VALLIN Henri, Jérémie, [surnommé "l’empereur"]

Par Jean-Jacques Doré

Né le 29 juillet 1868 à Étretat (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) ; mort au Havre (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) le 30 octobre 1953 ; meunier, menuisier puis terrassier ; secrétaire du syndicat général CGT du Bâtiment du Havre de 1908 à 1912 ; secrétaire de l’Union locale de 1912 à 1914.

Fils d’un marin et d’une tisserande, Henri Vallin, cheveux chatains - yeux gris - 1 m. 74 (grand pour l’époque) accomplit son service militaire de décembre 1890 à décembre 1892 au 3ème régiment du Génie à Arras (Pas-de-Calais). Secrétaire du syndicat CGT des Terrassiers du Havre de 1900 à 1908, il assista à ce titre au XIVe congrès national corporatif — 8e congrès de la CGT qui se tint à Bourges (Cher) du 12 au 20 septembre 1904.

En décembre 1908, il fut à l’origine de la fondation du syndicat général du Bâtiment du Havre qui fit fusionner six organisations, les Maçons, les Couvreurs, les Terrassiers, les Peintres, les Serruriers et les Tailleurs de pierre. Le bureau élu à cette occasion était composé de Lucien Vallin (secrétaire permanent), Paul Moret (secrétaire adjoint), Augustin Picard (trésorier) et Auguste Pelca (trésorier adjoint). Au gré des ans vinrent s’agréger au syndicat général les Charpentiers, les Menuisiers, les Paveurs-Bitumiers, les Briquetiers, les Carriers de Tancarville et ceux de Sandouville, soit douze sections en 1913.

Membre de la Commission administrative de l’Union locale dirigée par Adrien Briollet, il fut associé à la création de l’Imprimerie coopérative le 1er avril 1910. Le Conseil d’administration était composé de Raoul Goument (directeur-gérant), Henri Vallin (président), Adrien Briollet (secrétaire), Henry Turlure (trésorier) et Gustave Chauvin (membre). Condamné à dix jours de prison le 6 juillet 1909 par le tribunal correctionnel du Havre pour violence envers un magistrat de l’ordre administratif, il fut inscrit au carnet B de la Seine-Inférieure en 1911, le rapport de police qui l’accompagnait le qualifiait de "syndicaliste révolutionnaire, antimilitariste convaincu et partisan de l’action directe".

Le 14 janvier 1912, Vallin succéda à Cornille Geeroms comme secrétaire permanent de l’Union locale du Havre, il était assisté d’Yves Lefolle (secrétaire adjoint), Charles Le Jamble (trésorier) et Eugène Dehais (trésorier adjoint).

Cette même année, le XVIIIe congrès national corporatif — 12e de la CGT, se tenait au Havre du 16 au 21 septembre ; ce fut lui qui, assisté de Louis François et Alphonse Le Bosquain, présida la séance d’ouverture le lundi 12 septembre.

Réélu secrétaire général après les congrès des 19 janvier 1913 et 19 février 1914, Henri Vallin était alors l’acteur incontournable de la vie syndicale au Havre. Gérant de l’organe de l’UL Vérités, qu’il porta à bout de bras avec Le Chapelain, il s’attacha à développer les institutions de l’UL (l’imprimerie, le dispensaire...) qui fidélisaient une grande partie de la classe ouvrière au sein de la CGT.

Le dimanche 19 mars 1913, il présidait, assisté de Fernand Perrier et Louis Quimbel, le congrès constitutif de l’Union départementale de Seine-Inférieure tenu au Havre salle Franklin. Devant les soixante délégués représentants 3 Unions locales et 68 syndicats et sections, il se livra à une analyse prospective de "la vitalité de la nouvelle Union" : "On peut compter sur 100 000 timbres pour le Havre, 20 000 pour Rouen et 5 000 pour le reste du département ; au total, un minimum de 125 000 cotisants par an soit un total de recettes se montant à 6 250 francs (0,50 frs. par cotisant). Comme dépenses, il faut compter : le traitement du secrétaire, 2 400 frs. ; les frais de bureau et de voyages, 1 200 frs. ; l’achat de timbres confédéraux 875 frs. ; il restera donc 1 800 frs. pour les autres frais divers, affiches et propagande. Au Havre nous faisons le sacrifice de 200 frs. par mois pour le journal Vérités. Vous savez que la presse est l’instrument le plus actif de la propagande ; on peut décider aujourd’hui que le journal sera l’oeuvre commune du département". A l’issue du congrès, le bureau comprenait Pierre Grandin (secrétaire), Albert Hodebourg (secrétaire adjoint), Émile Choix (trésorier), Fernand Capelier (trésorier adjoint) et Fernand Perrier (archiviste). Tous étaient des militants de l’agglomération rouennaise ; aussi la commission administrative était composée de deux représentants de l’UL d’Elbeuf Louis Quimbel et Eugène Hadon et trois du Havre Léon Vallin, Auguste Hervieu et Rougier

Les chiffes avancés par Vallin corroborent parfaitement les autres sources, 10 000 syndiqués réguliers pour l’Union locale du Havre, 2 000 pour celle de Rouen, 300 pour celle d’Elbeuf et 200 pour les organisations isolées. A n’en point douter Vallin avait d’excellentes aptitudes de gestionnaire et une vision moderne de la propagande syndicale. L’espace entre Rouen et Le Havre et le temps de la guerre eurent raison de ses ambitions ; Vérités resta le mensuel du Havre.

En août 1914, il se vit confier la gérance de l’UL après avoir été réformé pour varices à la jambe droite et rejoignit "l’Union sacrée" ; Alfred Rosmer dans une lettre à Pierre Monatte écrivait qu’il s’était transformé en "patriote acharné". En 1919, il fut radié de la CGT pour mauvaise gestion.

En 1901, il habitait 58 rue Victor Hugo au Havre et en 1914, 8 rue de Trigauville.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article86211, notice VALLIN Henri, Jérémie, [surnommé "l'empereur"] par Jean-Jacques Doré, version mise en ligne le 5 janvier 2021, dernière modification le 6 janvier 2021.

Par Jean-Jacques Doré

SOURCES : Arch. Nat. F7/13 619. — Arch. Dép. Calvados, série Z, Pont-l’Evêque 116. — La Voix du Peuple, 25 février-3 mars 1912. — Syndicalisme révolutionnaire et Communisme, Les archives de Pierre Monatte, Paris, Maspero, 1968. — Arch. Dép. Seine-Maritime, rapports sur les dockers du Havre (non classés), 10 MP 411, 2 Z 157, 1 MP 3245, 4 MP 2156, État civil, Registre matricule militaire. — Vérités passim et surtout la publication de novembre 1913. — Notes de Gilles Pichavant.

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