JARLAUD Odette, Marie

Par Jacques Girault

Née le 1er janvier 1911 à Villers-la-Faye (Côte-d’Or), morte le 18 janvier 2002 à Montbard (Côte-d’Or) ; institutrice en Côte-d’Or ; militante syndicaliste de la FUE puis du SNI ; militante communiste.

Odette Jarlaud était la fille de petits commerçants et de viticulteurs. Son père, vigneron, mourut au front en octobre 1918. Sa mère travailla alors comme employée de bureau au Populaire de Bourgogne, puis comme employée de commerce à Dijon. Elle avait toujours eu des « opinions de gauche » dit sa fille. N’ayant pas reçu de sacrements religieux, pupille de la Nation, elle entra à l’École normale d’institutrices de Dijon (Côte-d’Or) en octobre 1926. Elle enseigna dans des postes ruraux à Menesbles (octobre 1929-janvier 1932), puis à Étaules (janvier 1933-février 1937). En 1933, elle décida tout en enseignant de poursuivre des études à la faculté des sciences de Dijon. Ayant obtenu des certificats de licence à la Faculté des Sciences de Dijon, elle fut nommée, le 1er février 1937, au cours complémentaire de filles de Beaune pour y enseigner les sciences et les mathématiques. Dans le cadre du cours complémentaire féminin tout neuf, elle joua son propre rôle de professeur de sciences, dans Jeannette Bourgogne, le film de nos écoles, réalisé par Jean Gourguet en 1938, sous l’égide de l’inspection académique et de l’office des pupilles de l’école publique grâce à un financement des instituteurs de Côte-d’Or. Après la guerre, elle enseigna à partir d’octobre 1945 au cours complémentaire de Dijon-Trémouille qu’elle devait diriger de septembre 1965 à sa retraite en septembre 1966. Sa sœur Hélène, née en 1909, institutrice elle aussi et épouse de Roger Chevalier.

Odette Jarlaud cotisa en 1929 à un groupe d’étudiants socialistes mais n’y fut pas active et le groupe ne vécut pas. Elle adhéra, en octobre 1929, lors de sa première prise de poste, à l’Union laïque, syndicat de la Fédération unitaire de l’enseignement. En 1934, elle figurait parmi les fondateurs du Groupe des Jeunes qui comptait l’année suivante 180 adhérents, et publiait un bulletin ronéoté La Voix des Jeunes. Elle assurait en outre la trésorerie du mouvement. Elle participa lors des vacances de Noël 1935 à la troisième école internationale des militants de l’Internationale des travailleurs de l’enseignement, à Montreuil.

Membre du bureau de l’Union laïque, elle devint membre du bureau de la section unifiée du Syndicat national des instituteurs, en novembre 1935. Après avoir obtenu 160 voix sur 164 votants de la région de Dijon, elle fut désignée comme suppléante du conseil syndical lors des élections du 20 février 1936 du SNI. Membre titulaire du bureau en 1938, collaboratrice régulière du bulletin, elle était secrétaire des commissions des questions pédagogiques, puis d’éducation sociale, et intervint à diverses reprises, dans le bulletin, contre les thèses pacifistes développées dans le syndicat. Après avoir été trésorière-secrétaire du canton Dijon-rural, puis du canton de Beaune-Nord, en mai 1938, elle fut élue au conseil départemental de l’enseignement primaire, et représenta aussi le syndicat au Comité consultatif. Gréviste le 30 novembre 1938, elle fut sanctionnée de huit jours de retenue de traitement.

En 1938, le cinéaste Jean Gourguet réalisa Jeannette Bourgogne, portrait d’une orpheline devenue institutrice (Blanchette Brunoy) en Bourgogne. Ce film, tourné à Aisy-sous-Thil, évoquait le rôle de l’école dans la promotion sociale. Odette Jarlaud fut une des organisatrices de la souscription lancée par le SNI .

Membre du Parti communiste depuis avril 1934, Odette Jarlaud devint responsable de la rédaction de l’hebdomadaire communiste, Le Travailleur de Bourgogne et membre du comité de la région de la Côte-d’Or en 1938 et en 1939. Lors des accords de Munich, elle se dressa contre la politique de capitulation devant l’hitlérisme et dénonça l’attitude du secrétaire général du SNI, André Delmas. Au début de la guerre, elle ne figurait plus parmi les responsables du syndicat annoncés par le bulletin, en raison de son appartenance au Parti communiste. Le 26 novembre 1940, le préfet de Côte-d’Or demandait au secrétaire d’État à l’Instruction publique l’autorisation de prendre des « mesures sévères » contre quatre militants, dont elle.

En liaison avec d’autres militants communistes, Odette Jarlaud prit part, à partir de juin 1940, à la renaissance clandestine de l’activité qui devait déboucher sur la formation du Front national dans l’arrondissement de Beaune et à la publication de six numéros de La Bourgogne combattante. Menacée d’arrestation, elle passa dans la clandestinité sous le pseudonyme de « Françoise » en octobre 1943. Responsable du « travail féminin » dans la Marne (ravitaillement des FTPF, défense des conditions de vie de la population), elle devint, à partir de février 1944, à Paris, dans la CGT clandestine, une militante assurant la liaison entre le Bureau confédéral et les fédérations d’industrie. À partir de mai 1944, elle contribua à la réorganisation des sections départementales du SNI dans la Côte-d’Or, la Marne, l’Yonne, le Doubs, le Jura, la Saône-et-Loire et l’Ain. Membre du comité directeur clandestin du Syndicat, toujours sous le pseudonyme de « Françoise », elle fut signataire de l’appel lancé dans le premier numéro de L’École libératrice, en septembre 1944, pour reconstituer un Syndicat national des instituteurs. À la libération de Paris, le samedi 19 août au matin, elle fut parmi les militants Paul Delanoue, Yvonne Crebouw, André Ravailhe, Raffy*, Geneviève Roulon, Jean Roulon, Paul Vigueur) qui s’emparèrent du ministère de l’Éducation nationale. Elle signa un article dans L’École libératrice, du 10 janvier 1946, intitulé « Il nous faut plus de militantes au Syndicat ». En juin 1946, elle fut élue suppléante au Conseil d’enseignement de l’enseignement du premier degré, dans la section des directeurs ou professeurs de cours complémentaires de filles, la titulaire étant Gabrielle Hielle.

En Côte-d’Or, membre du conseil syndical de la section du SNI en 1945, Odette Jarlaud fut régulièrement réélue jusqu’en 1966 (à l’exception de l’année scolaire 1949-1950). Secrétaire adjointe, elle devint secrétaire générale de la section départementale en 1965-1966. À la veille de sa retraite, la liste « Unité et Action » qu’elle avait présentée ayant obtenu la majorité, elle fut alors la première femme à occuper ce poste. Son successeur fut Albert Meney. Elle fut, tout au long de cette période, responsable de diverses commissions (cours complémentaires, éducation sociale, affaires administratives) et, après 1966, secrétaire de la commission des retraités. Elle retrouva à la Libération ses fonctions au conseil départemental de l’Enseignement primaire dont elle avait été suspendue par l’administration en décembre 1939. Élue en 1945 et en 1948, elle siégea à la Commission administrative paritaire départementale et au comité technique paritaire dès leur création. Sur le plan national, elle était membre de la CA nationale de la FEN-CGT à partir de 1948. Dans le courant « Unité et Action » du syndicalisme enseignant, elle participait à la commission nationale des retraités. Dans le cadre de la CGT, elle avait été désignée par le conseil syndical du SNI pour siéger à la commission administrative de l’Union départementale de la Côte-d’Or en décembre 1945 dont elle fut secrétaire adjointe. Elle siégea de 1948 à 1954 à l’UD au titre de la FEN-CGT. Elle fut aussi responsable du Cartel des services publics.

Odette Jarlaud participa aux congrès nationaux du SNI, intervenant au nom des militants « cégétistes ». Au congrès de 1948, assesseur lors de la séance du 23 mars, elle fit partie de la commission de la presse. Lors de la première élection du bureau national à la proportionnelle, à la fin de 1947, elle figurait parmi les vingt candidats sur la liste « pour un syndicalisme indépendant démocratique et efficace » conduite par Paul Delanoue, « secrétaire de la FEN ». Le secrétariat du PCF ayant donné son accord pour sa candidature au bureau national, elle figura en douzième position sur la liste "Par l’unité et l’action, nous œuvrerons à la sauvegarde de l’école, de la liberté et de la paix". En 1953, elle figurait en 18e position sur la liste « Pour renforcer l’unité et l’efficacité du SNI ». Elle était suppléante à la commission administrative nationale de la Fédération de l’Éducation nationale de 1950 à 1952. Lors de la journée pédagogique avant le congrès de Brest, le 16 juillet 1958, après le rapport de Jeanne Lordon sur le « caractère original de l’enseignement dans les cours complémentaires et les orientations possibles des élèves », elle intervint sur la préparation du brevet dans les CC et le recrutement du personnel de l’enseignement privé.

Odette Jarlaud siégeait aussi aux conseils d’administration de la Caisse primaire d’assurances sociales et de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale depuis 1947. À la fin des années 1980, elle était toujours vice-présidente de la section départementale de la MGEN. Secrétaire générale de la Fédération des retraités civils et militaires (1975-1981), déléguée départementale de l’Éducation nationale (1967-1985) et vice-présidente de l’Union départementale des DDEN, elle était aussi membre du conseil d’administration de l’Œuvre des pupilles de l’école publique (1938-1987).

Odette Jarlaud demeura membre du comité fédéral du Parti communiste français, de la Libération à 1965. Elle figurait en cinquième position sur la liste d’Union républicaine résistante et antifasciste, présentée par l’Union progressiste et le Parti communiste français pour les élections législatives du 17 juin 1951. En novembre 1968, lors de la conférence fédérale du PCF, elle intervint pour critiquer l’intervention des troupes du Pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie et l’attitude du PCF vis-à-vis de la « normalisation ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article87957, notice JARLAUD Odette, Marie par Jacques Girault, version mise en ligne le 9 mai 2010, dernière modification le 29 août 2022.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F17/27110. — Arch. Dép. Côte-d’Or, 1370 W art. 44. — RGASPI, 495 270 4225 ; 517 1 1891 et 1908. — Presse syndicale. – DBMOF, notice par J. Girault. — Renseignements fournis par l’intéressée. — Notes d’André Belleville, d’Alain Dalançon, de Paul Delanoue, d’Albert Meney, de Josette Ueberschlag.

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