ISTURIZ Michèle [ISTURIZ Michelle, Anne, dite]

Par Éric Belouet

Née le 28 janvier 1932 à Saint-Jean-Pied-de-Port (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques) ; couturière, ouvrière d’usine, responsable d’un centre de promotion féminine à Madagascar, employée au CCFD ; militante jociste, permanente de la JOCF (1953-1957), envoyée par la JOCF à Madagascar (1957-1964) ; syndicaliste CFDT, adhérente au PS et militante associative, membre de l’ACO.

Fille de Mateo Isturiz, venu d’Espagne dans les années 1920, bûcheron, ouvrier dans une usine de bois à Tardets (devenu Tardets-Sorholus, Basses-Pyrénées), décédé à la suite d’un accident de travail en 1937, et de Marie née Irilarry, serveuse devenue couturière après son mariage, catholique pratiquante, tous deux sans engagement syndical ni politique, Michèle Isturiz était la troisième de cinq enfants (deux sœurs et deux frères, dont un prêtre). D’abord domiciliée à Alos-Sibas (devenu Alos-Sibas-Abense, Basses-Pyrénées), la famille s’installa à Laguinge-Restoue (Basses-Pyrénées) après la mort du père. Michèle Isturiz fréquenta l’école publique de cette commune, puis l’école du canton à Tardets-Sorholus. Elle obtint le certificat d’études primaires puis effectua, dans la même commune, trois ans d’apprentissage de couture qui lui permirent d’obtenir le certificat de fin d’apprentissage en 1947.

Elle partit alors à Bayonne (Basses-Pyrénées) où elle travailla comme couturière dans un petit atelier de quatre personnes. Celui-ci ayant fermé, elle s’installa à Agen (Lot-et-Garonne) en 1952 et travailla pendant deux ans comme ouvrière à la chaîne dans une biscuiterie qui comptait environ cinquante ouvriers et où les conditions de travail étaient très dures.

Entre-temps, Michèle Isturiz avait découvert la JOCF à Bayonne par l’entremise d’un aumônier. Elle y adhéra vers 1948-1952 et fut responsable des apprenties dans la section locale. À Agen, son expérience en usine lui fit prendre la mesure de la solidarité ouvrière et elle s’investit davantage dans le mouvement jociste, assumant des responsabilités au sein de la fédération du Lot-et-Garonne. Sollicitée par la direction nationale pour devenir permanente, elle entra en fonction en septembre 1953 dans la région jociste de Toulouse, laquelle comprenait deux autres permanentes : Monique Carayol et Marie-Thèrèse Calvet ; la branche masculine comptait deux permanents (Roger Desbertrand et Michel Loubet*). Michèle Isturiz avait notamment la responsabilité de suivre les départements de l’Ariège, du Tarn et du Tarn-et-Garonne. Elle la conserva jusqu’en novembre 1957. La JOC, cherchant à faire découvrir d’autres réalités à ses responsables, l’envoya pendant un mois, en 1956, en Haute-Volta (Burkina Faso), au Sénégal et au Mali. Elle participa au grand rassemblement international de la JOC « Rome 57 » qui réunit, du 23 au 27 août 1957, 32 000 jocistes venus de 86 pays.

À la fin de son mandat de permanente, la JOC, répondant à une demande de l’épiscopat local, demanda à Michèle Isturiz de partir à Madagascar pour développer le mouvement qui était encore embryonnaire dans ce pays. Après avoir initialement refusé, ne se sentant pas à la hauteur de la tâche, elle finit par accepter et partit en novembre 1957 avec une militante fédérale jociste de Compiègne (Oise), Thérèse Boursier. Décidées toutes deux à répondre à la mission confiée, les deux jeunes femmes n’étaient pas prises en charge par la JOC française ni par la JOC internationale (JOCI) et devaient par conséquent, une fois sur place, trouver les moyens de leur autonomie. Arrivées à Tananarive (aujourd’hui Antananarivo), elles furent logées chez l’une des jocistes ayant fait partie de la délégation malgache à « Rome 57 », et Michèle Isturiz travailla comme surveillante dans une usine de chapeaux pendant un an, puis au bar de l’hôtel Colbert pendant une autre année. La tâche des deux jocistes était compliquée par le contexte politique : ce territoire d’outre-mer était sur le point d’accéder à l’indépendance (proclamée le 26 juin 1960) et les Européens y étaient alors souvent perçus avec méfiance.

Revenue passer deux mois en France au milieu de l’année 1961, Michèle Isturiz retourna seule à Madagascar – Thérèse Boursier avait fait le choix de rester en France pour se marier –, avant d’être rejointe par Marie-Louise Mongour*, permanente de la JOCF, dotée de qualités d’organisatrice. Les conditions sur place étaient plus faciles car le père Zinty, aumônier national de la JOC, avait obtenu pour elles une prise en charge financière par trois diocèses : Madagascar, La Réunion et l’île Maurice. Jusqu’à son retour en France en janvier 1964, Michèle Isturiz effectua de nombreux déplacements à travers ces différents lieux. Le mouvement jociste, également aidé par le père Le Gall, aumônier à Diego Suarez (Antsiranana), enregistra une structuration plus large, avec notamment des sections à Antananarivo, Tamatave (Toamasina), Majunga (Mahajanga) et Diego Suarez (Antsiranana). Des délégués malgaches étaient également envoyés en Europe pour participer à des rencontres internationales.

Rentrée en France au début de l’année 1964, Michèle Isturiz suivit pendant près de deux ans un stage d’enseignement ménager à Paris et obtint le certificat d’aide familiale. Elle fut alors sollicitée par l’évêque de Tamatave pour lancer un centre de « promotion féminine » (enseignement ménager, civique et social) sur la côte Est de Madagascar, à Foulpointe, près de Tamatave. Elle accepta et, prise en charge par le diocèse, créa et dirigea ce centre qui accueillait au départ environ vingt-cinq élèves. Le centre évolua progressivement jusqu’à se transformer, en 1968, en centre de formation de formatrices, puis fut dirigé par de jeunes Malgaches. En 1972, sa mission accomplie, Michèle Isturiz quitta ce centre pour renouveler l’expérience en d’autres lieux de la province de Tamatave. Elle connut alors une période difficile : confrontée à des conditions de vie et de logement très précaires, elle tomba malade, fut hospitalisée puis rapatriée sanitaire en France au début de l’année 1974.

Domiciliée dans le Ve arrondissement de Paris, Michèle Isturiz, après six mois de repos, fut d’abord tentée par un autre départ à l’étranger mais décida finalement de rester en France. Elle était liée au CCFD, qui avait financé en partie le centre de promotion féminine de Foulpointe, et son secrétaire général, l’ancien permanent jociste Alfred Martinache*, décida de l’embaucher comme animatrice au service « Jeunes ». Elle travaillait notamment avec des journalistes, des mouvements de jeunes et des enseignants pour les inciter à lancer des campagnes de sensibilisation aux problèmes du tiers-monde auprès des jeunes. Toutefois, après dix-sept années passées à Madagascar, Michèle Isturiz se trouvait en décalage avec une jeunesse influencée par les événements de 1968 qu’elle n’avait pas connus et un pays qui lui donnait l’impression de nager dans l’abondance tout en étant centré sur lui-même. En 1976, elle obtint du CCFD sa reconversion à l’accueil et au standard, fonctions qui lui convenaient mieux. Elle découvrait là, avec satisfaction, qu’une partie des Français pouvait se montrer solidaire et ouverte sur l’extérieur. Elle occupa ce poste jusqu’à son départ à la retraite en 1990. Sur le plan syndical, Michèle Isturiz milita à la CFDT durant toute la durée de son emploi au CCFD, assumant les responsabilités de déléguée du personnel et d’élue au comité d’entreprise. À partir de 1990, elle poursuivit cet engagement et fut membre du bureau et du conseil d’administration de l’Union territoriale des retraités (UTR) de Paris.

Installée dans le XIIe arrondissement en 1978, Michèle Isturiz milita sur le plan associatif après sa retraite : cours d’alphabétisation dans le cadre de la caisse d’allocations familiales (CAF) de 1990 à 1992, participation à la création de l’association « Bagagerie 188 » (création d’une consigne pour les SDF au 188 rue de Charenton, à Paris XIIe arr.) en 2008, et d’un café inter-âges deux ans plus tard. Sur le plan politique, elle avait adhéré au PS en 1990 et en était toujours membre en 2010.

Michèle Isturiz s’engagea également à l’ACO en 1975, au sein de l’équipe du Ve arrondissement (1975-1978), puis du XIIe arrondissement dont elle faisait toujours partie en 2010.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article89127, notice ISTURIZ Michèle [ISTURIZ Michelle, Anne, dite] par Éric Belouet, version mise en ligne le 7 septembre 2010, dernière modification le 7 septembre 2010.

Par Éric Belouet

SOURCES : Arch. JOCF (SG), fichier des anciennes permanentes ; certificats de travail. — Questionnaire JOC 1997. — Entretien téléphonique avec Michèle Isturiz, 3 août 2010.

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