RUFFINO Louis, Pierre, Marius

Par Jean-Pierre Bonnet

Né le 7 février 1908 à Toulon (Var), mort le 26 avril 1991 à Lectane (Gers) ; cheminot, révoqué en 1950 ; syndicaliste CGT et communiste.

Fils d’un journalier d’origine italienne, Louis Ruffino, entré au chemin de fer le 25 mai 1930, passa ses vingt années de carrière professionnelle à Cannes-La Bocca (Alpes-Maritimes) en qualité de cantonnier-poseur. Avant la guerre, il militait déjà activement à la CGT réunifiée et au Parti communiste. En novembre 1938, il participa aux manifestations de protestation contre les accords de Munich. Il fut arrêté et incarcéré pendant deux mois à la prison de Grasse.
Interné au camp de Saint-Paul-d’Eyjeaux (Haute-Vienne) du 8 février 1941 au 3 mai 1943, Louis Ruffino y connut de graves problèmes de santé, dont les séquelles lui valurent plus tard une pension d’invalidité à 30 %. Revenu dans les Alpes-Maritimes, il fut nommé responsable des Milices patriotiques sur le secteur de Cannes. Élu conseiller municipal communiste sur la liste d’Union de la Résistance, il fut de 1945 à 1947 adjoint au maire de Cannes, en charge du quartier ouvrier de La Bocca.
À partir de 1947, Louis Ruffino était secrétaire du syndicat des cheminots de La Bocca et dans la localité il incarnait le militantisme efficace et désintéressé. Les témoignages de l’époque soulignent en premier lieu sa modestie : modestie du cheminot aux compétences professionnelles reconnues, poussé par ses supérieurs hiérarchiques à envisager une progression de carrière qui le laissa indifférent ; modestie du militant de conviction, qui restera toujours au plus près du terrain et qui n’envisagea pas d’autre responsabilité que celle de secrétaire de son syndicat.
Le 5 mai 1950, dans le cadre de la campagne nationale contre le transport de matériel de guerre destiné à l’Indochine, La Bocca connut une journée d’action exceptionnelle, marquée par des débrayages, le blocage d’un train, un grand rassemblement et des échauffourées avec les CRS. La journée se solda par l’arrestation et l’incarcération aux Baumettes (à Marseille) des « Dix de La Bocca », dont trois cheminots : Ruffino, Imbert et Giausserand. La CGT lança immédiatement une campagne nationale en faveur de leur libération. Le 15 octobre 1950, Louis Ruffino fut condamné par le tribunal militaire de Marseille à quinze mois d’emprisonnement ferme pour atteinte à la défense nationale et ne sera libéré que le 3 août 1951. Il avait bénéficié durant son procès de nombreuses interventions de personnes bien éloignées de ses options politiques, comme celle de son supérieur hiérarchique direct, l’ingénieur Camille Boni. Dans une lettre envoyée dix jours après sa condamnation pour remercier ses camarades de leur solidarité, Louis Ruffino écrivit : « La lutte pour la paix mérite bien quelques sacrifices. [...] Notre moral est excellent, nos facultés de lutte intactes et notre hâte va à notre sortie pour continuer la bagarre avec tous. [...] Il est probable que nous serons rejetés de la corporation, mais ce n’est qu’une question secondaire. [...] » Il ne se trompait pas puisque sa révocation, proposée dès juin 1950, fut confirmée le 26 juillet 1951.
Trente ans plus tard, lors de l’amnistie de 1981, on retrouve Louis Ruffino retraité à La Roquette-sur-Siagne, conseiller municipal de la localité et président du club du 3e âge qu’il avait créé.
Marié en mai 1930 à Cannes avec Clorinde Foriori, il eut une fille née en 1933.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article8407, notice RUFFINO Louis, Pierre, Marius par Jean-Pierre Bonnet, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 26 avril 2012.

Par Jean-Pierre Bonnet

SOURCES : Arch. Fédération CGT des cheminots. — La Tribune des cheminots. — Robert Mencherini, Jean Domenichino, David Lamoureux, Cheminots en Provence. Des voix de la mémoire aux voies de l’avenir (1830-2001), Paris, La Vie du Rail, 2001, p. 143-144. — Note de Robert Mencherini. — État civil.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable