union locale CGT, poste qu’il conserva après la réunification, il fut élu, par la suite, au conseil syndical de la section départementale du SNI (voir Gabrielle Hielle). Mais il était surtout intéressé par l’action politique.

Henri Henneguelle milita dans les Jeunesses socialistes SFIO en 1928 puis adhéra au Parti socialiste SFIO en 1929. Bon orateur, actif, simple, en 1934, il devint secrétaire de la section socialiste de Boulogne, regroupant soixante adhérents, pour la plupart enseignants ou cheminots ; il accéda à la commission exécutive fédérale du Pas-de-Calais en 1934. Principal animateur socialiste du littoral selon la police, il était également l’un des responsables départementaux du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes en avril 1936. Très populaire, après avoir participé activement à l’élection législative de 1932, puis avoir été candidat SFIO au conseil général en octobre 1934 dans le canton de Boulogne-Sud et aux élections municipales de 1935, il échoua de peu aux élections législatives de 1936, dans la 1re circonscription, et aux élections au conseil d’arrondissement en 1937. Cette année-là, il fonda La Vague du Boulonnais, mensuel qu’il dirigea jusqu’au début de la guerre. Il était l’un des jeunes syndicalistes enseignants qui, derrière Pantigny*, contribuèrent dans ces années au renouvellement de génération et de milieux du socialisme du Pas-de-Calais, jusqu’alors dominé par les mineurs et les ouvriers. Ces enseignants liés aux réseaux laïques devaient en prendre totalement le contrôle dans l’après-guerre, après avoir fait leurs preuves dans la Résistance.

Mobilisé comme officier de réserve, au 3e régiment du Génie en septembre 1939, Henri Henneguelle, lors des combats de mai-juin 1940, participa à la campagne de Belgique, à partir du 10 mai 1940, puis à la retraite de l’armée, combattant sur la Somme, à Beauvais, puis sur la Seine, la Loire et le Cher. Il reçut la Croix de guerre avec trois citations.

Démobilisé en juin 1940, Henri Henneguelle passa bientôt dans la clandestinité et fut l’un des fondateurs et l’un des dirigeants du réseau de résistance « Libération-Nord » et du Comité d’Action socialiste du Pas-de-Calais sous le pseudonyme de Dupont. Arrêté à Paris en 1943, il s’évada et échappa aux recherches qui suivirent sa condamnation à la peine de mort par contumace. Responsable militaire de « Libé-Nord » pour toute la région Nord de la France, lieutenant-colonel des FFI, il siégea au Comité départemental de Libération du Pas-de-Calais dès sa création, au titre de Libération-Nord. Il reçut la médaille de la Résistance le 6 avril 1944. Plus tard, en 1950, il fut habilité pour donner les attestations aux anciens clandestins de Libération-Nord pour le Pas de Calais.

À la Libération, Henri Henneguelle entra en franc-maçonnerie en 1945 à partir des liens forgés dans la clandestinité. Il fonda à Lille le journal Nord-Soir dont il assuma la direction. Il fut désigné comme maire de Boulogne-sur-Mer, conservant ce poste aux élections municipales de mai 1945 à 1947, battu à cette date, il reprit le siège de 1953 à 1977.

Henri Henneguelle siégea au conseil général du Pas-de-Calais comme élu du canton de Boulogne-Sud à partir de 1945. Il ne se représenta pas en 1949 « du fait de ses occupations parlementaires ».

Député de la 1re circonscription du Pas-de-Calais des deux Assemblées nationales constituantes en 1945, Henri Henneguelle fut nommé membre de la commission des moyens de communication et des PTT, de la commission des réparations et de la Marine marchande, et surtout de celle de la reconstruction et des dommages de guerre. Ses interventions en faveur des sinistrés lui attirèrent dès la Libération des sympathies dans ces milieux fort élargis de l’arrondissement. Il fut nommé juré à la Haute Cour de Justice en décembre 1946.

Réélu aux Assemblées nationales de la IVe République, de novembre 1946 à 1958, Henri Henneguelle fut membre de la commission de la marine marchande et des pêches, dont il fut le secrétaire de 1946 à 1951, puis le vice-président de 1956 à 1958. En 1956, il fut nommé dans la commission de la défense nationale.

Henri Henneguelle participa activement à la vie du Parti socialiste SFIO. Membre de la commission exécutive fédérale du Pas-de-Calais en 1947-1956, il passait alors pour le principal adversaire de la majorité « molletiste » dans la fédération, le seul disposant de la légitimité résistante et politique suffisante pour s’opposer au puissant secrétaire général du parti. Principal dirigeant des socialistes du littoral, il ne cessa pas de s’opposer à l’anti-communisme de Guy Mollet et des élus du bassin minier. Il acceptait l’alliance avec le PCF dont il avait côtoyé de nombreux dirigeants dans la Résistance. Le 30 août 1954, à l’Assemblée, il vota la question préalable mettant fin aux débats sur l’éventuelle ratification de la Communauté européenne de Défense. On le retrouva parfois chargé de fonctions dans les réunions nationales du parti. Il fut ainsi membre de la commission chargée d’étudier les problèmes de politique économique et sociale au conseil national des 3-4 mai 1958. Il vota en mai-juin 1958 pour la révision de la Constitution, contre l’investiture au général de Gaulle et contre les pleins pouvoirs accordés à son gouvernement.

Bien que proche des minoritaires socialistes, il refusa de quitter la SFIO. Après avoir rencontré Edouard Depreux fin 1959, il écrivait à Charles Margueritte qui contribua à rassembler une dizaine de parlementaires qui rejoignirent le Parti socialiste autonome : « Convenus que nous restons au parti (je dis nous car nous sommes plusieurs en ce cas). Nous avons en effet des situations locales particulières qui ne nous permettent pas la moindre erreur. Même situation sur le plan fédéral. Nous nous tenons en contact aussi souvent que possible et nous ne négligerons pas de nous rendre visite en maintes occasions » (lettre du 22 septembre 1959).

Henri Henneguelle fut réélu au conseil général en 1961 dans le canton Nord de Boulogne. Il en fut vice-président de 1961 à 1978 (il renonça à solliciter le renouvellement de son mandat en 1979). Il devint sénateur en 1967 en remplacement de Bernard Chochoy, élu député. Il fut membre de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation. Il renonça à solliciter le renouvellement de son mandat en 1974. Guy Lengagne lui succéda à la mairie en 1977 et au conseil général en 1979.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76808, notice HENNEGUELLE Henri par Yves Le Maner, Gilles Morin, version mise en ligne le 29 mars 2010, dernière modification le 23 février 2015.

Par Yves Le Maner, Gilles Morin

Henri Henneguelle dans les années 1940.
Henri Henneguelle dans les années 1940.
Assemblée nationale, Notices et portraits, 1946.
Henri Henneguelle dans les années 1950.
Henri Henneguelle dans les années 1950.
Assemblée nationale, Notices et portraits, 1956.
Henri Henneguelle
Henri Henneguelle
Sénat

SOURCES : Arch. Nat., F/1b1/998 ; F/1cII/122 ; 132/A ; 270 ; 279 ; 671 ; 703 ; F/1cIV/154 ; CAC, 20010216/119/ 3160. — Arch. Dép. Pas-de-Calais, M 182, M 5221 et M 5304. — Archives de l’OURS, dossiers Pas-de-Calais. — Arch. FJJ/6EF73/2. — Arch. de Libération-Nord. — Nord-Matin, 3 octobre 1944. — Rapports des congrès de la SFIO, 1944-1967. — Rapports des congrès de la fédération SFIO du Pas-de-Calais, 1945-1967. — Bulletin intérieur de la SFIO, n° 116. — René Bargeton, Le Comité départemental de Libération du Pas-de-Calais (1943-1946), Arras, Mémoires de la commission départementale d’Histoire et d’Archéologie du Pas-de-Calais, tome XXXIII. — J. Derville, La Fédération socialiste SFIO du Pas-de-Calais, 1944-1969, thèse d’études politiques, Paris, FNSP, 1970. — Marc Wolf, article cité, in Revue du Nord, n° 227-1975. — Le Monde, 29 décembre 1983. — André Combes, La Franc-maçonnerie sous l’Occupation, Paris, éditions du Rocher, 2001, p. 202. — Frédéric Sawicki, Les réseaux du parti socialiste. Sociologie d’un milieu partisan, Paris, Belin, « Socio-histoires », 1997. — Renseignements fournis par la mairie de Boulogne-sur-Mer. — Correspondance avec H. Henneguelle en juin 1979. — Notes de Jacques Girault. — État civil.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable