HEURTIER Anna

Par Jean-Michel Steiner

Née le 20 janvier 1892 à Saint-Étienne (Loire), morte le 9 août 1973 à Saint-Étienne ; enseignante ; syndicaliste CFTC ; résistante ; conseillère municipale de Saint-Étienne en 1945.

Remarié avec une tailleuse, son père Antoine Heurtier (1847-1922), né le 16 février 1847 à Valbenoite (Loire), d’abord ouvrier mineur, puis armurier à la Manufacture d’armes, avait trois autres filles, Élisabeth (1885-1950), Marinette (1888-1954) et Jeanne (1890-1971). Il était l’un des fondateurs de l’Union des travailleurs, coopérative de consommation, dont le comptable, Auguste Plantevin, futur maire socialiste de la ville (1906-1908), signa l’acte de naissance d’Anna en qualité de témoin. Anna Heurtier, la benjamine, passa toute sa vie au cœur du quartier d’artisans textiles de la place Jacquard.

Au début des années 1920, Anna Heurtier enseignait les arts ménagers à l’École primaire supérieure de filles, rue Rouget de l’Isle. Avec Jeanne, une de ses sœurs, elle compta parmi les premières militantes de la CFTC dans le bassin stéphanois autour d’Alice Vincent et Jean Pralong. Les sœurs Heurtier condamnèrent la capitulation de juin 1940 et s’engagèrent tôt dans la Résistance. Proches de la Jeune République, du Parti démocratique populaire, de la CFTC, elles rejetèrent le régime raciste et autoritaire né de la défaite, hébergèrent des enfants juifs menacés et, avec Dora Rivière et Robert Ploton, organisèrent un réseau d’entraide. Au début de 1941, Anna participa aux activités du groupe 93 que l’étudiante Violette Maurice créa dans la ville. Le 12 mars 1943, les hommes du SD firent irruption dans leur appartement de la rue Grand Gonnet, cherchant Marinette et des indices de leurs activités. Jeanne et Anna étaient seules. Marinette, prévenue à temps, ne rentra pas. Les deux sœurs furent conduites au siège du SD, au Nouvel Hôtel, avenue Denfert Rochereau. La souricière maintenue plusieurs jours dans l’appartement ne donna aucun résultat. Anna et Jeanne, transférées à Montluc puis à Fresnes, restèrent détenues pendant près de dix mois.

À la Libération, les sœurs Heurtier représentèrent à Saint-Étienne l’espoir de rénovation de la vie politique de certains courants de la Résistance. Le maire installé par le Comité départemental de Libération en août 1944, Henri Muller, proposa à Anna de figurer sur la liste Mouvement de Libération nationale-Parti socialiste SFIO qu’il conduisait pour les élections municipales. Devancée par celle du Parti communiste français le 29 avril 1945, son équipe l’emporta nettement le 13 mai (57 % des suffrages exprimés contre 27,6 % au PCF) : Anna devint conseillère municipale. Mais le 27 mai 1946, le Conseil d’État invalida cette élection parce qu’elle était fonctionnaire municipale. À l’automne, sa sœur Marinette, candidate au conseil général dans le canton nord-ouest sous l’étiquette « France Combattante », obtint 28,9 % des suffrages exprimés contre 20,1 % à Fontanilles, candidat au Front national, et 35 % à Édouard Rey (UDSR). Ayant maintenu sa candidature au second tour, elle ne conserva que 8,1 % des voix, la grande majorité de ses électeurs reportèrent leurs voix sur Rey qui l’emporta (48,3 %).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article88111, notice HEURTIER Anna par Jean-Michel Steiner, version mise en ligne le 21 mai 2010, dernière modification le 7 mars 2021.

Par Jean-Michel Steiner

SOURCES : Arch. Dép. Loire, 23 J 859/4, 2 W 194. — Arch. mun. de Saint-Étienne, 9 C 2 67, 2 E 113, 3 E 91, 1 F 26. — Témoignages de Jean Bonis, Henri Falque et Louis Nicolas. – Presse locale.
BIBLIOGRAPHIE : Luirard Monique, La Région stéphanoise dans la guerre et dans la paix (1936-1951), Saint-Étienne, PUSE - CIER/SR, 1980. - Steiner Jean-Michel, Le PCF dans la vie stéphanoise (1944-1958). Communisme et anticommunisme dans une grande ville ouvrière sous la IV° République. Université J. Monnet St-Étienne. Décembre 2005. 832 p. - Bruno Carlier, "Marinette Heurtier (1888-1954), une pionnière du service social à Saint-Étienne", Histoire contemporaine et patrimoine : la Loire, un département en quête de son identité, colloque CERHI, 24-25 novembre 2005.

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