LEROY Henri, Joseph

Par André Caudron

Né le 21 juin 1847 à Raismes (Nord), mort le 31 janvier 1917 à Fontarabie (Espagne) ; jésuite, journaliste ; catholique social ; fondateur du syndicat mixte du textile de l’Amiénois (1890), fondateur et premier directeur de l’Action populaire (1903-1905).

Arrière-petit-fils de Paul-Joseph Nicodème, député aux Etats généraux de 1789, Henri-Joseph Leroy appartenait à un milieu de petite bourgeoisie. Après le collège Notre-Dame de Valenciennes, il fréquenta le grand séminaire de Cambrai. Il aurait aimé être missionnaire au Japon mais il s’orienta finalement vers la Compagnie de Jésus et fut admis au noviciat de Saint-Acheul (1867). Au début de son ministère, il se retrouva notamment au collège de Boulogne. Il arriva en 1886 à Amiens, chargé de « l’apostolat des hommes ». Sa préférence pour les milieux populaires le fit expérimenter les « retraites fermées » pour des groupes d’ouvriers. Il prit part à la fondation de la Chronique picarde de « La Croix », qui se voulait « dévouée aux humbles » (1889), avant de mettre sur pied le syndicat mixte de l’industrie textile de l’Amiénois, inspiré de l’exemple de Roubaix-Tourcoing et des principes de l’Oeuvre des cercles (1890).

En 1892, un sermon sur l’encyclique Rerum novarum, prononcé à Saint-Quentin, lui attira des plaintes, de même que le fait de n’avoir pas désavoué une grève aux usines Cosserat. Certains le disaient « démocrate, et comme tel socialisant », dit-il dans ses souvenirs. Il dut alors quitter Amiens pour une cascade de résidences successives bien qu’il se fût enfermé dans un silence prudent. En 1901-1902, le vote de la loi sur les associations lui inspira trois volumes qui firent quelque bruit : Couvents et convents (Paris-Lille, Desclée de Brouwer, 1901), Lettres d’un jésuite à M. Waldeck-Rousseau (Paris, Bloud, 1901, parues d’abord en feuilleton dans L’Univers), et Lettres d’un abbé à M. Waldeck-Rousseau (id., 1902). Tout en critiquant l’utilisation de cette loi contre les congrégations, le R.P. Leroy, hanté par la déchristianisation du monde ouvrier, estimait que les catholiques pouvaient en tirer parti pour développer l’apostolat social.

Après la création de l’Action libérale populaire par les catholiques « ralliés », il publia Programme d’action. Que devons-nous faire ? Lettres à M. Jacques Piou sur l’Action populaire chrétienne (Paris, Bloud, 1902). L’auteur développait l’idée que la conversion des individus était impossible sans transformation du milieu. Il venait, comme « ministre » (second du recteur), de gagner le scholasticat d’Enghien où il recruta ses premiers collaborateurs. Le P. Gustave Desbuquois l’aida tout de suite à fonder l’Action populaire qui devait « compléter l’action politique (de l’Action libérale) par l’action économique ». Un texte du P. Leroy, édité par La Croix du Nord à Lille, présenta la nouvelle institution le 26 janvier 1903 : L’Action populaire - Propagande périodique - Tract-programme. Ce fut le n° 1 de la fameuse collection des « Brochures jaunes » dans laquelle sont sortis plus de cinq cents titres. Le 20 avril 1903, la revue des jésuites, les Etudes, publiait aussi un article annonçant la naissance de l’Action populaire. » Notre but est le syndicat ou l’association », écrivait le P. Leroy, mais il fallut s’en tenir à une oeuvre de propagande pour éviter les rivalités.

Celle-ci aurait pu s’installer à Lille mais son fondateur préféra un terrain où les divergences étaient moins vives entre catholiques. L’équipe s’en fut à Reims en 1904. Le P. Leroy, orateur agréable, spirituel et concret, entreprit une tournée de conférences. Il invitait ses auditoires à s’intéresser aux travailleurs dans l’esprit de sa propre devise : « Faire faire ». Selon Maurice Rigaux, « il avait l’esprit constructeur et lançait, mais n’était guère apte à organiser ». Comme il en était conscient, il céda la direction de l’Action populaire dès 1905 à son jeune confrère Desbuquois qui allait lui donner une place prépondérante au sein du catholicisme social.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article82568, notice LEROY Henri, Joseph par André Caudron, version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 4 août 2013.

Par André Caudron

ŒUVRE : Histoire du Château-Blanc, Paris, Bonne Presse, 1899 ; Le Calvaire, Paris, Lecoffre, 1904 ; Le Clergé et les oeuvres sociales, Reims, Action populaire, n° 67, 1905 ; Pages sociales, id., 1906 ; Sermons et causeries, id., 1914, etc.

SOURCES : Paul Droulers, Politique sociale et christianisme, I, Paris, Edit. ouvrières, 1969 — Maurice Rigaux, L’Action populaire de Reims, 1903-1914 — Catholicisme, VII, 1975 (G. Robinot Marcy) — Paul Duclos, Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, I. Les Jésuites, Paris, Beauchesne, 1985 (H. Beylard).

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