Par Gilles Candar
Né le 16 août 1861 à Templeuve (Nord), mort le 22 mars 1918 à Paris ; médecin, militant guesdiste et féministe.
Entré dans le mouvement socialiste en compagnie de son frère puîné Charles, militant de l’Agglomération parisienne du Parti Ouvrier, son action fut surtout journalistique. Il fut délégué aux congrès nationaux du POF à Paris (1897) et à Ivry (1900). À celui de Romilly (1895), son frère avait défendu en son nom deux motions, l’une favorable aux enfants naturels et aux droits des femmes et une autre favorable à un monopole d’État des produits pharmaceutiques distribués ensuite par des pharmacies municipales, qui furent adoptées, la seconde plus facilement que la première.
Encore étudiants, Charles et Pierre avaient assisté à une conférence de Lafargue et Deville au Quartier latin, puis rencontré Lafargue et Guesde au cours d’un concert donné par des étudiants russes, vraisemblablement dans l’hiver 1884-1885. Ils devinrent militants au Parti et collaborèrent au Socialiste (parfois sous pseudonyme : docteur Z pour Pierre). Bracke les a évoqués dans Comment sont-ils devenus socialistes ? de Louis Lévy, paru en 1932 aux éditions du Populaire.
Les frères fréquentèrent aussi artistes et écrivains, notamment Mallarmé et le milieu wagnérien, collaborant à la Revue wagnérienne. Contrairement à son frère Charles, Pierre fit partie de la minorité guesdiste favorable à un engagement fort dans la cause dreyfusarde, mais il resta dans le parti. Son investissement militant fut au reste moindre que celui de son frère et il fut de plus en plus pris par sa carrière scientifique. Il se singularisa par la défense du « sexualisme », entendre l’émancipation de la femme, qu’il prônait en compagnie d’Aline Valette (1850-1899), l’amie proche de Guesde.
Reçu docteur en médecine en 1890, il travailla à l’hôpital Cochin (1890) puis à celui de l’Hôtel-Dieu (1897). Ce fut un neurologue de renom, à l’origine de la découverte (1903) du syndrome du noyau Deiters dit aussi « syndrome de Bonnier », président de la Société d’otologie de Paris (1901) et promoteur de la « centrothérapie ». Il épousa Esfer Cherchevsky qui lui donna trois enfants, dont Claude Bonnier, ingénieur et résistant.
Il publia Socialisme et sexualisme. Le programme du parti socialiste féministe, Paris, Beauvalot, 1893 que préfaça Aline Valette, livre composé en trois parties (biologique, sociologique et politique) suivies du programme du Parti Ouvrier et d’un Cahier de doléances féministes adopté par la Fédération française des sociétés féministes (1893) puis deux volumes, Socialisme et Sexualisme chez Giard et Brière en 1914 ainsi que de nombreux ouvrages scientifiques dont Le vertige, Paris, Masson, 1904.
Son fils, Claude Bonnier, ingénieur aéronautique, directeur d’usine, né le 4 novembre 1897 à Paris, résistant, mourut par suicide le 9 février 1944 à Bordeaux (Gironde). Il fut fait Compagnon de la Libération.
Par Gilles Candar
SOURCES : Compère-Morel, Grand Dictionnaire socialiste, p. 78. — Les souvenirs de Charles Bonnier, un intellectuel socialiste européen à la Belle Époque, éd. par Gilles Candar, préface de Madeleine Rebérioux, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2001. — Collection du Socialiste.