RIGLET Louis

Par Claude Delasselle

Né le 25 février 1910 à Varzy (Nièvre), mort sous la torture le 4 avril 1944 à Auxerre (Yonne) ; ouvrier menuisier cheminot ; syndicaliste et militant communiste de Villeneuve-Saint-Georges (Seine-et-Oise, Val-de-Marne) ; résistant FTP à Laroche-Migennes (Yonne).

Louis Riglet
Louis Riglet

Fils d’un emballeur d’origine nivernaise et d’une mère originaire de Sainpuits (Yonne), Louis Riglet vécut son enfance à Auxerre où ses parents s’étaient installés après la Première Guerre mondiale. À quatorze ans, il entra en apprentissage dans une entreprise de charronnage d’Auxerre, puis effectua son « Tour de France » et devint compagnon charpentier. Il travailla ensuite à Auxerre dans différentes entreprises. Il se maria le 6 octobre 1928 à Auxerre avec Lucienne Quenardelle, serveuse, dont il eut deux filles, Suzanne, née en 1934 et Gilberte, née en 1936. En novembre 1936, il fut embauché comme ouvrier ébéniste aux ateliers PLM de Villeneuve-Saint-Georges, où il s’installa avec sa famille, et s’engagea dans le militantisme syndical à la CGT et le militantisme politique au PCF.
Mobilisé en septembre 1939 et affecté au 204e RI en Moselle, il fut fait prisonnier en mai 1940 puis libéré en août, avec l’obligation de se faire contrôler régulièrement à la Kommandantur de son domicile. Il reprit alors son travail à Villeneuve-Saint-Georges et commença son activité résistante. Membre du triangle de l’OS des ateliers voitures VVO avec Édouard Rousseau, il participa à des activités de propagande et de sabotage. Se sachant surveillé, il obtint sa mutation pour le dépôt ferroviaire de Laroche-Migennes en avril 1942.
Il y arriva peu après l’arrestation d’un premier noyau de résistants du Front national (dont Pierre Picard et Émile Tabarant, fusillés comme otages les 25 et 30 avril 1942 au champ de tir d’Égriselles) et réorganisa l’activité résistante au dépôt avec Henri Surier, Henri Séguinet (« Oxo », son fidèle second) et Georges Chabanna. Après l’arrestation de ce dernier le 6 janvier 1943, Louis Riglet prit la direction de ce groupe sédentaire FTP très actif : distribution de tracts et surtout sabotages divers (incendie d’une usine de filets de camouflage, incendie de wagons, sabotage d’essieux, vol de pièces de rechange, etc.). Ayant réussi à se procurer des armes et des explosifs par une filière encore mal connue, il multiplia avec ses camarades des sabotages de plus en plus audacieux : sabotage d’une conduite d’eau et de locomotives (17 locomotives sabotées la même nuit du 25 août 1943). Après la rencontre fortuite d’un autre groupe de sabotage affilié au groupe Bayard de Joigny et dirigé par Roger Varrey, les deux groupes s’entraidèrent pour de multiples sabotages : en septembre 1943, sabotage d’une grue de 50 tonnes puis de machines destinées à la réparation des wagons, mais aussi sabotage d’écluses dans la région de Migennes. Louis Riglet agissait également seul lors de ses déplacements : en septembre 1943, il fit sauter trois locomotives en gare de Sens et un « tour à roues » en gare de Villeneuve-Saint-Georges. Le groupe Riglet réalisa aussi, dans l’hiver 1943-1944, plusieurs sabotages de voies ferrées, en particulier celui du 7 mars 1944 près de Cheny, qui fit de nombreux morts parmi les soldats allemands transportés.
Tous ces sabotages entraînèrent un renforcement de la surveillance du dépôt. Lui-même était étroitement surveillé : sa maison d’Auxerre fut perquisitionnée par la police française en février 1943 et il fut interrogé le 7 mars 1943 par le commissaire Grégoire ; sa maison fut à nouveau perquisitionnée par la police allemande en août 1943 : il était soupçonné d’être en relation avec des groupes communistes de la région parisienne et d’avoir hébergé des résistants. Laissé libre, mais averti par le groupe Bayard de risques de dénonciation, il continua ses activités de résistance. Sans doute à la suite de bavardages imprudents de cheminots du dépôt, la Gestapo l’arrêta à Migennes le 31 mars 1944 au petit matin. Transporté à la prison d’Auxerre, il fut torturé pendant quatre jours à la prison et dans une salle de l’hôpital psychiatrique d’Auxerre réquisitionné par les Allemands et mourut sous les tortures, le 4 avril (le 3, selon le registre de la prison d’Auxerre), sans avoir parlé. Deux membres des groupes Riglet et Bayard (Henri Surier et Roger Varrey) furent également arrêtés mais la plupart (dont Séguinet) réussirent à s’échapper. Les Allemands ayant convoqué Jean Moreau, le maire d’Auxerre, pour qu’il fasse enterrer son corps disloqué dans la plus grande discrétion, celui-ci refusa et conduisit le convoi funèbre. Transférée en 1945 au « carré des fusillés » du cimetière des Conches, la dépouille de Louis Riglet fut rendue à sa famille en 1959 et enterrée au cimetière Saint-Amâtre d’Auxerre.
Son nom figure sur le monument des déportés et internés fusillés de l’Yonne à Auxerre, sur une plaque, en gare de Migennes, à la mémoire des agents de la SNCF tués par faits de guerre, ainsi que sur le monument commémoratif de Villeneuve-Saint-Georges. Un monument lui est dédié sur le parvis de la gare d’Auxerre ; une rue porte son nom à Migennes.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article8116, notice RIGLET Louis par Claude Delasselle, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 17 septembre 2018.

Par Claude Delasselle

Louis Riglet
Louis Riglet

SOURCES : Témoignage oral de Gilberte Mangematin, fille de Louis Riglet. – CDrom La Résistance dans l’Yonne, ARORY-AERI, 2004 (fiche « Riglet Louis »). – Robert Bailly, Si la Résistance m’était contée, ANACR Yonne, 1990, p. 236-246 et 302-306. – Jean-Pierre Fontaine, « Louis Riglet, héros de la bataille du rail », L’Yonne républicaine Magazine, 31 juillet 1999. – Notes Marie-Louise Goergen, Annie Pennetier.

ICONOGRAPHIE : Jean-Pierre Fontaine, « Louis Riglet, héros de la bataille du rail », L’Yonne républicaine Magazine, 31 juillet 1999.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable