SCHMITT Albert [Bas-Rhin]

Par Léon Strauss

Né le 31 mai 1900 à Bischheim (Basse-Alsace, Alsace-Lorraine annexée), mort le 23 mars 1978 à Strasbourg (Bas-Rhin) ; chef de groupe puis permanent ; militant démocrate chrétien ; secrétaire administratif de l’Union des syndicats indépendants d’Alsace et de Lorraine CFTC (1926-1929), secrétaire général (1929-1940, 1945-1952), puis président de cette Union (1952-1965) ; vice-président de la Fédération des cheminots CFTC (1946-1950) ; député MRP du Bas-Rhin (1945-1958) ; conseiller général du Bas-Rhin (1951-1971), président du conseil général en 1967.

Albert Schmitt
Albert Schmitt

Fils de Michel Schmitt, ouvrier qualifié aux ateliers des chemins de fer à Bischheim, et de Véronique Friess, Albert Schmitt naquit à Bischheim, ville « cheminote » de la banlieue Nord de Strasbourg. Catholique pratiquant, il commença ses études secondaires au séminaire apostolique de Waerghem (Belgique), mais il dut les interrompre en août 1914. Après son service militaire dans l’armée française (1920-1922), il entra comme chef de groupe aux chemins de fer d’Alsace et de Lorraine et adhéra en 1923 au Syndicat indépendant (chrétien) des cheminots, qui rejoignit la CFTC le 1er juin 1924. Il commença sa carrière de permanent syndical en 1926 en qualité de secrétaire administratif de l’Union des syndicats indépendants de cheminots d’Alsace et de Lorraine (USCAL) à Strasbourg. En septembre 1929, il succéda à Edmond Riehl au secrétariat général de l’Union et, à ce titre, fit partie du conseil fédéral des cheminots CFTC. Il prit la direction de l’organe mensuel régional rédigé en allemand, La Revue des Cheminots, dont il fut désormais l’éditorialiste. De 1928 ou 1929 à 1940, il appartint à la commission départementale et au comité directeur de l’Union populaire républicaine d’Alsace (UPR), le parti catholique qui dominait la vie politique régionale. Il s’était présenté sans succès aux élections cantonales en 1928. Mobilisé en 1939, prisonnier en 1940, il fut libéré par les Allemands comme la plupart des Alsaciens. Il ne put reprendre ses activités, puisque les organisations syndicales avaient été dissoutes par les nazis. Expulsé en décembre 1940 vers la zone non occupée, il séjourna d’abord à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), puis entra au Secours national dont il dirigea les services à Toulon (Var).

Albert Schmitt fut responsable des cheminots d’Alsace-Lorraine en zone libre à Toulon en 1942 puis, à la Libération, il dirigea les services de l’Entraide française du Var, et, après son retour à Strasbourg, ceux du Bas-Rhin. Membre du comité exécutif provisoire du Parti républicain populaire du Bas-Rhin en février 1945, puis secrétaire départemental du Mouvement républicain populaire (MRP) après le ralliement des démocrates chrétiens alsaciens à ce parti d’ampleur nationale (juin 1945), Schmitt, qui avait déclaré que « L’Alsace chrétienne n’est pas pensable sans le Parti populaire chrétien » et qui regrettait encore en 1956 que les Alsaciens n’aient pas réussi, comme les Allemands de la CDU, à constituer un parti chrétien unique groupant catholiques et protestants, pour le maintien des valeurs chrétiennes et pour mener le combat contre l’ennemi commun, le communisme, fut élu en octobre 1945 sur la liste de ce parti à la première Assemblée constituante, réélu en juin 1946 à la seconde, puis à l’Assemblée nationale en novembre 1946, juin 1951 et janvier 1956. Au Palais Bourbon, il défendit constamment les spécificités régionales : dès juillet 1947, il fit adopter une proposition de loi portant amnistie spéciale pour les épurés des trois départements condamnés au plus à dix ans de dégradation nationale. En novembre 1958, il se présenta à Wissembourg (où il résidait et où sa liste avait déjà été défaite aux municipales de 1953) et fut battu au second tour par un gaulliste. De 1951 à 1970, il représenta le canton de Seltz au conseil général du Bas-Rhin qu’il présida en 1967.

Dès son retour à Strasbourg, Albert Schmitt avait repris ses fonctions de secrétaire général de l’USCAL et d’éditorialiste de La Revue des Cheminots. Il fut élu au bureau fédéral des cheminots CFTC lors du congrès de 1946 et nommé vice-président de la Fédération ; il fut réélu aux mêmes responsabilités lors du congrès de 1948. Le 3 mai 1952, il succéda à Michel Kuhm à la présidence de l’Union. L’Union régionale CFTC des Cheminots, affaiblie après la Libération, face à l’Union régionale CGT, dépassa 8 000 adhérents (contre 10 000 pour la CGT) sur un effectif total de 23 000 cheminots dans les trois départements en 1948. En 1952, l’USCAL annonçait 10 265 cotisants. Farouchement anticommuniste, Albert Schmitt s’opposa constamment à toute unité d’action avec la CGT. Il lutta pour le respect du statut particulier des cheminots, actifs et retraités, de l’ancien réseau régional. En décembre 1952, il publia un article « Allez-vous en ! » exigeant le départ immédiat d’un nouveau chef du 8e arrondissement Exploitation, Tillit, qui avait injurié les Alsaciens en s’écriant : « Pour rester dans ce pays, il faut d’abord se faire naturaliser Boche ». En mars 1962, il fit connaître son désaccord avec les positions nationales de sa Confédération sur le problème algérien en se prononçant pour « l’apolitisme inconditionnel du syndicalisme ». Il mena campagne contre l’évolution de la CFTC : dès mai 1964, le secteur de la Moselle cessa de verser ses cotisations à l’Union présidée par Schmitt. Le 25 novembre 1964, le comité directeur de l’USCAL déclara sa volonté de rester fidèle aux principes chrétiens de l’homme et de la société. Un congrès extraordinaire de l’Union AL réuni après exclusion des syndicats mosellans, le 11 février 1965, décida par 183 mandats contre 143 de refuser « l’évolution » et de maintenir la CFTC et la Fédération CFTC des cheminots. La tenue de ce congrès fut contestée en justice par la CFDT et le 8 février 1967, le tribunal de grande instance de Strasbourg le jugea irrégulier, ce que confirma la cour d’appel de Colmar en mars 1979. Schmitt fut d’ailleurs président de l’Union départementale du Bas-Rhin de la CFTC maintenue. Le 6 novembre 1965, atteint par la limite d’âge, il quitta la présidence de l’Union des syndicats chrétiens des cheminots des régions de Strasbourg et Metz et fut remplacé par Félix Roesch. Au congrès de l’Union à Saverne en septembre 1961, Robert Buron, alors ministre des Transports du gouvernement Debré, était venu décorer Albert Schmitt de la croix de chevalier de la Légion d’honneur.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article8561, notice SCHMITT Albert [Bas-Rhin] par Léon Strauss, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 24 avril 2023.

Par Léon Strauss

Albert Schmitt
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SOURCES : Arch. Dép. Bas-Rhin, 544 D 5, 7, 11, 149. — Arch. CFDT. — Revue des cheminots, 1919-1929. — Festschrift herausgegeben vom Unabhängigen Eisenbahnerverband von Elsass-Lothringen, Strasbourg, 1929. — Historique des Cheminots de France 1915-1930. — DBMOF, t. 41, 1992, p.177-178. — Le Nouvel Alsacien, Strasbourg, 1er août 1956, 13 juillet 1961, 11 juillet 1967, 30 mai 1970, 24 mars 1978. — P. Schaeffer, L’Alsace et l’Allemagne de 1945 à 1949, Metz, 1976. — 60e anniversaire de l’Union des syndicats chrétiens des cheminots des régions de Strasbourg et de Metz, brochure multigraphiée, Strasbourg, 1979. — C. Baechler, Le Parti catholique alsacien 1890-1939, Paris, 1982. — A. Irjud, notice Schmitt Albert, Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, fascicule n° 33, Strasbourg, 1999, p. 3 480. — Notes de Michel Gorand.

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