PIETTE Ferdinand, dit Fernand

Par José Gotovitch

Né le 12 mai 1901 et mort à Bruxelles le 4 août 1978 ; comédien, metteur en scène et directeur du Théâtre Prolétarien ; participant de la Première Olympiade du Théâtre ouvrier révolutionnaire à Moscou, membre de l’UITR.

Fernand Piette en Soldat Schweik
Fernand Piette en Soldat Schweik
Théâtre Prolétarien
Années trente
Photo Kessels, Archives et Musée de la Littérature, Bruxelles

Fils d’un typographe et d’une mère orpheline, mise au travail à huit ans et analphabète, fortement marqué par cette misère culturelle, Fernand Piette suivit les cours du Conservatoire de Bruxelles de 1920 à 1924, puis entra au Théâtre du Parc . Proche du Parti communiste, il fut approché fin 1925 par le secrétaire général du PCB War Van Overstraeten , désireux de créer un théâtre de propagande pour le PC sur le modèle allemand, et qui serait composé exclusivement d’amateurs. Le Théâtre Prolétarien démarra au début janvier , dirigé par une petite équipe d’intellectuels et d’artistes membres ou proches du PC. Après un an, Piette en prit la direction artistique et le TP entama ses pérégrinations militantes dans le pays. Fernand Piette quitta donc le Parc et devint un très court moment secrétaire de War Van Overstraeten , mais mal ou pas du tout payé, il choisit d’être représentant en machines à écrire pour assurer sa subsistance. Il adhéra formellement au PC en 1929. Avec le TP, il développa l’agit-prop, en particulier le chœur parlé animé, avec des textes de Ernst Toller, Vernaillen, Vaillant-Couturier, et monta ensuite Hourra l’Oural d’Aragon qu’il présenta à Paris. Mais c’est avec un montage réalisé au départ du film Misère au Borinage qu’il participa avec 12 de ses 16 comédiens à l’Olympiade du théâtre révolutionnaire, en mai- juin 1933 à Moscou.

Henri Storck, grand cinéaste belge, co-réalisateur avec Joris Ivens du film, souligna tout ce qu’il devait à Piette qui participa à plusieurs mises en scène de ses films ultérieurs et y interpréta même un rôle. C’est qu’au retour de Moscou, Piette, selon la ligne nouvelle qui tournait le dos au Proletkult, créa une nouvelle troupe, professionnelle, le Théâtre de l’Equipe qui promena désormais par villes et villages un répertoire classique, comprenant des œuvres de Gorki (Les Bas Fonds, Les Aristocrates, Yégor Boulichov, ) Hasek, Gogol, Molière…Il participa également à la fondation de l’Association Révolutionnaire culturelle (ARC) en 1935.

En 1940 il épousa Marie Thérèse ( dite Mariou) Chevolet (1901-1950), ancienne professeur de danse, alors dactylo à l’ambassade soviétique, qui devint comédienne et s’engagea totalement dans l’aventure théâtrale de son époux à partir de 1937. Elle mourut d’ailleurs en scène en novembre 1950. C’est à elle sans doute que le Théâtre dut que l’ambassadeur soviétique Roubinine, fut un spectateur assidu de leurs productions. Mais aussi, paradoxalement c’est l’ambassadeur soviétique qui plaida en sa faveur auprès du ministre Spaak et obtint que des subsides officiels soient versés au théâtre. Le PCB n’assurait plus le soutien régulier, de même que les Amis de l’Union soviétique.

En 1938, Piette fut approché par une troupe socialiste (De Toekomst) et fusionna l’Equipe avec elle, prenant le nom de Théâtre du Peuple. Il adhéra au POB et put ainsi bénéficier du vaste réseau socialiste pour produire sa troupe. Il demeura cependant sous-marin du PC. En 1940, il cacha et sauva le négatif du film de Storck-Ivens et, pour subsister, anima un cabaret, fit du cirque, et jusqu’en 1942, travailla au cachet à la radio censurée. Il apporta ensuite son aide au Front de l’Indépendance et à la libération, dès octobre 1944, proposa au PC un plan détaillé, artistique et financier, pour la création d’un « grand théâtre populaire itinérant ». Manifestement le PCB ne pouvait assumer pareil projet et le Théâtre de l’Equipe reconstitué, reconnu bientôt par les services d’éducation populaire officiels, poursuivit son difficile chemin sur les routes de Belgique pratiquant une réelle décentralisation d’un théâtre progressiste. Piette l’assura jusqu’à la limite de ses forces. En 1976, il mettait encore en scène Yégor Boulitchov au Rideau de Bruxelles. En marge de son théâtre, il avait toujours répondu aux demandes formulées par le PCB à l’occasion de manifestations artistiques. Après le décès de sa femme, Fernand Piette avait vécu jusqu’à son décès en 1958, avec Véra Luftig, ancienne de l’Orchestre Rouge, veuve d’un ouvrier diamantaire communiste, tombé en Espagne en 1936. Lui même termina tristement sa vie à l’hospice, malgré une décoration, reconnaissance tardive, qui lui fut décernée en ce lieu.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article88749, notice PIETTE Ferdinand, dit Fernand par José Gotovitch, version mise en ligne le 18 août 2010, dernière modification le 18 août 2010.

Par José Gotovitch

Fernand Piette en Soldat Schweik
Fernand Piette en Soldat Schweik
Théâtre Prolétarien
Années trente
Photo Kessels, Archives et Musée de la Littérature, Bruxelles

SOURCES : RGASPI, 540 1 58. – CARCOB, dossier CCP Fernand Piette . – Fernand Piette ou l’amour du Théâtre, tapuscrit inédit de Jacqueline Piette, décembre 1999. – Le théâtre ouvrier en Belgique de 1930 à 1980, Rue des Usines, N° 6/7/8/9, automne 1981. – José Gotovitch, Au service de la Révolution. Le chœur parlé communiste in Rue des Usines, N° 34-35, printemps 1997. – Paul Aron, Fernand Piette, Nouvelle Biographie nationale, T 9, 2007, pp. 291-294. - cinergie.be webzine>articles>Hommage à Henri Storck.

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