GUYOT Édouard

Par Jacques Girault

Né le 19 décembre 1884 à Arras (Pas-de-Calais), mort le 20 février 1948 à Châtenay-Malabry (Seine) ; professeur ; collaborateur au quotidien La Volonté ; militant radical-socialiste.

Fils d’un négociant originaire de l’Allier, Édouard Guyot fréquenta le collège Rollin à Paris. Bachelier en 1902, il obtint une licence ès lettres à la Sorbonne en 1906 et une licence en droit, l’année suivante.

Docteur en droit en 1908 à Paris avec une thèse (La durée du travail dans les mines de Grande-Bretagne), il fut reçu à l’agrégation d’anglais en 1909. Il enseigna au lycée de Beauvais puis, après un congé en 1913-1914 pour soutenir sa thèse d’Etat, à Paris, au lycée Pasteur en 1914, puis au collège Rollin en 1915.

Sa thèse de doctorat d’État en 1913 (Le socialisme et l’évolution de l’Angleterre contemporaine (1880-1911 , Paris, 1913, Félix Alcan, 543 pages) portait sur l’étude du socialisme et du mouvement ouvrier anglais. « Elle rompait avec la tradition qui voulait que le candidat au doctorat s’attachât à l’étude purement littéraire » (A.J. Farmer). Il publia, en 1917, un ouvrage (L’Angleterre : sa politique intérieure, Paris, Delagrave) préfacé par son ami H.G. Wells auquel il devait consacrer un ouvrage paru en 1920 chez Payot. La connaissance de Jean Longuet du mouvement ouvrier britannique l’en avait rapproché. D’autre part, Longuet connaissait bien Wells (témoignage de son fils, R. Longuet).

Edouard Guyot devint professeur d’anglais à la faculté des lettres de Rennes en 1920. Deux ans plus tard, il était élu à la Sorbonne sur la chaire de littérature et de civilisation de l’Angleterre contemporaine qui venait d’être créée.

Il s’était marié en 1907 avec Marthe, Jeanne Renesson (Paris VIe, 6 janvier 1878-Paris VIIIe, 4 octobre 1961), pianiste, directrice de l’Institut international de musique dans les années 1930 ; il s’installa à Châtenay-Malabry (Seine), 54, puis 70, rue Anatole-France où il vivait selon le recensement de 1926, avec son épouse et une domestique.

Edouard Guyot collaborait au quotidien d’esprit radical-socialiste La Volonté, fondé en 1925 qui avait des liens avec Caillaux, puis avec Tardieu. Ce journal, après avoir soutenu « les Jeunes Turcs » du Parti radical, préconisait, en 1929-1930, la concentration entre radicaux et modérés. Dans la rédaction de ce quotidien, il avait côtoyé Longuet qui collaborait, lui aussi, à La Volonté.

En 1928, il jouait un rôle important dans le fonctionnement de la section de la Ligue des droits de l’Homme de Châtenay-Malabry et prononçait par exemple une conférence sur le « réveil démocratique en Angleterre », en janvier 1928. Lors d’une réunion de propagande avec Victor Basch, son épouse, en février 1929, donnait un récital de piano. Pendant la campagne électorale de 1929, il signait l’éditorial de l’hebdomadaire local de gauche, Le Phare de Sceaux, le 27 avril, sous le titre « L’Union nécessaire ». Il y préconisait notamment, contre l’Union nationale conservatrice, le rassemblement des partisans de la laïcité et de la démocratie. Candidat radical-socialiste, sur la liste d’entente républicaine et socialiste, conduite par Jean Longuet, il fut élu, dès le premier tour, le 5 mai, avec 347 voix sur 774 inscrits et 689 votants. Il était membre de la seule commission de l’instruction. Son épouse présidait, avec le docteur Le Savoureux*, le conseil d’administration du Patronage Voltaire à sa création, le 22 février 1930 et conserva cette responsabilité pendant quelques années. Il fut présent à 18 séances sur les 44 du mandat.

Nationalement et localement, les divergences se manifestaient au sein des radicaux-socialistes. À Châtenay-Malabry, la majorité des conseillers sortants refusaient une forme d’union pouvant évoluer jusqu’à l’alliance avec les communistes. Seuls trois sortants, dont Guyot, se représentaient en 1935, sur la liste conduite par Longuet alors que les autres, derrière l’adjoint Maurant* s’alliaient avec la droite locale. Le 5 mai, Guyot obtenait 359 voix sur 953 inscrits et 840 votants et était élu, au deuxième tour, avec 425 voix sur 855 votants. À nouveau membre de la commission de l’instruction, des œuvres scolaires et post-scolaires, des fêtes, il lança, aux côtés de Jean Paulhan* le cercle des amis de la Bibliothèque — le futur cercle Voltaire — en novembre 1935.

Edouard Guyot, président du jury d’agrégation, poursuivait son activité professorale après avoir contribué à la mise en place du nouveau régime de la licence par certificats. Ses cours, parfois publiés au Centre de documentation universitaire, portaient aussi bien sur l’Angleterre, l’Empire britannique, que sur le contenu du certificat d’études pratiques dont il avait la charge. Il avait publié le premier tome d’une biographie de John Galsworthy, chez Didier en 1933 et avait traduit l’ouvrage de F. York Powell et T.F. Tout, Histoire de l’Angleterre des origines à nos jours, Paris, Payot, Bibliothèque historique, 1932, 1 295 pages. Ses connaissances juridiques, son intérêt pour les législations étrangères lui valurent plusieurs missions dans le monde, notamment en Inde.

Au retour d’une mission officielle en Extrême-Orient, Guyot faisait le récit de ce voyage au cercle Voltaire à Châtenay-Malabry en mars 1937. Après n’avoir été que trois fois présent sur 17 séances, il donna sa démission du conseil municipal, le 7 février 1938.

Resté en poste pendant la Seconde Guerre mondiale, affichant de fortes réserves par rapport au gouvernement et des sympathies par rapport à la Résistance à partir de 1943, Guyot devint la cible de la Milice et le 19 juin 1944, en sortant d’une réunion des professeurs à la Sorbonne, il fut matraqué par des miliciens. Il s’en suivit une congestion cérébrale et une longue rééducation. Dans L’Université libre, parut un article d’Albert Pauphilet, directeur de l’ École normale supérieure sous la titre « une autre victime de la Milice : Édouard Guyot ».

« Son attitude pendant la guerre fut exemplaire » (A.J Farmer). Son état de santé se détériora. En congé de maladie depuis novembre 1944, il publia en 1946 La tragédie d’Hamlet, prince du Danemark, chez Payot. Outre le texte anglais de Shakespeare, il en donnait une nouvelle traduction.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article94511, notice GUYOT Édouard par Jacques Girault, version mise en ligne le 2 novembre 2010, dernière modification le 9 juillet 2021.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F17/ 27452. — Arch. Dép. Seine, DM3 46. — Arch. com. Châtenay-Malabry. — Presse locale. — Sources orales. — Article nécrologique rédigé par A.J. Parmer, Annales de l’Université de Paris, 1948, p. 196. — S. Berstein, Histoire du Parti radical, Paris, Presses de la FNSP, 2 tomes, 1980 et 1982. — Jacques Girault, Militants de Châtenay-Malabry entre les deux guerres, GRECO 55/CNRS, 1987.

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