Par Jacques Girault, Jean Maitron, Claude Pennetier
Né le 15 septembre 1879 à Ubaye (Basses-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence), mort le 31 janvier 1938 à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) ; comptable puis permanent du Grand-Orient ; militant socialiste, communiste, socialiste-communiste, socialiste SFIO, puis néo-socialiste ; maire de Pantin (Seine) (1919-1938), conseiller général de la première circonscription de Pantin (1935-1938), député (1924-1927), sénateur de la Seine (1927-1938).
Issu d’une famille ayant des racines anciennes dans la Creuse, Charles Auray ne semble pas avoir vécu dans son département de naissance, les Basses-Alpes. Il se présentait lui-même comme un banlieusard de vieille date. Il fut comptable puis chef comptable dans différentes entreprises avant de devenir chef du secrétariat général et bibliothécaire au Grand-Orient. Il adhéra au Parti socialiste lors de l’unité de 1905 et, fixé à Pantin, il y fut un des animateurs de la section locale après avoir été secrétaire de la 21e section, rassemblant des travailleurs non rattachés à une section d’arrondissement. Il siégea à la commission exécutive de la Fédération de la Seine en 1913-1914. Charles Auray fut élu conseiller d’arrondissement de Pantin en 1911, 1912 et 1919. Il présida le conseil d’arrondissement de Saint-Denis avant 1924.
Aux élections municipales du 30 novembre 1919, la liste socialiste dirigée par Charles Auray fut élue dès le premier tour, avec environ 3 900 voix contre 2 600 à la liste d’union républicaine du maire sortant et Auray accéda à la première magistrature municipale. Délégué au congrès de Strasbourg (février 1920) avec un mandat favorable à la motion Frossard, il adhéra au Parti communiste après le congrès de Tours. La Fédération de la Seine le désigna au conseil national communiste le 1er octobre 1921. Auray quitta le Parti communiste avec les francs-maçons fin 1922-début 1923 pour rejoindre l’Union fédérative et socialiste puis l’Union socialiste communiste, et enfin, avant les législatives de 1924, le Parti socialiste SFIO. Selon une affiche communiste placardée le 18 janvier 1923, il aurait refusé au PC une salle pour un meeting contre l’occupation de la Ruhr. Interviewé par Robert Tourly de l’Egalité le 16 mai 1923, il déclara que sur trente conseillers vingt-six avait rejoint l’USC, trois étaient socialistes SFIO et un seul communiste. La préfecture de la Seine ne doutait pas de son succès à la veille des élections de mai : « M. Auray, qui est d’ailleurs un excellent administrateur, aussi prudent qu’il est actif, jouit d’une très réelle autorité dans sa commune. Il ne paraît pas douteux que sa liste doive l’emporter aux prochaines élections municipales » (Versement 10451/76/1, mars 1925). La liste socialiste SFIO de Charles Auray fut en effet élue dès le premier tour, le 3 mai 1925. Il en fut de même le 5 mai 1929.
Charles Auray joua un rôle actif dans le sport ouvrier. Il fut co-président de l’USSGT de 1923 à 1934 et s’affirma comme un des principaux protagonistes de l’affrontement politique avec les communistes de la Fédération sportive du Travail (FST). Il était, avec Albert Guillevic, une des cibles privilégiées des critiques de ce courant. Son nom disparaît après la fusion et la naissance de la FSGT en 1935.
Élu député de la 4e circonscription de la Seine le 11 mai 1924 sur la liste du Cartel des gauches, il assura le secrétariat de la commission d’administration générale, départementale et communale de la Seine et rapporta la loi sur les lotissements défectueux (1925). La commission exécutive de la Fédération socialiste de la Seine le désigna, le 6 décembre 1926, comme candidat aux élections sénatoriales. Le 9 janvier 1927, il se plaça en tête de liste SFIO avec 427 voix, fut élu au deuxième tour, en seconde position, avec 612 voix. Le maire de Pantin prit une part active à la discussion de la loi sur les lotissements qu’il avait rapportée à la Chambre et continua à s’intéresser à l’organisation administrative et à l’urbanisme de la région parisienne (1928-1929).
Membre de la Commission administrative permanente de la SFIO en 1930, en 1931 et suppléant en 1933, Auray partageait les analyses politiques de Pierre Renaudel, aussi quitta-t-il le Parti socialiste avec lui en 1933. La popularité de Charles Auray était telle à Pantin que les militants socialistes locaux et les électeurs le suivirent. La liste du Parti socialiste de France (PSDF) fut réélue le 5 mai 1935. Auray conserva son mandat de sénateur le 20 octobre 1935. Il entra au conseil général comme représentant de la première circonscription de Pantin le 26 mai 1935, par 4 346 voix contre 2 609 à Hénaff, communiste et 1 167 à Louis Collaveri, conseiller sortant socialiste SFIO (11 504 inscrits, 8 226 votants). Atteint de pneumonie, il mourut en cours de mandat, le 31 janvier 1938.
Après son décès, son fils Charles, né le 18 avril 1912 à Pantin, architecte, se présenta à l’élection municipale complémentaire. Il obtint 19,37 % des voix des inscrits et se désista pour le candidat communiste. Un arrêté préfectoral du 27 juin 1942 le nomma conseiller municipal alors qu’il était prisonnier de guerre en congé de captivité (10441/04/2). Son autre fils, Adrien, né en 1909 à Pantin, était conducteur de travaux.
Par Jacques Girault, Jean Maitron, Claude Pennetier
SOURCES : Arch. Nat., F7/13253. — Arch. Dép. Seine, DM3. — J. Boutonnet, « Le Parti communiste face à une municipalité socialiste : l’exemple de Pantin dans l’entre-deux-guerres », Cahiers d’histoire de l’Institut Maurice Thorez, n° 19, 4e trimestre 1976. — Le Conseil municipal : nos édiles, 1935-1941, op. cit. — J. Jolly, Dictionnaire des parlementaires français, t. I, op. cit. — Le Front populaire aux électeurs sénatoriaux du Grand Paris, 20 octobre 1935, p. 13. L’Aube sociale, mai 1925. — Pantin 1935, brochure présentant le bilan de la municipalité, 63 p.
Sur le sport travailliste : La Voix de l’Est, 25 novembre 1933. — Le Sport ouvrier, 5 novembre 1923. — Ve fête et concours international de gymnastique et de sports, organisé par le club de Guebwiller (USSGT), Mulhouse, Union, 1933, 72 p. — Léon Strauss, « Le sport travailliste français durant l’entre deux-guerres », in Les origines du sport ouvrier en Europe, L’Harmattan, 1994. — Notes de Nicolas Kssis.