AUDOYE Ismaël, François

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 3 octobre 1868 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; mort en janvier 1925 ; instituteur ; trésorier de la Fédération des syndicats d’instituteurs d’avril 1908 à 1910 ; fondateur de L’École émancipée.

Premier numéro de <em>L’École émancipée</em>, 1er octobre 1910
Premier numéro de L’École émancipée, 1er octobre 1910

Né dans une famille originaire de l’Ariège, Ismaël Audoye fit ses études à Foix où il obtint son Brevet. Il fit des suppléances dans l’enseignement primaire en janvier 1888 et fut nommé instituteur à Graveson (Bouches-du-Rhône) le 1er novembre 1892. Il enseigna à Arles de janvier 1894 à octobre 1897 puis à La Ciotat et enfin à Marseille. En 1904, Audoye fut un des fondateurs, avec Antoine Ripert et quelques autres, de la section « l’Émancipation de l’Instituteur » des Bouches-du-Rhône qui, dès l’année suivante, se transformait en syndicat. Audoye étendait d’ailleurs son action syndicale à d’autres milieux et c’est ainsi qu’à l’issue de l’assemblée générale du 30 novembre 1906 de la fédération des Bouches-du-Rhône du prolétariat de l’État, du département, des communes et des services publics déclarée le 1er décembre 1906 (J.O. du 21 décembre), il en fut élu secrétaire adjoint, Guerrier étant secrétaire.

Après le congrès fédéral de Lyon, 16-18 avril 1908, le syndicat de la Seine demanda, au cours d’une assemblée générale tenue le 14 mai, que le siège de la Fédération soit mis en province. Dans une situation difficile, Marseille se proposa et c’est ainsi qu’Audoye entra au bureau fédéral où il exerça durant deux ans les fonctions de trésorier. C’est lui qui conçut l’idée d’une coopérative d’édition, idée qu’il exposa en mars 1909 dans le bulletin fédéral et dont le principe fut adopté par le conseil le mois suivant. Une commission élabora alors des statuts qui furent approuvés par le congrès fédéral d’Angers, 25-27 mars 1910, ainsi que la création d’une revue hebdomadaire qui fut l’École émancipée dont le premier numéro parut le 1er octobre 1910… avec 7 f en caisse. Audoye, administrateur — Adolphe Bezot étant secrétaire de rédaction — se dépensa sans compter, y compris financièrement, pour la réussite de la revue dont le succès était assuré, deux ans plus tard ; Audoye, malade céda alors la place.

Lorsque, en septembre 1912, après le congrès fédéral de Chambéry, le gouvernement lança l’ordre de dissolution des syndicats d’instituteurs, Audoye conseilla la résistance, en dépit de la défaillance du syndicat du Morbihan alors responsable des destinées de la Fédération. Avec Louis Lafosse, il fut le signataire d’un télégramme : « Marseille résiste. Tenez-bon » envoyé à tous les groupes d’instituteurs fédérés. En même temps qu’eux résistaient notamment André Chalopin dans la Seine, Marie et François Mayoux dans la Charente, le syndicat de Maine-et-Loire. Audoye montra la même fermeté lorsque, à l’issue du congrès de Bourges tenu le 19 septembre 1913, Emile Glay et Charles Joly acceptèrent de se soumettre au nouvel essai gouvernemental de dissoudre les syndicats enseignants. Il fut, aux côtés de Chalopin et Loriot, pour la résistance.

François Bernard l’a présenté ainsi, intervenant à la tribune du congrès de Paris, les 13-15 avril 1909 : « Petit de taille ; et pourtant il ne le paraît pas, tellement son impétuosité, ses gestes, son assurance le grandissent. L’œil vif, le visage arrondi malgré la petite barbe en pointe, la bouche fine, il s’impose d’emblée. On l’écoute : on n’entend même plus son terrible accent où vibre toute la Provence. On est pris par sa non moins terrible argumentation qui étonne, séduit et, très souvent, convainc ».

De 1914 à 1918, Audoye appartint au courant minoritaire et, en mai 1916, il proposa à l’Union départementale des Bouches-du-Rhône un ordre du jour « antiguerrier, zimmerwaldien » qui obtint 17 voix contre 5 et 1 abstention, puis il assuma même les fonctions de secrétaire de l’Union. Le 24 octobre 1914, l’École émancipée avait été suspendue ; elle fut remplacée par l’École le 31 octobre puis par l’École de la Fédération à partir du 3 juillet 1915.

En 1918, Audoye fut réélu secrétaire de l’UD-CGT (congrès d’Arles). Le discours qu’il prononça au congrès, 19-20 mai, fut censuré.

Après la guerre, sur sa proposition, au congrès fédéral de Tours tenu en août 1919, la Fédération des syndicats d’instituteurs se transforma en Fédération de l’enseignement de tous degrés. Mais Audoye, « fusionniste », fonda un « syndicat général » et fut mis en minorité à Paris en 1921 après être entré en lutte contre la direction fédérale. Il abandonna alors la direction de la revue, puis, au congrès de Brest, 5-7 août 1923, son syndicat général de Marseille (Bouches-du-Rhône) se sépara définitivement de l’organisation centrale. Audoye, réintégré le 1er octobre 1923 — il avait été révoqué pour avoir fait grève le 1er mai 1920 — mourut un an plus tard.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article87908, notice AUDOYE Ismaël, François par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 18 octobre 2010, dernière modification le 2 septembre 2022.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Premier numéro de <em>L'École émancipée</em>, 1er octobre 1910
Premier numéro de L’École émancipée, 1er octobre 1910

SOURCES : Arch. Nat. F7/12538. — Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, XIV M 25/52, XIV M 24/60, M 6/10814. — L’Ouvrier syndiqué, 1er octobre 1912. — Le Petit Provençal, 24 mai, 1er juin 1916, 25 mai 1918. — J. Bonnabel, Le Mouvement ouvrier à Marseille…, op. cit. — Th. Flammant, L’École Émancipée (1910-1914), Mémoire de Maîtrise, Paris I, 1980. — Bernard, Bouët, Dommanget, Serret, Le Syndicalisme dans l’enseignement, op. cit. — L. Bouet, Les Pionniers du syndicalisme universitaire, s.d. — A. Rosmer, Le Mouvement ouvrier pendant la guerre, tome II.

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