BRESSON Marie-Eugène

Né à Chaumont (Haute-Marne) le 6 juillet 1863 ; avocat à Chaumont ; militant socialiste de tendances libertaires, à ses débuts du moins.

Fils d’un boulanger républicain inquiété sous l’Empire, Marie-Eugène Bresson était l’élément intellectuel du groupe anarchiste de Chaumont. Compromis en 1892 par l’anarchiste Rodach qui, après son arrestation, avait choisi Bresson pour défenseur, il fut laissé en liberté provisoire sous condition de ne pas quitter Chaumont.
En janvier 1894, après l’attentat de Vaillant, il fut à nouveau inquiété, comme tous les anarchistes chaumontais. Accusé d’être l’un des rédacteurs de La Révolte et un collaborateur du Père Peinard, accusé aussi d’être en rapports étroits avec des anarchistes troyens dont il avait pourtant refusé d’assumer la défense devant les assises de l’Aube, il fut, après interrogatoire, transféré à Paris avec Auguste Serre. Comme lui, il ne fut pas jugé dangereux et presque aussitôt relaxé et renvoyé à Chaumont où il fut toutefois inscrit, en décembre, sur l’état récapitulatif des anarchistes astreints à résidence fixe avec Humblot, Nicolas et Serre.
Après deux années calmes, la propagande anarchiste reprit en 1896, et Bresson, « le plus beau parleur, le plus écouté et le plus capable de recruter des adhérents », entra de nouveau en action.
C’est sur ses instances, en particulier, que Sébastien Faure vint en avril 1896 à Chaumont, accompagné de Matha, faire trois conférences sur la doctrine anarchiste. Mais trop « bourgeois » par sa profession aux yeux de ses camarades gantiers Exbrayat, Humblot, Nicolas et Serre, il ne figura pas sur la liste socialiste ouvrière dressée par le comité électoral ouvrier à la veille des élections municipales.
Cependant, considéré comme l’un des meneurs de la Bourse du Travail, il assista à toutes les réunions et conférences, notamment à celle du 28 juin 1896 où Guérard, secrétaire du syndicat général des employés de chemin de fer, et Colly, conseiller municipal de Paris, prônèrent l’action syndicale. Il fut même expulsé de la salle par la police, à cause de la violence de ses propos.
Vers 1900, il était, semble-t-il, à la tête du groupe socialiste qui, avec son « Cercle d’études sociales » faisait de la propagande en vue des élections municipales prochaines.
Le 8 avril, on vit Bresson aux côtés du conseiller d’arr. du canton de Doulevant, Fuzelier, et parmi la douzaine d’assistants à une réunion tenue par le Cercle d’études à la Bourse du Travail pour arrêter l’attitude du Parti ouvrier lors des élections.
L’incorporation du Parti ouvrier dans la liste radicale dite « de défense républicaine » ayant été acceptée, Bresson fut inscrit comme candidat socialiste révolutionnaire avec ses camarades Humblot et Exbrayat. Leurs idées avancées effrayèrent les électeurs au premier tour et, seuls, des socialistes modérés arrivèrent en tête. Cependant Bresson fut élu avec ses deux camarades au second tour. Bresson obtint 1 305 voix sur 1 630 votants, c’est-à-dire 80 % des suffrages et fut le second élu. Ce succès provoqua des commentaires : « Si Bresson, écrivit le Petit Champenois, organe modéré, est le meilleur homme du monde, il n’en est pas moins le représentant autorisé du parti libertaire, du parti de Sébastien Faure et autres apôtres de l’anarchie [...]. L’entrée dans notre assemblée communale du parti libertaire constitue un événement capital ».
Ce succès donna quelque ambition à Bresson qui projeta de se porter candidat aux élections législatives de 1902 dans l’arr. de Wassy contre le maître de forges Rozet.
Dès la fin de 1901 il amorça sa campagne à Roches-sur-Rognon (Haute-Marne) où il sut s’attirer l’amitié des ouvriers métallurgistes, mais il se heurta à l’influence du patron qui arrêta la propagande socialiste en licenciant deux de ses ouvriers qui militaient en faveur de Bresson. D’ailleurs, il ne fut pas le candidat désigné par le Parti ouvrier.
Aux élections municipales de 1904, Bresson ne put s’entendre avec les radicaux-socialistes. Ceux-ci avaient offert cinq sièges aux socialistes s’ils acceptaient leur programme « bourgeois ». Bresson et son parti refusèrent et une liste ouvrière fut présentée en face de celle des radicaux. Bresson, qui y figura en tête, fut alors en butte à une véritable cabale des radicaux qui l’accusèrent de faire avec les 54 socialistes guesdistes chaumontais le jeu de la réaction cléricale. Ils rappelèrent, en particulier, que, comme conseiller municipal, Bresson s’était abstenu sur la question des congrégations en prétendant que cette question ne regardait que le gouvernement.
L’affaire s’envenima au point que Bresson envoya ses témoins au gérant du journal radical-socialiste Le Petit Haut-Marnais. L’échec n’en fut pas moins complet aux élections. Bresson qui arriva en tête n’obtint que 340 voix sur 1 562 votants soit 21 % seulement des suffrages. Il ne se représenta pas au second tour pour le seul siège à pourvoir.
Ainsi finit sa vie politique active. Il se contenta d’écrire des articles de doctrine dans les journaux socialistes ou sympathisants de la région.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article78319, notice BRESSON Marie-Eugène , version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 30 mars 2010.

SOURCES : Arch. Dép. Haute-Marne, 70 M 15, 88 M 3 et 4, 230 M 11. — Le Petit Champenois, 18 et 22 janvier 1894, 16 mai 1900, 22-24-28-29 avril 1904. — Le Républicain de la Haute-Marne, 10 mai 1900.

Version imprimable