GRATADOUX Lucie

Par Jacques Girault, Daniel Grason

Née le 25 juin 1919 à Paris (Xe arr.), morte le 5 septembre 1993 à Coutances (Manche) ; institutrice ; militante communiste ; agent de liaison de Jacques Duclos dans la clandestinité ; résistante ; emprisonnée à La Roquette.

Lucie Gratadoux dite Rolande
Lucie Gratadoux dite Rolande
Préfecture de Police, BS1 : affaire Brossard, tous droits réservés.

Fille de David François Frédéric, vingt-et-un an, cultivateur et de Berthe née Leclair, sans profession, Lucie Gratadoux naquit chez une sage-femme du Xe arrondissement de Paris. Le couple Gratadoux vivait au 12 rue Lagille près de l’avenue de Saint-Ouen dans le XVIIIe arrondissement.
Son père, cultivateur, devenu cheminot puis licencié pour faits de grève, devint chauffeur de taxi. Lucie Gratadoux, dirigeante des Jeunes filles de France à Villejuif. (Seine, Val-de-Marne), participa activement à l’aide à la République espagnole.
Institutrice à Villejuif, elle était connue pour ses opinions communistes. En 1939, elle était secrétaire du Club Olympique de Villejuif (Seine, Val-de-Marne). Elle servit d’agent de liaison pour Jacques Duclos, sous le pseudonyme de « Rolande », au début de la guerre.
Elle demanda un congé d’un an pour « convenances personnelles » et l’obtint. Elle quitta le 30 octobre 1942 son domicile du 125 boulevard Masséna dans le XIIIe arrondissement pour le 1 rue Racine à Montrouge (Seine, Hauts-de-Seine).
Le 27 février 1943 à 7heures 45 un Inspecteur spécial de la BS1 fila Julia Romain. Celle-ci rencontra Pierre Brossard, tous deux se rendirent à pied à la mairie de Saint-Mandé (Seine, Val-de-Marne). Brossard lui donna un sac, celle-ci prenait l’autobus 125 jusqu’à la Porte d’Orléans, puis le 94 jusqu’à Chatillon où elle descendit à la Compagnie des Eaux.
Empruntant la route de Versailles elle retrouva à 10heures à l’angle de la rue Hoche Lucie Gratadoux. Toutes deux se dirigèrent vers le centre de Chatillon, empruntèrent une rue déserte, posèrent sacs à terre, échangèrent des paquets. Elles repartaient, donnaient selon l’inspecteur de police qui les observait « de fréquents signes de méfiance. » L’inspecteur Paul B… décida de les interpeller et leur demanda de le suivre au poste de police.
Fouillée par une femme policière les deux militantes portaient sur elles des documents qui concernaient l’activité du parti communiste clandestin. Lucie Gratadoux n’était pas notée aux Sommiers judiciaires et était inconnue aux archives de la Police judiciaire. Par contre son nom figurait aux Archives centrales des Renseignements généraux, elle était recherchée depuis le 4 décembre 1942 pour infraction au Décret-loi du 26 septembre 1939, et mise en cause dans l’affaire Louis Tillet.
Le domicile de Lucie Gratadoux au 1 rue Racine à Montrouge fut perquisitionné, les policiers saisirent une note de frais et des documents se rapportant à l’activité du parti communiste clandestin.
Emmenée dans les locaux des Brigades spéciales à la préfecture de police, fouillée par une femme policière, furent saisis une fausse carte d’identité au nom de Perret, des documents concernant l’activité communiste et une somme de mille sept cents vingt francs. Un document retint l’attention des policiers, il s’agissait d’un texte intitulé « Rapport 7 au 14 février 1943 – De toute urgence ». Ce texte émanait sans doute possible d’un inspecteur des Renseignements généraux de la BS2 (Brigade antiterroriste).
Furent également saisis onze photographies format 13 x 18 concernant des lieux où avaient été commis des attentats. Quatre copies de rapports demandés par un Juge d’instruction qui concernaient Lucien Magnan, René Bernier, Fosco Focardi et Marius Bourbon. Enfin, deux feuillets dactylographiés concernaient des FTP de Conflans Sainte-Honorine Trappes (Seine-et-Oise, Yvelines). Les trois inspecteurs furent très rapidement identifiés et mis en état d’arrestation, les renseignements avaient été fournis contre rétribution.
Elle fut condamnée par le Tribunal d’État, le 29 mars 1944, avec quatre autres militants à huit ans de travaux forcés. À la proclamation du jugement, les inculpés entonnèrent La Marseillaise. Emprisonnée à la Petite Roquette à Paris, elle fut libérée en août 1944.
Lucie Gratadoux épousa le 11 octobre 1952 Gustave Jean Marie Guéhenneux en mairie du XVe arrondissement de Paris. Celui-ci sous le pseudonyme de « Victor », pendant la guerre, servit de garde du corps à Duclos. Inculpé lors de l’affaire du « trésor » découvert dans le jardin de « L’Oasis », villa de Villebon-sur-Yvette appartenant au Parti communiste français qui avait servi de résidence clandestine à Duclos pendant la guerre, condamné à quinze jours de prison, libéré à l’automne 1947, il devint chauffeur à l’ambassade de Hongrie.
Le couple se retira dans la Manche par la suite. Lucie Gratadoux fut homologuée Internée résistante.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article87372, notice GRATADOUX Lucie par Jacques Girault, Daniel Grason, version mise en ligne le 8 avril 2010, dernière modification le 28 août 2022.

Par Jacques Girault, Daniel Grason

Lucie Gratadoux dite Rolande
Lucie Gratadoux dite Rolande
Préfecture de Police, BS1 : affaire Brossard, tous droits réservés.
Lucie Gratadoux
Lucie Gratadoux
Préfecture de Police, BS1 : affaire Brossard, tous droits réservés.

SOURCES : Arch. PPo, Tribunal d’État, Activités communistes (carton 3), PCF carton 14 rapport des Renseignements généraux du 8 mars 1943, 77 W 3101. –Bureau Résistance GR 16 P 268742. – Emmanuel De Chambost, La direction du PCF dans la clandestinité (1941-1944). « Les cyclistes du Hurepoix », Paris, L’Harmattan, Mémoires du XXe siècle, 1997. – Jean-Marc Berlière, Franck Liaigre, Liquider les traîtres. La face cachée du PCF 1941-1943, Paris, Robert Laffont, 2007, ouvrage qui comprend une photographie lors de son arrestation, p. 291. – Notes de Jean-Pierre Besse. – Renseignements recueillis par Emmanuel de Chambost. – État civil numérisé Paris Xe arrondissement 10N 448 acte n° 1846.

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