HIRZEL Paul, dit Kast, dit Rémont, dit Paul. Nom d’emprunt de Nathan W.

Par Rodolphe Prager

Né en 1918 à Tomachov, près de Lodz (Pologne), mort le 25 septembre 1969 ; typographe ; membre du Parti communiste internationaliste, puis membre de la direction parisienne du Parti communiste internationaliste ; linotypiste au Figaro (sous le nom de Paul Hirzel) et délégué syndical CGT après la guerre.

Nathan était l’aîné d’une famille comptant quatre enfants. Ses parents, juifs athées, choisirent d’émigrer en Allemagne, au début de 1920, son père voulant éviter d’être enrôlé dans l’armée polonaise engagée dans un conflit avec l’Union soviétique. Ils s’établirent à Beuthen (Haute-Silésie) où le père exerça son métier de peintre en bâtiment. Nathan y fit sa scolarité et apprit le français au lycée, ce qui allait être par la suite d’un grand secours pour la famille. Son frère et ses deux sœurs naquirent à Beuthen. Il fréquenta alors des scouts juifs, ayant déjà le goût des activités de plein air.

L’arrivée de Hitler au pouvoir obligea la famille à une nouvelle émigration qui la conduisit à Paris en juillet 1933. Pour faire face aux grandes difficultés, la mère se livra à un travail de couture à domicile et Nathan entreprit son apprentissage de typographe dans une petite imprimerie du Faubourg-du-Temple qui produisit, en particulier, la presse clandestine devant être diffusée en Allemagne nazie. Dépourvu d’autorisation de travail, Nathan s’enfuit par la fenêtre à chaque incursion de la police dans l’entreprise. Sa famille entretint des relations avec des émigrés communistes allemands. En quête d’activités de la jeunesse, Nathan se joignit à un groupe dissident de la Hachomer Hazaïr (sionistes de gauche), puis adhéra aux Jeunesses communistes et à son organisation enfantine annexe, les Pionniers rouges, qui le déçurent un peu n’y retrouvant pas l’esprit discipliné des scouts juifs allemands.

Le cours plus national et les transformations intervenus dans les JC et les Pionniers, en 1935, heurtaient ses principes et son esprit internationaliste. Il s’éloigna de ces organisations, non sans déchirement, et s’affilia, début 1936, avec quelques amis, aux Faucons rouges, bien que des plus réticents envers la SFIO qui parrainait ce mouvement. Il participa en juin 1936 aux groupes « d’agit-prop » des Faucons qui visitèrent les entreprises occupées pour y faire connaître leur répertoire de chansons révolutionnaires et de chœurs parlés. Exigence étant faite à l’encadrement des Faucons rouges d’appartenir au Parti socialiste, Nathan s’associa à ceux qui s’éloignèrent des Faucons rouges et créèrent, le 11 novembre 1936, la Fédération des Pionniers rouges animée par Roger Foirier et Rodolphe Prager. Se rapprochant du trotskisme, il adhéra en janvier 1937, à la Jeunesse socialiste révolutionnaire. Il n’y resta que peu de temps et rejoignit en octobre, l’autre organisation trotskiste, le Parti communiste internationaliste de Pierre Franck et Raymond Molinier. Son activité s’exerça surtout dans la Jeunesse communiste internationaliste.

Au sortir d’une réunion, il fut interpellé avec son jeune frère par la police, en 1938, et trouvé porteur de documents politiques. Expulsé, il fut conduit à la frontière belge mais revint promptement en France. Sa naturalisation, sur le point d’aboutir, fut remise en question. En octobre 1938, la JCI décida de se dissoudre en vue d’une adhésion collective à la Jeunesse socialiste ouvrière et paysanne rattachée au parti de Marceau Pivert. Le Conseil fédéral du 14 décembre l’élut au bureau fédéral de la Seine, sous le nom de Rémont, avec d’autres ex-membres de la JCI. En conséquence d’une campagne anti-trotskiste menée dans le PSOP par Marceau Pivert et ses amis, Nathan fut exclu du parti, le 5 juin 1939, avec les autres membres du bureau, au terme d’une procédure expéditive.

Tout au long de la guerre et de l’occupation nazie, Nathan assuma les tâches les plus difficiles dans l’organisation clandestine de l’ex-PCI. À l’approche des troupes allemandes, il quitta Paris en 1940 et se replia dans le midi de la France. Il milita, ensuite dans le groupe de Marseille reconstitué en août-septembre par Maurice Segal, Gabrielle Brausch et Eduardo Mauricio. Ce groupe ayant été décimé par la répression début 1942, Nathan réintégra la région parisienne. Il y fut responsable de « l’appareil technique » qui assura principalement l’impression de la presse clandestine. Après l’unification des organisations trotskistes, en mars 1944, au sein du Parti communiste internationaliste, il fut membre de la direction parisienne. Son rôle fut important, également, dans la « commission allemande » chargée du travail de désintégration de la Wehrmacht. Il participa à la rédaction des tracts et des journaux en langue allemande, invitant les soldats allemands à engager la lutte contre le régime hitlérien et à accomplir la révolution en Allemagne. Sa qualification de typographe fut mise à contribution pour composer le journal Arbeiter und Soldat dans l’imprimerie clandestine du parti.

Le père de Nathan fut interné dès le 4 mai 1941 et déporté à Auschwitz le 22 juin 1942. Sa mère et ses sœur furent internées à leur tour à Drancy, le 16 juillet 1942 et déportées également à Auschwitz le 18 septembre 1942. Aucun d’eux n’en revint. Son frère, interné au camp du Vernet (Ariège) le 12 octobre 1939, s’en évada le 10 juin 1944 pour rejoindre la résistance dans le maquis.

Sous le nom de Paul Hirzel, Nathan fut après la guerre linotypiste au Figaro et délégué syndical CGT. Il milita dans l’Organisation communiste internationaliste animée par Pierre Lambert. Il mourut d’un cancer le 25 septembre 1969. De nombreux militants de son organisation et une forte délégation de ses collègues du Figaro et des syndicats du Livre assistèrent à ses obsèques, le 27 septembre au cimetière de Saint-Denis où Pierre Lambert rendit un chaleureux hommage à sa mémoire.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article87671, notice HIRZEL Paul, dit Kast, dit Rémont, dit Paul. Nom d'emprunt de Nathan W. par Rodolphe Prager, version mise en ligne le 22 avril 2010, dernière modification le 22 avril 2010.

Par Rodolphe Prager

SOURCES : Le Jeune léniniste, n° 8, juin 1937. — la Commune, n° 68, 6 octobre 1937. — La Vérité, n° 5, 1er juillet 1939. — Informations ouvrières, n° 445, 1er octobre 1969. — Témoignages divers.

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