GOUDET François, Marie, Jean

Par Jean-Pierre Debourdeau

Né le 22 novembre 1930 à Dijon (Côte-d’Or), mort le 18 février 1999 à Velars-sur-Ouche (Côte-d’Or) : professeur de mathématiques ; syndicaliste étudiant puis enseignant du SNES en Côte-d’Or et dans l’Aube, militant de l’École émancipée, militant trotskyste lambertiste du PCI (majo) puis de l’OCI, militant du PSA puis du PSU.

Le père de François Goudet était ingénieur. Dès l’âge de six ans, François Goudet fut interne à Hyères (Var). Son père était alors directeur d’une usine de torpilles à La Londe. En 1944, à Pont-de-Pany où il était en colonie de vacances, un Allemand fut tué et il fut retenu pendant deux heures comme otage. Il alla d’un établissement scolaire à l’autre, passa un temps chez les Jésuites à Dole (Jura), puis obtint son bac « math élém » chez les militaires à La Flèche (Sarthe).

Il avait onze ans lorsque son père décéda. Il fut adopté par la Nation par décision du tribunal civil de Dijon en octobre 1949. Sa mère, qui avait son bac, dut faire vivre sa famille de quatre enfants : un temps institutrice, elle devint, par concours, assistante sociale. François Goudet poursuivit ses études à Nancy (Meurthe-et-Moselle) tout en travaillant, « pion » la plupart du temps, instituteur remplaçant, petits boulots. Il passa le concours pour enseigner les « maths » en collège d’enseignement technique, ce qu’il fit en région lyonnaise, puis le concours des IPES, ce qui lui permit de terminer ses études à Dijon. Il réussit sa licence de mathématiques et sa licence de sciences physiques. Il hésita sur le choix de son enseignement et opta finalement pour les premières.

Il adhéra au Parti communiste vers l’âge de vingt ans et participa à un voyage dans les pays de l’Est. 1956 : c’était la révolution hongroise. Dans sa cellule étudiante, on discutait ferme, il y avait Pierre Roy, l’historien Jean-Jacques Becker et d’autres amis. Il n’était pas convaincu de la justesse de la position du parti et n’était pas le seul. La direction du PC fit venir un membre du comité central pour défendre la ligne. Les étudiants posèrent des questions, citèrent Lénine sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Le lendemain, les jeunes militants se retrouvèrent : il leur semblait difficile de rester au PCF. Mais où aller en cette fin d’année 1956 ? Pierre Roy, « pion » à Beaune (Côte-d’Or), avait rencontré l’historien militant Pierre Broué, adjoint d’enseignement à Beaune, et Daniel Renard, militant qui avait participé en 1947 aux grandes grèves chez Renault. Il adhéra au PCI dirigé par Pierre Lambert. Très vite, François Goudet contacta Pierre Broué qui le fit adhérer. Il fut un militant très actif organisateur des Groupe d’études révolutionnaires (GER). Les militants étaient peu nombreux et n’étaient connus que par leur pseudonyme ; l’organisation était petite, fut longtemps quasi clandestine et fonctionnait avec un cloisonnement important.

Parallèlement, François Goudet eut des responsabilités à la corpo de sciences. Avec des étudiants de lettres – comme Jacques Lapalus (futur responsable de Rénovation Syndicale), Pierre Palau (futur 1er secrétaire fédéral du PS) – ou de sciences économiques – comme François Chesnais ou C.-A. Michalet –, la « mino » dijonnaise prit la direction de l’UNEF.

À vingt-sept ans, François Goudet partit faire le service militaire, pour vingt-sept longs mois. D’abord à Avignon où, surpris avec la revue La Vérité, il fut considéré comme subversif. Il passa beaucoup de temps dans la prison de la caserne. Puis ce fut l’Algérie, à la frontière franco-marocaine où, en faction de nuit, il ne chargeait pas son fusil.

Principal responsable, au niveau régional, de son courant politique, en relations constantes avec Paul Duthel de Lyon, et bénéficiant de la confiance de Pierre Lambert*, il s’investit dans le Parti socialiste autonome (PSA) créé en 1958. Tout en poursuivant son action dans le PSU, il n’appréciait pas sa constitution par fusion avec l’Union de la gauche socialiste (UGS) qu’il estimait trop marquée par le « catholicisme de gauche ». Il s’opposa, dès l’adhésion de Mendès France* au PSA, à des thèses que les adversaires de ce dernier qualifiaient de « néo-capitalistes », de même que, plus tard, avant de rompre avec le PSU, à celles de Michel Rocard*. En 1961, lors de la venue de Pierre Mendès France à Dijon, à la réunion départementale du PSU, il l’avait véhémentement critiqué avec François Chesnais et Pierre Weirich, de la tendance Socialiste révolutionnaire (SR) du PSU. Au milieu des années 1960, avec les militants de cette tendance, il participa à la publication d’une feuille régulière sur une entreprise dijonnaise : L’Étincelle. Il se sépara de la tendance SR en faisant un forte critique de la CFDT et publia avec ses camarades une autre feuille, La Commune, en liaison nationale avec le courant « pour un parti ouvrier indépendant », impulsé par les militants lambertistes du PSU et le Comité de liaison et d’action pour la démocratie ouvrière (CLADO). Chez les jeunes, au moment de la constitution de l’AJS, il diffusa Le combat sexuel de la jeunesse de Wilhelm Reich et impulsa un travail en direction des AJ et des MJC.

François Goudet fut un militant syndicaliste, à la FEN, au SNES, tendance École émancipée (dont il fut le reconstructeur local) puis Front unique ouvrier. Il exerça de nombreuses responsabilités dans les « S1 » (sections d’établissement), « S2 » (section départementale) et « S3 » (section académique) et fut un temps, dans les années 1960, secrétaire de la FEN dans l’Aube. Quand le gouvernement prépara la loi Debré pour financer l’enseignement privé, il fit, avec bien des militants, du porte-à-porte pour obtenir des signatures contre cette future loi. Outre ses interventions très argumentées en congrès académique pour la défense de l’échelle mobile des salaires, il s’opposait à l’entrée des aumôniers dans les établissements publics, acceptée au nom de la liberté d’expression et d’opinion par la tendance A majoritaire, voire défendue par les catholiques.

En 1968, ses interventions étaient écoutées à la Bourse du travail, en particulier le discours qu’il fit, de bilan critique, à la fin du mouvement. Tout en restant en contact avec ses amis politiques, François Goudet, désirant écrire, ne militait plus guère. Toutefois, il s’investit encore dans la solidarité avec Solidarnosc au moment des événements en Pologne.

Bien que mathématicien, François Goudet était aussi un littéraire. En 1987, il publia deux romans policiers pour enfants chez Casterman dans la collection « Mystère » : Marinette contre Mozart et Marinette et la Princesse Thulé, qu’il alla promouvoir et discuter avec ses jeunes lecteurs dans les établissements scolaires. Deux autres, non publiés, furent écrits dans le même esprit. Il écrivit un conte, Pélagia, qui fut édité en Nouvelle Calédonie. Il était en train d’écrire une pièce de théâtre sur Marie Stuart en alexandrins quand le cancer l’emporta.

Il s’était marié à Dijon le 27 juillet 1961 avec Simone, Germaine Bouland.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article87466, notice GOUDET François, Marie, Jean par Jean-Pierre Debourdeau, version mise en ligne le 12 avril 2010, dernière modification le 5 novembre 2022.

Par Jean-Pierre Debourdeau

SOURCES : Souvenirs de sa femme Monette et de ses amis. — Bulletin des anciens élèves de Flavigny-sur-Ozerain, janvier 2003. — État civil.

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