HERMAN Jules, Eugène

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 12 décembre 1879 à Paris ; ouvrier boucheur à l’émeri de Paris ; syndicaliste CGT, puis CGTU, puis CGT ; secrétaire de la Fédération CGTU des verriers.

Dès 1905, Jules Herman fut le secrétaire du syndicat des boucheurs à l’émeri de la région parisienne. En 1912, il fut le délégué du syndicat au congrès de la fédération nationale des travailleurs du verre, initialement prévu à Fourmies (Nord), mais qui se tint à Chimay, en Belgique, pour permettre à Charles Delzant, son secrétaire, qui s’y était exilé suite à une condamnation, d’y participer. La proposition de réduction de la cotisation fédérale qu’il porta au nom de son syndicat, ne fut pas retenue par le congrès, bien que celle-ci soit l’une des plus fortes de toutes les cotisations fédérales dans la CGT. Il y porta aussi la revendication d’une représentation des syndicats proportionnelle au nombre de syndiqués. Car dès avant la 1ère guerre mondiale, les relations entre les parisiens et la fédérations étaient compliquées.

En 1919, il était domicilié rue Claude-Vellefaux dans le Xe arr.. En septembre il anima une grève des boucheurs de l’atelier Saumont, 41 rue de Turenne dans le IVe arr.

Lors du Congrès de 1919 de la fédération, réuni du 3 au 6 septembre 1919 à la Grange-aux-Belles, il présida la 3e journée, avec comme assesseur Dillard*, des verriers d’Incheville (Seine-inférieure), et Berteaux* des verriers de Sars-Poteries (Nord). En 1920, il fut délégué au congrès de Montluçon du 23 au 26 septembre, et il fut membre de la commission de vérification des mandats, avec Royer* de Vénissieux (Rhône), Gandiol, du syndicat du verre d’Albi (Tarn), et Marissal d’Hirson (Aisne).

En début 1921, les choses se tendirent à la suite de la réunion du Comité confédéral national, qui s’était prononcé pour l’exclusion des syndicats se prononçant pour l’adhésion à l’internationale de Moscou. Lors du Comité national de la fédération, tenu du 21 février, 1er et 2 mars à Paris, avec François Sue*, Rivolier* et Houg*, Herman déclara ne pas accepter un ordre du jour similaire à celui de la confédération, qui fut présenté par Delzant. Il expliqua être pour la liberté d’opinion, et demanda au CN de protester avec lui contre cet ordre du jour. Avec Houg*, Rivollier*, Sénéchal*, Sue*, et Vuilleminot*, il vota donc contre le texte. Par la suite il démissionna de son poste de secrétaire de syndicat des boucheurs à l’émeri, et y fut remplacé par René Jumel*. Il resta cependant à la fédération.

Les 26 et 27 août 1921, il participa au comité national de la fédération. Delzant présenta un ordre du jour condamnant la baisse des salaires, mais qui se terminait par une affirmation de l’« attachement indestructible » de la fédération à la CGT. Guichard* et Flamme* s’abstinrent sur un ordre du jour, estimant qu’en affirmant que cet affirmation d’un « attachement indestructible à la CGT » en réduisait la portée et lui donnait un caractère tendancieux. Godeau, Sue, Bordel* et Herman votèrent contre, marquant leur désaccord vis à vis de la CGT qui avait décidé d’exclure les syndicats adhérents à l’internationale syndicale, section de l’Internationale communiste. Schneider*, Brion*, Denizot*, Adam*, Bastide*, Mollard*, Guengnot* et Marlin* votant pour. Dans la suite de cette réunion, avec Bordel, Godeau, et Sue, Herman vota contre le renouvellement des mandats de Delzant et Monnier, comme délégués de la fédération à la CA de la CGT, car ceux-ci refusaient de rompre avec l’orientation scissionniste confédérale.

En janvier 1922, La Voix des Verriers annonçait que le syndicat des boucheurs à l’émeri de Paris était le fer de lance de la scission dans la profession en cherchant la création d’une 2e fédération du Verre. D’après elle, L’Humanité avait informé ses lecteurs qu’Herman son secrétaire était à la disposition des syndicats du verre pour leur envoyer des cartes et des timbre de la nouvelle confédération, la CGTU. Charles Delzant, dans ce numéro de La Voix des Verriers, tenta d’endiguer la scission, en marginalisant cette initiative, et en signalant que le syndicat des boucheurs à l’émeri de Paris n’était pas un syndicat de verriers mais un syndicat de « similaires » qui avait toujours refusé de fusionner avec les verriers. Il rappelait aussi que la fédération du verre n’avait exclu personne, en opposition avec les décisions confédérales. Pour lui, les diviseurs c’étaient les futurs unitaires. Il est vrai que jusqu’à ce moment, le rapport de forces entre les deux tendances au sein de la fédération était équilibré mais précaire, les majoritaires ayant rassemblé 32 voix au précédent congrès confédéral de Lille (août 1921) — en baisse — les minoritaires 30 voix — en hausse. La manœuvre de Delzant fit que dans le verre, ce furent les unitaires qui passèrent pour des scissionnistes.

Le congrès constitutif de la Fédération CGTU des verriers, tenu à Saint-Étienne les 24-25 juin 1922, élut François Süe et Jules Herman comme secrétaires et ce dernier comme trésorier (par 23 voix contre 16 à Philibert Rivollier, sur 41 votants). Le IIe congrès (Aniche, 25-27 juillet 1924) le maintint dans ces fonctions par 81 voix contre 10 et 23 abstentions. C’est lui qui présenta le rapport financier au IIIe congrès, réuni à Vierzon du 29 au 31 juillet 1926. Sa Fédération le délégua au IIe congrès de la CGTU (Bourges, novembre 1923) et à tous ceux qui suivirent. Les comptes rendus déformèrent plusieurs fois l’orthographe de son nom en Herman ou Hermann.

Cependant, au sein de la fédération du verre, deux courants se distinguèrent bientôt : les partisans de l’autonomie syndicale par rapport au politique, et le courant communiste. Dans la fédération du verre c’est la première tendance qui dirigea la fédération. Herman, était de ceux-là. Bientôt la direction fédérale unitaire du verre se démarqua vis-à-vis de la ligne de la CGTU. En septembre 1930, à la veille du congrès de Reims, et au cours du congrès, Sue, le secrétaire général, et lui-même subirent une campagne de dénigrement de la minorité communiste, relayée dans l’Humanité. S’il fut réélu, c’est après avoir lui même présenté sa candidature contre la décision de son syndicat de ne pas le représenter. Cette situation s’aggrava avec la publication le 30 novembre suivant, de « l’appel des 22 », syndicalistes CGT, CGTU et autonomes, pour la réunification de la CGT. Sue et Herman rejoignirent cet appel, rendant exécrables les relations avec le bureau confédéral. En 1931, Sue et Herman, rejoints par Paul Vuilleminot, secrétaire des syndicats parisiens et pourtant communistes, furent accusés par l’Union régionale CGTU de la Seine d’organiser une scission de la fédération. Ils passèrent cette crise avec difficulté, la fédération restant affiliée à la CGTU.

En septembre 1933, au congrès de Paris, réuni à La Bourse du Travail, Sue quitta le secrétariat fédéral. Dans le débat Herman expliqua les raisons qui l’avait conduit à adhérer au comité des « 22 », mais Tillon, représentant la confédération, disant constater une amélioration dans les rapports entre Herman et le bureau confédéral, et bien que le congrès eut voté, par 35 voix contre une, une résolution condamnant la position des « 22 », il fut réélu secrétaire fédéral.

Le 15 décembre 1935, Herman conduisit la délégation unitaire à la commission mixte des verriers, réunie rue Lafayette à Paris, chargée de finaliser les discussions ouvertes le 27 octobre en vue de la fusion entre les deux fédérations du verre. Cette commission était composée coté unitaires, d’Evrard*, Herman, Soissons*, et Simon*, et coté confédérés par Delzant, Pahour*, Ryby* et Golinveau*. A l’issue de cette réunion Herman et Delzant furent désignés pour former le bureau provisoire de la fédération réunifiée, constituer une commission exécutive provisoire avec des militants de la région parisienne élargie, et travailler avec celle-ci, jusqu’au congrès prévu en avril 1936, ces structures provisoires devant être dissoutes à l’ouverture du congrès.

Herman participa également au congrès de fusion de Toulouse (mars 1936). Un rapport de police de février 1935 estimait à 1 400 adhérents les effectifs de la Fédération unitaire de l’industrie du Verre dont il assurait toujours le secrétariat. La Fédération réunifiée du Verre le garda comme secrétaire pendant quelques mois, mais la mort le surprit en fin novembre 1936. Ses obsèques eurent lieu le 6 décembre 1936. Il fut incinéré au cimetière du Père-Lachaise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article94972, notice HERMAN Jules, Eugène par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 2 novembre 2010, dernière modification le 20 septembre 2019.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat., F7/13586, Bourges, novembre 1923. — Arch. PPo. 300, février 1935. — L’Humanité, 15 septembre 1919. — Comptes rendus des congrès de la Fédération unitaire du Verre et des congrès nationaux de la CGTU. — La Voix des Verriers, mai 1919 ; février, septembre novembre 1920, mars, septembre 1921, Janvier 1922 (BNF). — L’Humanité, 2 août 1921, 31 juillet 1926, 21 mars 1931, 22 septembre 1933, 23 septembre 1933, 6 février 1934, 3 novembre 1935, 18 décembre 1935, 20 décembre 1935, 4 décembre 1935, 7 décembre 1936, Gallica.fr. — Notes de Gilles Pichavant.

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