MEUNIER Raymond, Victor. Pseudonyme à l’ELI : LEDUCQ Charles.

Par Claude Pennetier

Né le 27 juin 1897 à Paris (XIe arr.), mort le 21 mai 1937 à Sainte-Colombe-la-Campagne (Eure) ; ouvrier métallurgiste ; élève de l’École léniniste internationale (1930-1933) ; secrétaire général de la Région Paris-ouest du Parti communiste (1933-1937).

Fils d’un garçon boucher mort en 1900 et d’une vendeuse dans un magasin d’alimentation puis aux Halles (remariée en 1904 avec un façonnier), Raymond Meunier fut élevé avec deux de ses frères (ils étaient cinq enfants) dans un orphelinat religieux jusqu’à douze ans : “on nous apprenait surtout le cathéchisme” ; il était cependant titulaire du certificat d’études. De treize ans à seize ans, il allait chaque matin de 3h 1/2 à 6 h 1/2 aider sa mère à porter les paquets, avant de rejoindre son atelier de gravure du métaux.
Mobilisé pendant la Première guerre mondiale, il eut des ennuis avec la justice militaire, fin 1917, pour s’être battu avec un sous-officier. Cet incident entrait dans un contexte de tension entre les troupes et les gradés, marqué par des chants de l’Internationale et des provocations mutuelles. Il fut envoyé au peloton des prisonniers spéciaux. Il s’était marié en 1921, à Paris IVe arr., avec Yvonne Obriot, ouvrière puis femme de service, dont il eut trois enfants ; il éleva aussi une fille d’une précédente union de sa femme. Militant du Parti communiste et de la CGTU dans le XXe arr. de Paris, Raymond Meunier avait adhéré au PC, au moment de la guerre du Maroc en 1925, en envoyant un bulletin découpé dans l’Humanité. Il participa “activement à la discussion sur la lettre des 250” et mena “la lutte en particulier contre Garao et Gourget”. Membre du comité de sous-rayon et du rayon, il fut remarqué pour son activité et ses capacités. En 1926, il suivit une école de propagandiste, mais en rasion d’incidents entre Ernest Girault (l’ancien anarchiste), professeur, et la direction régionale, les cours furent interrompus. Le Parti lui demande de rejoindre le 2e rayon où avec la dirigeante Marthe Potosniak (sa compagne en 1927), il mena une lutte (souvent maladroite dira-t-il) contre les oppositions. Membre du comité régional de 1928 à 1930, il fut parmi les militants interpellés salle Reflut à Clichy à l’issue de la conférence de la Région parisienne du Parti communiste le 24 mars 1929. Candidat aux élections municipales des 5 et 12 mai 1929 dans le quartier de Belleville, il recueillit 2 920 voix au 1er tour, puis 3 175 au second. Il militait également chez les locataires de 1928 à 1930 au SRI, aux AUS et à la fédération des coopérateurs. Permanent, son salaire était de 1200 F par mois. Il était par ailleurs membre du bureau de l’Union locale unitaire des métallurgistes.
Il partit à Moscou dans la deuxième moitié de 1930 et appartint au 4e contingent, pour une durée de 3 ans, avec Charles Fréchard, René Uni et Gaston Coquel.

Un rapport sévère d’André Marty (en 1933) indique qu’il était peu apprécié de ouvriers du XXe arr. en raison de sa brutalité et de son sectarisme : “A été le compagnon de Marthe Potosniak de 1927 à son départ à l’ELI (Leduc, actuellement à l’ELI [en fait Leducq], 30 ans, ouvrier du bijouu. Vers la fin 26 au 2e rayon. S’est emparé du comité du sous-rayon du XXe SANS ETRE ELU NI NOMME. Bonne activité. En 27 entre régulièrement au comité du 2e rayon. À ce moment s’est mis avec Marthe Potoniak. Méthodes sectaires identiques aux siennes. Haï par les ouvriers au point que le smembres du Parti prétendaient se livrer contre lui à des violences physiques même au risque d’être exclus. À noter qu’au moment où il s’est mis avec Marthe Potosniak celle-ci était dirigeante de la MOE. En 1927, la cellule de l’hôpital Tenon avait comme secrétaire un élément désagrégateur (patronat ou police). Meunier, venu au nom du rayon à la cellule, non seulement ne l’a pas combattu, mais a disous la cellule. Membre de la cellule de Maison (grande cité ouvrière du 140 rue de Menilmantant XXe), son sectarisme à la cellule et dans cette Maison a détruit la cellule. Son attitude sectaire et brutale a chassé beaucoup de membres du Parti. Est rentré au comité régional en 1929. Son ami intime était le secrétaire du rayon en 1927 exclu du Parti.
UN jour, G. Joseph, secrétaire de la RP début 1928, au moment où il était à la Santé, A LAISSE ECHAPPER dans une discussion : “Meunier ? C’est un fasciste”. Naturellement on ne peut se fier à l’affirmation d’un individu aussi suspect que G. Joseph. Néanmoins, il semble clair que Meunier, sans aucun lien avec les masses, est AU MOINS un carriériste. Le fait qu’il s’est mis avec Marthe Potosniak femme beaucoup plus âgée que lui et nullement attrayante physiquement et intellectuellement, semble avoir pour but d’entrer dans son intimité de secrétaire de rayon et surtout de dirigeante de la MOE. C’est la raison des suspicions à son égard. À la question de Pauline à Sémard au moment de sa désignation pour l’ELI : “Pourquoi envoyez-vous à l’ELI un camarade aussi détesté des ouvriers du XXe à Paris ? Semard a répondu : “A son retour nous l’enverrons dans une autre région.” (rens. A Marty) “Proposition : examiner attentivement Meunier (Leduc) lors de l’épuration à l’École”. Questionner Semard sur l’activité de Meunier dans la région parisienne.”

À l’École de l’Internationale communiste, il côtoya Waldeck Rochet, qui était arrivé quelques mois plus tôt avec le 3e contingent. Ensemble, ils suivirent les mêmes cours pendant trois ans. Il semble déclare avoir découvert les ouvrages politiques, avoir appris les langues (allemand, russe) et même avoir siégé pendant deux ans comme député aux Soviets : “J’ai participé au travail, j’ai eu même des tâches particulières, pour le contrôle de la réalisation du plan dans des entreprises”. Il rentra d’URSS en février 1933, quelques mois après l’éclatement de la Région parisienne du PC (Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne) en cinq régions (Paris-ville, Paris-nord, Paris-est, Paris-sud, Paris-ouest). À sa constitution la Région Paris-ouest fut dirigée par un bureau provisoire puis la direction du PC désigna au printemps 1933 Raymond Meunier comme secrétaire général. La région ne comptait guère plus de 500 adhérents et son siège se trouvait dans les locaux de la chambre syndicale des cochers-chauffeurs ( CGTU), à Levallois-Perret (Seine).Une autobiographie communiste d’institution et une évaluation de la main de Maurice Tréand ne sont pas datées, mais elles datent de toute évidence de la période qui suit immédiatement sa nomination : « lorsque j’étais à Paris-Ville je n’ai pas eu d’auto-biographie n’ayant pas pu assister à la séance où ils ont été distribué ». Tréand le classait « A » « Bon militant sérieux. Mais nécessaire causer avec lui”. Il s’interrogeait cependant sur : 1/ sa famille ; 2/ les accusations d’être un mouchard portées par Celor ; 2/Ses relations avec Marthe Potosniak et l’influence de celle-ci sur son envoi à l’École.
Candidat au conseil général de la Seine, le 18 février 1934, dans la 2e circonscription de Colombes (Seine), en remplacement d’un conseiller décédé, Raymond Meunier obtint sur 12 082 inscrits, 867 voix contre 939 à Bernard Martin ( SFIO), 1 605 à René Casalis (radical) et 3 464 à Edmond Fillon (Alliance démocratique), qui fut élu.

La réunification syndicale, qui était en train de se réaliser, rendait impensable l’existence d’un siège d’une organisation politique dans des locaux syndicaux. Aussi, la direction de la Région s’installa-t-elle, au début de 1936, à l’ancienne mairie de Colombes. En 1936 les effectifs de la région atteignirent 33 000 membres et son siège fut installé à Boulogne-Billancourt (Seine) au début de 1937.

Devenue par ses effectifs, la plus puissante des régions du PC, la Région Paris-ouest fut chargée d’aider les militants du Calvados. C’est à ce titre que Meunier se rendit dans ce département et participa à une réunion électorale le 20 mai 1937 à Falaise. C’est en revenant à Paris qu’il trouva la mort, sa voiture ayant capoté dans un fossé. Il était marié (depuis 1920 — à Paris, IVe arr.) et père de trois enfants.

Pendant deux jours, son corps fut exposé au siège de la Région puis à la Maison des Métallurgistes à Paris (XIe arr.). Des dizaines de milliers de personnes participèrent à ses obsèques le 25 mai. Il fut inhumé au cimetière du Père-Lachaise.

Il fut remplacé par Jean Baillet* en qualité de membre du secrétariat régional.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article89472, notice MEUNIER Raymond, Victor. Pseudonyme à l'ELI : LEDUCQ Charles. par Claude Pennetier, version mise en ligne le 30 septembre 2010, dernière modification le 30 septembre 2010.

Par Claude Pennetier

SOURCES : RGASPI, 495 270 8463 : autobiographie, fin 33, 9 pages ; questionnaire ELI 1930 (avec phot)o ; évaluation de Marty ; 517 1 998 et 517 1 1111. — Arch. Dép. Seine, DM2, n° 72. — L’Humanité, 6 et 13 mai 1929, 19 février 1934, 22, 23, 24, 25 et 26 mai 1937. — Renseignements recueillis par Louis Bonnel et Jean Maitron. — État civil.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable