TISSERON Jean-Baptiste, Jules [Dictionnaire des anarchistes]

Par Henri Manceau complété par Dominique Petit

Né le 31 janvier 1863 aux Mazures (Ardennes) ; ouvrier brossier ; anarchiste de Charleville (Ardennes)

Le 16 septembre 1882, il avait été condamné par la cour d’assises de la Seine à deux ans de prison pour avoir détourné une lettre chargée (lettre recommandée avec mention de la valeur déclarée). À sa sortie de prison, il travailla chez un boulanger mais ne put y rester pour raison de problèmes de santé, il se fit embaucher comme brossier. Il devint socialiste après avoir assisté à une conférence.
Le 12 janvier 1889, il était admis au Cercle d’études socialiste L’Étincelle de Charleville. Le 2 février 1889, il réclamait la laïcisation de l’Hôtel-Dieu. La laïcisation de l’hospice et de l’orphelinat étaient adoptés par l’Étincelle, le 16 février. Le 23 février 1889, il était élu contrôleur de la caisse du journal socialiste l’Émancipation. Tisseron était adjoint au comité électoral socialiste.
Le 28 septembre 1889, Tisseron proposa au 2e tour des élections de voter pour Wignacourt le candidat de droite, afin d’en finir avec , le député radical. Cette proposition était refusée. Le 2 novembre 1889, il proposait la création d’une pharmacie municipale. Il réclamait que les conseillers municipaux socialistes viennent aux réunions de groupe, pour savoir à quoi s’en tenir sur cette proposition, jugeant qu’ils assistaient trop rarement aux réunions du Cercle. Des membres lui répondirent que c’était au comité de vigilance d’assurer cette liaison. Mais pour Tisseron ce comité ne fonctionnait pas, il se fâcha et donna sa démission de l’Étincelle. Mais il réintégra le Cercle peut après.
Jean-Baptiste Tisseron était marié et avait deux enfants. Il avait prénommé son fils, né le 12 mars 1890, Jean-Baptiste, Clément. J.-B. Clément fut témoin et signa en mai une photographie : « Au citoyen et ami Tisseron, le père du petit Jean-Baptiste Clément qui sera, je l’espère, un soldat de la Sociale ou qui changera de nom. »
Le 31 mai 1890, Tisseron était l’un des membres organisateurs des réunions publiques de l’Étincelle. Le 12 juillet 1890, il proposait qu’en cas de refus de la municipalité de fournir gratuitement les fournitures scolaires, les conseillers municipaux socialistes démissionneraient mais sa proposition ne fut pas adoptée. Le 18 octobre 1890, Tisseron considérait que J. B. Clément avait eu tort de refuser la candidature qu’on lui proposait à Paris, pour remplacer Joffrin. Le 30 novembre 1890, il était nommé membre de la commission du Cercle. Le 21 janvier 1891, Tisseron donnait sa démission de secrétaire de L’Étincelle.
Le 20 juin 1891, après la mise à l’index du Père Peinard et la démission de Thomassin, Tisseron continua à assister aux réunions du Cercle.
Le 27 juin 1891, Tisseron était nommé délégué à la Fédération socialiste des Ardennes, pour y défendre le rapport de l’Étincelle.
Il fut exclu le 3 octobre 1891 du Cercle L’Étincelle, sans que le motif soit connu. J.B. Tisseron adhéra alors au groupe anarchiste des Sans-Patrie et fut chargé des relations avec les autres groupes anarchistes, en particulier ceux de Charenton et de Reims, ainsi qu’avec les déserteurs et réfractaires français à Londres et Bruxelles.
Le 22 février 1892 il avait été l’un des orateurs d’une conférence organisée à Charleville par les employés de chemin de fer où il avait dénoncé l’exécution de 4 compagnons anarchistes à Xérès (Espagne), il avait démontré que le suffrage universel était une tromperie et s’était solidarisé avec les compagnons belges Moray et Van Praët qui venaient d’être expulsés de France. À la suite de cette réunion il fut inculpé avec treize membres des Sans-Patrie d’outrage à commissaire de police et association de malfaiteurs. La procédure fut conclue, le 11 avril, par un non-lieu.
Tisseron, était abonné au Père Peinard et demeurait 15 rue du Daga à Charleville
Le 14 avril 1892, Tisseron était inculpé dans la procédure engagée à la suite de la désertion du soldat Loriette. Une lettre du groupe les Sans-Patrie qu’il avait écrite fut trouvée chez Leroux à Reims, l’un des organisateurs de la fuite du soldat. Cette lettre ambiguë, fut interprétée par la justice comme étant une preuve de son implication : « Compagnons, pour l’affaire en question, vous pouvez y aller carrément, la chose étant imprévue, vous ne recevrez rien par la présente, mais nous vous engageons à faire face à la dépense pour la semaine prochaine pour le remboursement. Vous comprendrez à demi-mot ce que nous voulons dire. Avancez donc l’argent qui vous sera remboursé par nous. Courage et diligence, c’est par la Sociale. Vive l’anarchie. Les Sans-Patrie de Charleville. »
Mais Tisseron donna une autre explication, Les Sans-Patrie avaient l’intention d’organiser une tournée de conférences de Fortuné Henry mais le groupe n’avait pas d’argent (il restait 27 sous en caisse). Fortuné Henry avait écrit à Tisseron de se presser de lui envoyer l’argent pour ses frais. Tisseron avait alors écrit à Leroux à ce sujet. Mais cette version ne convainquit pas les juges, il fut condamné par défaut à trois ans de prison. Il s’enfuyait alors en Belgique, à Liège (avril 1892) puis à la Capelle (Aisne). Tisseron était inculpé dans l’instruction pour association de malfaiteurs.
Le 29 avril 1892, Tisseron était arrêté à La Capelle où il travaillait sous un faux nom.
Le 25 mai 1892, le tribunal correctionnel le condamna à 6 mois de prison, pour avoir favorisé la désertion de Loriette.
Le jugement rendu contre lui fut finalement cassé par la cour d’appel de Paris le 7 juillet 1908 et il fut réhabilité.
Le 21 novembre 1893, une perquisition avait été effectuée à son domicile, Tisseron déclarait qu’il s’y attendait, la presse l’ayant averti.
Tisseron figurait sur l’état récapitulatif des anarchistes de décembre 1893, il était noté « sans profession ».
En décembre 1893, le commissaire avait saisi un paquet qui lui avait été envoyé de Londres et qui contenait un très grand nombre du manifeste Les Dynamitards aux panamitards.
Le 1er janvier 1894, comme trois autres compagnons, Louvigny, Gosset et la femme Moray, il fut l’objet d’une perquisition au cours de laquelle fut arrêté le compagnon Paul, Arthur Henriet, vannier à Paris, hébergé depuis quelques jours par Tisseron et trouvé porteur de quelques journaux anarchistes et de la brochure Riches et pauvres. Tisseron et Henriet furent incarcérés, ce dernier déclara qu’il était anarchiste et ne reconnaissait à personne le droit de l’empêcher d’exposer ses idées.
Le 19 février 1894, une perquisition à son domicile ne fit découvrir que des coupures de journaux.
Le 27 février 1894, le substitut du procureur de Charleville M. Bourgueil reçut un billet anonyme : « Un ami dévoué vous prévient que des bombes sont arrivées à Charleville et que la première sera pour vous. Veillez surtout mercredi soir à 11 heures » Le 28 février, il recevait un deuxième billet : « N’oubliez pas que c’est demain soir à 11 heures que Tisseron doit vous exécuter. » Une perquisition fut effectuée chez Tisseron, des brochures et des journaux anarchistes furent saisis.
Le 1er mars le substitut recevait un troisième billet : « La perquisition de ce matin a fait croire à T....(Tisseron probablement) qu’il était vendu, çà sera pour un autre jour, mais je vous préviendrai à temps. Veillez quand même. Avez-vous regardé dans la maison de Troclet. »
Le 10 mars 1894, il fut l’objet d’une nouvelle perquisition au cours de laquelle la police avait saisi diverses adresses et des coupures de journaux.
Le 17 novembre 1894, le procureur général de Nancy, signalait que Tisseron était devenu clérical très militant, qu’il allait régulièrement à la messe et voyageait avec Dombray-Schmitt, candidat royaliste aux dernières élections législatives. Tisseron faisait des conférences sur le socialisme chrétien.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article86025, notice TISSERON Jean-Baptiste, Jules [Dictionnaire des anarchistes] par Henri Manceau complété par Dominique Petit, version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 20 mars 2021.

Par Henri Manceau complété par Dominique Petit

SOURCES :
Archives Départementales de la Marne 30M75 — Le Père Peinard, 28 février 1892 — Archives. Nationales F7 12504, 12506, 12507,12508, 12509 BB 18/6448, 6449, 6453 — Notice Jean-Baptiste Tisseron du Dictionnaire des militants anarchistes — Archives départementales des Ardennes 4U 715, 774 — Médiathèque Voyelles de Charleville-Mézières, Archives du Cercle l’Étincelle 1888-1896 — Le Pays 14 septembre 1882.

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