AUGÉ Jean, Joanny, dit OGÉE

Par Yves Lequin, Justinien Raymond

Né le 9 décembre 1853 à Roanne (Loire), mort le 11 septembre 1925 à Riorges (Loire) ; artisan charron, puis épicier, puis hôtelier à Roanne ; militant socialiste de la Loire ; maire de Roanne, député.

Né d’un père contremaître dans un atelier de tissage, Jean Augé avait lui-même été un temps artisan charron avant de devenir épicier, puis hôtelier à Roanne (Loire). De 1888 à 1892, il y fut conseiller radical dans la municipalité Auboyer et ce n’est que vers la fin de son mandat qu’il adhéra au Parti ouvrier français (POF). Son établissement, le « Petit Saint-Jean », était déjà un lieu accueillant aux révolutionnaires locaux : en juin 1891 s’y était tenu un banquet antipatriotique et, dans le courant de 1892, Augé y avait abrité plusieurs réunions anarchistes.
Peu à peu, Augé devint le principal leader d’un POF solidement implanté déjà et qu’animait par ailleurs Édouard Mayeux ; dès 1893, il fut son candidat aux élections législatives dans la 1re circonscription de Roanne, mais ses 2 524 voix ne purent empêcher la réélection du sortant Audiffred, avec 9 799 suffrages ; il ne fut pas plus heureux aux cantonales de 1895, où il réunit 2 205 voix contre 3 305 à son adversaire ; mais, en 1896, il conduisit victorieusement la liste socialiste à l’assaut de la municipalité et devint maire de Roanne. À peu près au même moment, il triomphait de l’influence de son rival Mayeux et devenait ainsi le dirigeant incontesté du POF, Charles Fouilland étant parti pour Montluçon en 1895.
Augé était alors décrit par le commissaire de police comme un homme petit, rond et souriant dans une barbe brune et soignée ; fort intelligent, c’était un autodidacte qui allait bientôt se révéler un habile administrateur. Conciliant, il n’avait pas perdu le contact avec les milieux radicaux qu’il côtoyait au sein de la franc-maçonnerie et qu’il associa à sa gestion. Doté d’une « honnête » aisance, c’était un modéré et son influence — il était par ailleurs le directeur de l’hebdomadaire L’Avant-Garde — imprima une allure de plus en plus réformiste à l’action du POF local. Dès 1897, un vote en faveur du renforcement de la garnison souleva l’indignation des éléments révolutionnaires groupés autour de Mayeux et d’Auguste Buffin, et fut à l’origine d’une scission de fait éphémère, mais significative.
En 1898, Augé échoua à nouveau à la députation, malgré ses 6 080 voix ; la même année, il participa au congrès national du POF à Montluçon et, en 1899, représenta les deux circonscriptions de Roanne et le groupe POF du Coteau (Loire) au congrès de la salle Japy, à Paris, où il se prononça pour la participation ministérielle. À partir de ce moment, après quelques hésitations, Augé accentua une évolution vers la droite qui allait finalement l’écarter du mouvement socialiste ; réélu maire en 1900, devenu conseiller général en 1901, il vota la même année une adresse de félicitations au tsar ; surtout, il rallia sur ses positions ministérialistes la majorité d’un POF roannais à recrutement de moins en moins ouvrier, contre la ligne générale du guesdisme ; enfin, après un troisième échec aux législatives, en août 1902, il retira ses fonctions à son premier adjoint Pierre Darancy, resté fidèle à la politique du parti et le fit exclure ; le congrès d’Issoudun du Parti socialiste de France (PSdF) prononça la dissolution de l’Agglomération roannaise qui refusa la décision et fit scission sous la direction d’Augé.
Celui-ci entraîna avec lui la majorité des militants, et constitua un groupe d’études sociales « l’Union des travailleurs », affilié à la Fédération socialiste de la Loire, dans le sillage d’Aristide Briand. En février 1905, il fut élu député, dès le premier tour, en remplacement de son vieil adversaire Audiffred, devenu sénateur ; en avril, il participa au congrès d’unification de Paris, mais, sur le plan régional, il prit, avec toute la Fédération autonome, une attitude dilatoire au congrès du 27 juin ; la Fédération du PSdF s’étant constituée malgré tout, en juillet, en Fédération socialiste SFIO, il s’en rapprocha, avec Briand et Edmond Charpentier, aux approches des élections générales de 1906 : le 17 décembre 1905, les deux Fédérations fusionnèrent et Augé s’inscrivit au groupe parlementaire SFIO.
Mais la promotion ministérielle de Briand l’entraîna presque aussitôt hors des chemins de l’unité ; avec lui, il rompit avec la SFIO et c’est sous ses couleurs qu’il sollicita le renouvellement de son mandat législatif en 1906 ; il avait à nouveau remporté les municipales de Roanne en 1904. Mais cette fois-ci, il fut battu par le progressiste Gilbert Laurent, par 12 164 voix contre 10 596. Il abandonna alors la vie politique pour se retirer à Riorges, où il mourut en 1925.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article77116, notice AUGÉ Jean, Joanny, dit OGÉE par Yves Lequin, Justinien Raymond, version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 8 octobre 2022.

Par Yves Lequin, Justinien Raymond

SOURCES et BIBLIOGRAPHIE : Arch. Nat. F7/12885. — Arch. Dép. Loire, 10 M 112 bis. — Arch. Ass. Nat., dossier biographique. — Hubert Rouger, Les Fédérations socialistes, II, op. cit., p. 310 à 318. — Claude Willard, Les Guesdistes, op. cit., pp. 507-508 et 604.

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