DEUM Achille [DÉUM Achille, François]

Par Laurent Besse, Alain Dalançon

Né le 5 juillet 1860 à Meaux (Seine-et-Marne), mort le 15 juillet 1901 à Asnières (Seine/Hauts-de-Seine) ; instituteur puis directeur d’école à Asnières ; président de l’Union des institutrices et instituteurs publics de Paris et de la Seine, organisateur du premier congrès national des associations amicales d’instituteurs en 1899 à Laon et du second à Paris en 1900.

Achille Deum, mort à 41 ans, est présenté dans la mémoire de l’histoire du syndicalisme enseignant comme « une des plus belles figures du mouvement présyndicaliste » (Le syndicalisme dans l’enseignement, tome 1, p. 12). Mais, au moment de son décès, ce sont les représentants du ministère, dont Édouard Petit (inspecteur général, membre du Conseil supérieur de l’Instruction publique), et encore plus Ferdinand Buisson qui lui rendirent les hommages les plus élogieux, ce dernier évoquant une figure des « vrais missionnaires de l’idée républicaine dans l’école ».

Son nom était en réalité orthographié Déum dans tous les actes d’état civil, transcrivant probablement la prononciation de son nom. Issu du petit peuple, il était le fils de Victor, Isidore Déum, scieur de long, et de Rose, Alexandrine Bardy, manouvrière, alors âgés respectivement de 21 et 19 ans.

Titulaire du brevet élémentaire en 1881, il devint instituteur dans des établissements privés laïques, puis fut nommé en 1892 instituteur adjoint à Asnières, où il dirigea l’école de la rue Parmentier, à partir de la fin de la décennie.

Aux élections des représentants du corps enseignant au Conseil départemental de l’enseignement primaire de 1895, il défendit le candidat Haudricourt contre Suptil, présenté comme le candidat représentant « l’ancien esprit autoritaire d’autrefois qui, dans leurs adjoints, ne voyaient que des valets […] puisque nous ne pouvons porter nos suffrages sur le nom d’un adjoint, votons pour celui qui, par son caractère et ses fonctions, se rapproche le plus de nous. »

Achille Deum était en effet très actif pour inciter les instituteurs à se grouper pour défendre leurs intérêts matériels et moraux mais aussi promouvoir une pédagogie active en faveur des valeurs et vertus républicaines.

Il contribuait ainsi à Saint Nicolas, journal illustré pour les garçons et les filles, notamment « Maximes en actions » en 1890, « Régal » en 1891, certaines strophes de sa production étant reprises dans des banquets républicains (Ils diront que l’école où tout le monde est admis/D’où l’on exclut toutes les haines/ Est le temple où l’on a des amis/ Où l’on cultive les vertus républicaines). Il publiait des récitations pour le cours élémentaire comme « Jardin de Bébé » où il concluait sur les vertus du travail et de la patience.

Rédacteur en chef du Bulletin des associations pédagogiques, impliqué en faveur de la mutualité scolaire (mention honorable du ministère en juin 1899), il fut aussi un soutien actif du projet de contre-assurance universitaire d’Émile Bourgeois, pour lequel il intervint devant la Société d’enseignement supérieur qui le présenta comme « un de ceux en qui on pouvait avoir le plus de confiance pour amener un rapprochement fructueux entre les trois ordres d’enseignement ».

En pleine Affaire Dreyfus et alors que le gouvernement était devenu dreyfusard, il obtint la permission du ministre de l’Instruction publique, Georges Leygues, d’organiser à Laon (Aisne) un congrès national des amicales d’instituteurs en août 1899. Le ministre devait venir apporter son salut à cette réunion lors de la seconde journée consacrée à l’inauguration d’un monument en hommage à trois instituteurs de l’Aisne fusillés par les Prussiens en 1870, mais des raisons d’ordre personnel l’en empêchèrent.
Lors de la première journée, Achille Deum dirigea avec « beaucoup d’autorité et d’entrain » les débats qui ne devaient sortir « à aucun moment du domaine de la pédagogie et du programme soumis au ministre ». Les résolutions adoptée touchaient cependant des point fondamentaux :
Sur les amicales
A-De la nécessité des amicales d’instituteurs et d’institutrices et des moyens propres
B-Des rapports entre les amicales, bases d’une entente commune
C-Coopération universitaire pédagogique

Sur les questions pédagogiques
A-Suppression ou refonte profonde du certificat d’études primaire
B-Esprit et programme de l’enseignement de l’histoire
C-De l’organisation pédagogique des écoles à plusieurs classes

Oeuvres post-scolaires
Rôle des amicales dans l’instruction et l’éducation

Vœux divers : carte permanente unique à demi-tarif, réduction de l’engagement décennal, extension de l’électorat et de l’éligibilité au Conseil départemental, avancement des retraites des instituteurs et institutrices, nomination du personnel enseignant et déplacement d’office, vacances de fin d’année, indemnités de direction et de résidence.

Tous ces sujets devaient être au cœur d’un congrès des assises amicales à Paris en 1900, lui aussi autorisé par le ministre, à l’occasion de l’Exposition universelle. Membre puis président de l’Union des institutrices et instituteurs publics de Paris et de la Seine, Achille Deum prit une part importante dans la préparation de cette Exposition, ce qui lui valut d’être distingué officier d’académie en février 1901. Le congrès des amicales de 1900 fut « celui de l’union, de l’amitié de la fraternité », selon Murgier, dans lequel « planait la voix chaude et entraînante » de Deum, « alors plein de force et de vie et que la mort devait faucher l’année suivante ». Ce dernier n’eut en effet pas le loisir de voir se concrétiser l’acte final de la fondation de la grande Amicale au congrès d’août 1901.

Après son décès, il fut couvert d’éloges par ses collègues et par les représentants des autorités de l’Instruction publique. Il fut présenté par Édouard Petit comme « un des artisans les plus convaincus et les plus heureux du rapprochement qui s’est opéré entre les instituteurs qui, avant son intervention, avaient ébauché en province, la formation de Sociétés isolées, éparses, s’ignorant, se méconnaissant même ». Quant à Ferdinand Buisson, il louait en lui le modèle de « l’homme capable de guider et d’élever les enfants d’une démocratie, esprit sûr, cœur haut, regard clair, pensée lumineuse et parole chaude. », un instituteur « choisi par ses pairs mais qui savait se comporter avec l’administration, avec le ministre même », conversant d’égal à égal avec eux, « sans que rien ne manquât ni à la déférence due aux pouvoirs publics ni au tact qui s’impose dans une assemblée, ni aux nuances délicates dont est fait le savoir-vivre ».

Achille Deum avait épousé Angéline, Victorine Quale, sans profession, née en 1864. Le congrès des Amicales de 1903 demanda à Bourgeois et Buisson d’intervenir pour que sa veuve obtienne un bureau de tabac. Mais elle ne toucha qu’une allocation de veuve d’instituteur, seulement en 1926, à compter du 17 avril 1924, correspondant aux 9 ans, 6 mois de services de son mari dans l’Instruction publique (JO, 14 janvier 1926).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article80064, notice DEUM Achille [DÉUM Achille, François] par Laurent Besse, Alain Dalançon , version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 26 septembre 2022.

Par Laurent Besse, Alain Dalançon

SOURCES : Bernard, Bouët, Dommanget, Serret, Le Syndicalisme dans l’enseignement, tome 1, p. 12-14. — Revue de l’enseignement primaire et supérieur, 3 septembre 1899, 20 mai 1907. — JO, 20 juin 1899, 16 février 1901. — Nécrologies : par Edouard Petit dans L’école de demain : autour de l’école, oeuvres vues, p. 59-60 ; par Ferdinand Buisson, Manuel général de l’instruction publique1901, p.535-536 ; dans Revue internationale de l’enseignement, année 1901/42, p. 192. — Jérôme Krop, Les fondateurs de l’école républicaine : la première génération des instituteurs sous la IIIème république, PU Septentrion, 2016, p. 280-282. — Notice DBMOF, sans signature. — Etat civil de Meaux et d’Asnières — Notes d’Alain Dalançon et de Laurent Besse.

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