HILSUM René, Louis, Gustave, dit parfois Georges

Par Claude Willard

Né le 20 septembre 1895 à Paris (IXe arr.) ; libraire, éditeur des dadaïstes et des surréalistes, puis à la direction des éditions du PCF avant et après la Deuxième Guerre mondiale ; frère de Charles Hilsum et mari de Marcelle Hilsum, père de Gérard et François Hilsum.

René Hilsum naquit rue Condorcet d’une mère polonaise qui s’était installée en France au début des années 1890. Éloignée de la vie militante, elle fréquenta cependant les émigrés russes et polonais à partir de 1905. Sa sœur et son frère, Camille et Max Horwitz, étaient des militants importants du Parti socialiste polonais. Côté paternel, les Hilsum seraient « des descendants d’une lignée de grands banquiers hollandais (onze générations dans la banque), alliés à la famille Citroën » (D. Buffin et D. Gerbaud). Jacques Hilsum, père de René, courtier en bois de la Baltique et de l’Amérique, quitta le domicile conjugal en décembre 1902.

Pour lui permettre de concourir pour une bourse, sa mère, lorsqu’il eut quatorze ans, déclara que René opterait à sa majorité pour la nationalité française. Il fit ses études au collège Chaptal et, surtout sous l’influence de son oncle Max, il adhéra en 1910 à la section du XVIe de la SFIO. En 1911, il fonda le « Groupe des Chaptaliens socialistes » auquel il fit adhérer en 1912 son nouvel ami, André Breton. Après avoir obtenu la première partie de son baccalauréat, il dut, pour des raisons financières, entrer comme petit employé dans une maison de commerce et préparer seul le soir son deuxième bachot. Son succès convainquit sa mère de le laisser commencer des études de médecine. En 1913, il adhéra au groupe des Étudiants socialistes révolutionnaires et y côtoya Marcel Prenant, Ernest Labrousse, le philosophe Halbwachs. Il y participa à une lecture du Capital sous la direction du sociologue Bonnet.

Mobilisé comme médecin auxiliaire, il fit, sur le front, en janvier 1916, la connaissance de Raymond Lefebvre, et, peu après, par son intermédiaire, de Paul Vaillant-Couturier. Sous leur influence, il adhéra au Comité pour la reprise des relations internationales.

René Hilsum et André Breton, qui avaient collaboré avant la guerre à une revue artistique de jeunes (La Ghilde des Forgerons) et entretenu une correspondance pendant toute la guerre, se retrouvèrent en 1918 au Val-de-Grâce, avec Louis Aragon et Philippe Soupault. Ce petit groupe de quatre amis passionnés de littérature, liés à Apollinaire, aux peintres cubistes et aux dadaïstes, lança une revue : Littérature, aux collaborateurs éminents (André Gide, Apollinaire, Cendrars, Paulhan, Louis Aragon, André Breton, Paul Éluard, Radiguet...). À l’appui de leur revue, ils créèrent les éditions du « Sans Pareil ».

Le 1er février 1920, ayant abandonné sa médecine après trois années d’études, René Hilsum, avec les sœurs jumelles, Marcelle et Germaine Granjux, ouvrit la Librairie du Sans Pareil, 37 avenue Kléber. Il devint ainsi l’éditeur des dadaïstes, des surréalistes (jusqu’à sa brouille avec André Breton en 1923), de Cendrars, Jean Cocteau, du premier roman de Marguerite Yourcenar...

En 1919, il participa à la campagne électorale de Raymond Lefebvre et de Paul Vaillant-Couturier et mena, dans la section du VIe arr. de la SFIO, une active propagande pour l’adhésion à la IIIe Internationale. Marié le 8 décembre 1921 avec Marcelle Granjux, absorbé par ses tâches de libraire et d’éditeur, il se mit en « congé de parti », demeurant un « compagnon de route », très lié avec ses amis communistes (Paul Vaillant-Couturier, Moussinac, son beau-frère Marcel Willard).

Le 29 octobre 1919, la librairie-maison d’édition « Au Sans Pareil » se transforma en société anonyme à responsabilité limitée au capital de 150 000 francs réparti entre sa femme, sa sœur jumelle Germaine Willard et les époux Zetline. En conflit avec ces derniers, il ouvrit, en mars 1931, une autre maison d’édition, 17, rue Froidevaux (XIVe arr.), sous la raison sociale « Hilsum, Génie de la France ». Il lança, sous le titre de Génie de la France, une collection de classiques français qui peut être considérée comme le premier essai en France du livre de poche. Mais, en 1936, il fut mis en minorité par le conseil d’administration qui vendit le Génie de la France à Gallimard.

En 1932, René Hilsum avait réadhéré au Parti communiste. En 1934, il accéda au secrétariat du rayon communiste couvrant les XVe et XVIe arr. (il habitait depuis son mariage, 1, rue Paul-Saunière). Il fit, en 1935, la campagne électorale avec Timbaud dans le XVe arr. Et il obtint de la Région la constitution du XVIe arr. en rayon, dont il fut élu secrétaire. En juillet 1936, il déménagea au 6, rue des Beaux-Arts (VIe arr.), où il demeure encore aujourd’hui. Au même moment, le Bureau politique lui demanda de s’occuper, avec Moussinac, des éditions du parti : Moussinac dirigea les Éditions sociales internationales et René Hilsum le Bureau d’éditions. Il y publia une nouvelle collection : « Les classiques français du socialisme » (Jean Jaurès, Jules Guesde, Lafargue), « Les grands épisodes révolutionnaires ». Constatant les graves déficiences de la traduction Molitor de l’édition Costes, alors la seule sur le marché, René Hilsum triompha des réticences financières de la direction du PCF et réédita le Livre 1er du Capital dans la traduction Roy, que Karl Marx avait de son vivant révisée.

À nouveau mobilisé comme médecin auxiliaire en septembre 1939, il se mit à la disposition du PCF dès sa libération en août 1940. Restant d’abord à son domicile, il s’occupa de propagande. Puis, clandestin, il fut responsable, de février à juin 1941, d’une imprimerie dans un sous-sol de la rue de Bellevue (XIXe arr.) ; ensuite il fut chargé des opérations d’achat du matériel (ronéos, stencils, encre, papier). Il fut arrêté en décembre 1942. Condamné, le 20 mai 1943, à cinq ans de prison et 1 200 F d’amende, il quitta la salle du tribunal, en chantant, avec ses sept coaccusés, la Marseillaise. Remis en février 1944 aux autorités allemandes, il connut la déportation au camp de concentration de Mauthausen jusqu’à sa libération en 1945.

René Hilsum reprit ses activités militantes dans le VIe arr. et des responsabilités dans l’édition communiste. D’abord, il servit de conseiller aux trois maisons d’édition du PCF : La Bibliothèque française (dirigée par Louis Aragon), Hier et Aujourd’hui (à sa tête Marcelle Hilsum), les Éditions sociales (directeur Ducroux). Quand, en 1950, ces maisons fusionnèrent et devinrent les Éditeurs français réunis, René Hilsum devint le bras droit de Ducroux aux Éditions sociales. Il n’y prit sa retraite qu’à l’âge de 83 ans.

De son mariage avec Agathe Granjux (voir Marcelle Hislum), il eut deux fils : Gérard et François.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article87662, notice HILSUM René, Louis, Gustave, dit parfois Georges par Claude Willard, version mise en ligne le 22 avril 2010, dernière modification le 5 août 2022.

Par Claude Willard

SOURCES : Archives Jean Maitron, fiche René Hilsum. — D. Buffin et D. Gerbaud, Les Communistes, Paris, A. Michel, 1981, p. 168 (plusieurs inexactitudes). — Compte rendu d’un entretien entre Nicole Racine et René Hilsum, 16 décembre 1977, 4 p. — René Hilsum : Du dadaïsme aux éditions du PCF, entretien avec Claude Willard, dans les Cahiers d’histoire de l’Institut de recherches marxistes, n° 12 (1983), pp. 89-108. — Pascal Fouché, Au Sans Pareil, Bibliothèque de Littérature contemporaine de l’Université de Paris VII, 1983.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable