LOZACH Ernest, Marie

Par Justinien Raymond

Né à Saint-Martin-des-Champs (Finistère) le 11 mai 1864 ; ouvrier bonnetier à Sainte-Savine (Aube) et militant socialiste.

Lozach appartenait au milieu des ouvriers bonnetiers qui s’éveilla de façon assez précoce aux idées socialistes. Il en fut un militant actif, violent parfois, et se rangea sous la bannière du POF aux côtés de Pédron. Il fut l’animateur du troisième groupe guesdiste de Sainte-Savine.

Propagandiste, il étendit son action à tout le département de l’Aube comme organisateur ou orateur de réunions publiques, de rassemblements, de conférences d’éducation socialiste. Le 13 avril 1895, il présida à Sainte-Savine une conférence du député Chauvin, de Pédron, de Crépin, ouvrier parisien, membre du conseil national du POF. Il assista Pédron, présidant à Troyes une conférence de Lafargue, Guesde et Carnaud, le 8 septembre 1895, conférence tenue à l’occasion du congrès du POF à Romilly, où il fut délégué. Il organisa une conférence socialiste à Barberey, le 13 mars 1898. Il était souvent un des orateurs des réunions de propagande. Le 1er novembre 1897, à Sainte-Savine, il attaqua le gouvernement « qui n’a rien fait pour les travailleurs ». « Les ouvriers, déclara-t-il, doivent s’emparer des pouvoirs centraux » (Arch. Dép. W. 630).

Le 16 janvier 1898, il exposa les théories collectivistes à Villacerf, au cours d’une conférence destinée à atteindre les milieux paysans. Le 7 mai 1898, à la halle de la bonneterie à Troyes, il réclama la diminution de la durée du travail, l’augmentation des salaires, la création d’une caisse pour les invalides du travail. Il défendit le collectivisme aux Riceys le 18 juin 1899 dans une conférence qu’il répéta ensuite, en compagnie de Grados qui parlait de l’Affaire Dreyfus, à Saint-André, Sainte-Maure, Saint-Julien, Isles-Aumont. Le 24 juin 1899, il parla à Vendeuvre-sur-Barse et Amance. Le 18 mars 1900, sous la présidence de Clévy, il commémora le souvenir de la Commune à la halle de la bonneterie de Troyes. Il y affirma que « la Commune seule a sauvé la République contre les menées bourgeoises de M. Thiers et d’autres » et que « la Commune est née de la trahison des généraux en présence de l’ennemi lors de la guerre de 1870 » (Arch. Dép. W. 750).

Lozach étendit son activité auprès des ouvriers en grève. Il encouragea à la résistance les ouvriers bonnetiers qui avaient cessé le travail en février 1900. Le 1er mars, à Troyes, puis à Romilly, il les engagea à ne pas reprendre le travail tant que ne serait pas satisfaite leur demande d’augmentation de 15 % des salaires. Le 25 mars, il présida à Troyes une réunion de Pastre, député du Gard, en faveur des bonnetiers en grève. Il fit voter un ordre du jour de « blâme au maire de Romilly qui avait confié la répartition de 2 000 f au bureau de bienfaisance au lieu de l’attribuer aux grévistes » (Arch. Dép. W. 750). Le 4 avril à une réunion des ouvriers grévistes de Troyes, il s’éleva contre le comité de grève enclin à accepter la reprise du travail sans avoir obtenu une satisfaction totale. « Il faut, au contraire, proclama-t-il, prendre des mesures pour étendre la grève à toutes les corporations » (Arch. Dép. W. 749). Le 9 décembre 1911, il parla à la Bourse du Travail de Troyes, à l’occasion de la grève des ouvriers des établissements Manchauffée. « Les juges sont des bourgeois au service des bourgeois, clama-t-il. Ils sont indulgents pour les leurs, appliquent rigoureusement les lois pour les ouvriers » (Arch. Dép. W. 748).

Lozach lui-même subit deux condamnations pour son action syndicaliste. Le 12 novembre 1889, le tribunal correctionnel lui infligea 200 f d’amende pour infraction à la loi sur les syndicats professionnels, pour sa participation à la vie illégale de l’Union des syndicats des ouvriers et ouvrières de toutes les industries. Cette union avait été dissoute : elle enfreignait la loi de 1884 ne tolérant que des syndicats d’une même profession. Pour l’avoir reformée, des années plus tard, Lozach fut condamné le 22 avril 1897 par les assises de l’Aube à huit jours de prison. Le 11 juin, à une réunion tenue à la Maison du Peuple, les socialistes adoptèrent le principe d’une souscription dans les ateliers pour subvenir aux frais du procès Lozach. À sa sortie de prison, le 18 mai, 2 000 manifestants l’accompagnèrent de la maison d’arrêt au café de la Mairie de Sainte-Savine, salle Faillery, lieu de réunion des socialistes, où il présida à un meeting, puis il gagna la mairie où les élus socialistes lui offrirent un banquet d’honneur.

Depuis 1896, Lozach, après un échec en 1892, était conseiller municipal et adjoint au maire de Sainte-Savine ; il démissionna en août 1898. Le 6 mai 1900, il fut battu avec 264 voix et encore battu en 1904. En 1895, il avait été élu conseiller prud’homme. En 1898, désigné par le POF comme candidat à la députation dans la 1re circonscription de Troyes, il mena une active campagne. Sur 15 795 inscrits et 12 752 votants, il recueillit 1 661 voix sous l’étiquette socialiste collectiviste. Il se désista pour le candidat radical-socialiste Charonnat qui battit le candidat de droite, le comte de Launay. Lozach fut encore candidat aux élections législatives de 1902 dans l’arr. de Morlaix (Finistère), ainsi qu’aux élections cantonales de Sainte-Savine en 1898.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article82773, notice LOZACH Ernest, Marie par Justinien Raymond, version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 3 juillet 2013.

Par Justinien Raymond

ŒUVRE : Lozach a collaboré à l’organe socialiste de l’Aube, La Défense des Travailleurs.

SOURCES : Arch. Dép. Aube, série W 628-630-748-749-750-751-1322-1566. — Hubert-Rouger, Les Fédérations socialistes I, op. cit. pp. 128 à 137, passim). — Cl. Willard, Les Guesdistes, op. cit., pp. 632-633.

ICONOGRAPHIE : Hubert-Rouger, op. cit., p. 129.

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