Par Françoise Olivier-Utard
Né le 3 février 1923 à Bischheim (Bas-Rhin), mort le 3 septembre 1999 à Schiltigheim (Bas-Rhin) ; ouvrier ; secrétaire du syndicat CGT des cheminots de Bischheim (1953-1956) ; secrétaire général adjoint de l’Union des syndicats CGT de cheminots d’Alsace et de Lorraine (1954-1956) ; secrétaire fédéral chargé de la direction de l’Union d’Alsace et de Lorraine de 1956 à 1972 ; membre du bureau fédéral de la CGT de 1956 à 1963 et de 1965 à 1973, du secrétariat fédéral de 1963 à 1965 ; secrétaire des cheminots retraités de 1979 à 1983 ; membre du bureau fédéral du PCF du Bas-Rhin de 1953 à 1959, puis membre du comité fédéral de 1959 à 1964.
Fils d’un couple de tailleurs qui eut trois enfants - le père était catholique et la mère protestante -, Charles Werling fit ses études primaires à Bischheim jusqu’au certificat d’études qu’il obtint avec la mention Bien. Il commença alors un apprentissage chez un bijoutier, Holl, qui avait un atelier de 50 personnes rue Baldung-Grien à Strasbourg.
En 1939 la famille fut évacuée à Saint-Laurent-sur-Gorre (Haute-Vienne), et Charles Werling trouva une place à l’Arsenal de Limoges (Haute-Vienne). La famille Werling rentra à Strasbourg annexée en 1940, sauf le frère aîné, qui s’était marié à Limoges. Les propriétaires juifs des Établissements Holl avaient émigré aux Etats-Unis. Charles Werling fut embauché d’office dans l’industrie de guerre allemande, aux ateliers de réparation de moteurs d’avions (Usines Junkers). Il fut contrôleur de pièces jusqu’à son incorporation au service du travail obligatoire du Reich (RAD), le 6 mai 1942. Charles Werling fut envoyé à Ratisbonne (Bavière) pendant trois mois et peu après incorporé de force dans la Wehrmacht, en mars 1943. Un enchaînement de circonstances lui fut favorable : le train qui l’emmenait à Berlin fut dévié sur Varsovie. Charles Werling suivit l’entraînement au camp de Radom-Volianov. Un officier allemand compréhensif le nomma dans un bataillon disciplinaire à Essen pour lui éviter le regroupement des Alsaciens, systématiquement envoyés sur le front de l’Est. Il subit les bombes d’ammoniaque, fut replié en Belgique, tomba malade. Il déserta, en uniforme allemand, pour se rendre à Levallois-Perret (Seine), chez un oncle. Il participa à la libération de Levallois parmi les FFI et défila sur les Champs-Élysées. Il s’engagea dans la division Ile de France, du général Kœnig. Son frère appartint à la Brigade Alsace-Lorraine. Au début de l’hiver 1944, il se retrouva dans le Bas-Rhin sur la ligne Nordhouse-Gerstheim. Ensuite il fut versé au 4e bataillon de chasseurs à pied, qui occupa le Palatinat. La classe 1923 n’étant pas démobilisée, il dut rester dans l’armée française jusqu’au 31 décembre 1945 mais refusa de partir pour l’Indochine.
Le 10 janvier 1946, il fut embauché à la Comessa, à Schitigheim (Bas-Rhin), et suivit une formation accélérée en charpente métallique. Son futur beau-père, Eugène Heinerich, travaillait comme cheminot aux ateliers SNCF de Bischheim. Il était syndicaliste, communiste et adjoint au maire de Schiltigheim. Il lui conseilla de passer le concours de la SNCF le 15 juillet 1947. Charles Werling fut embauché comme auxiliaire aux ateliers de Bischheim. Il se syndiqua à la CGT et milita tout de suite. Il fut chargé de l’encaissement des cotisations, et fut élu délégué à la sécurité. Il adhéra au Parti communiste au moment de la scission syndicale, en décembre 1947.
La grève des cheminots de 1953 le surprit en vacances dans le Midi. Il eut beaucoup de mal à regagner Strasbourg afin de s’y déclarer gréviste. La grève dura trois semaines, mais les statuts et l’âge de départ à la retraite ne furent pas remaniés. Chaque jour de grève fut négocié contre un jour de congé.
En 1953, il remplaça Georges Mattern comme secrétaire du syndicat CGT de Bischheim et le 10 novembre 1954, il le remplaça également comme secrétaire général adjoint de l’Union des syndicats CGT de cheminots d’Alsace et de Lorraine. Il était aussi en 1954 secrétaire départemental du Bas-Rhin. Après avoir suivi un stage de formation à Billancourt, il succéda en décembre 1955 à Émile Schmitt comme secrétaire fédéral chargé de la direction de l’Union des syndicats CGT de cheminots d’Alsace-Lorraine en 1956. Il devint permanent. Il fut directeur de la publication du Cheminot, organe de l’USCCAL-CGT de mars 1956 à avril 1974, et de nouveau à partir de novembre 1981. Il fit partie du bureau de la Fédération nationale CGT, de 1956 à 1963, du secrétariat fédéral de 1963 à 1965, et à nouveau membre du bureau fédéral de 1965 à 1973.
Il fut aussi membre du bureau fédéral du Parti communiste du Bas-Rhin de 1953 à 1959, puis membre du comité fédéral de 1959 à 1964. Il fut candidat aux élections municipales de 1956, à Schiltigheim. Il présida le 6 juin 1956, dans le cadre de la Semaine d’action pour la Paix, et à l’occasion du congrès régional de l’Union, au restaurant de la Maison rouge à Schiltigheim, un meeting « pour la paix en Algérie », auquel n’assistèrent que 120 personnes.
En 1972, il apprit qu’il ne serait plus élu permanent à la CGT, du fait de la restructuration des régions à la SNCF. Son long mandat de permanent avait aussi suscité quelques critiques personnelles. Dans la violence des réactions des plus jeunes syndiqués, les difficultés que traversait le syndicalisme lui furent attribuées. Il est clair qu’un changement de génération s’opérait en même temps qu’un changement dans la structure de la SNCF. Il redevint cheminot, puis fut désigné surveillant de travaux au service de l’équipement de Strasbourg, l’année suivante. Il prit sa retraite en 1979.
Il s’occupa alors des retraités jusqu’en 1983, au bureau régional de la CGT, et, du côté politique, du secrétariat et de la trésorerie de la section communiste de Bischheim.
Marié le 2 août 1947 à Antoinette Heinerich, employée de commerce, il fut père de deux filles ;
Par Françoise Olivier-Utard
SOURCES : Arch. Dép. Bas-Rhin, 544 D 11 et 152. — Arch. Fédération CGT des cheminots. — La Tribune des cheminots. — Le Cheminot, décembre 1954. — Comptes rendus des congrès fédéraux. — Claude Lorentz, La presse alsacienne du XXe siècle. Répertoire des journaux parus depuis 1918, BNU, Strasbourg, 1997. — Notes de Jean-Pierre Bonnet, de Georges Ribeill et de Pierre Vincent. — Entretien avec Charles Werling, 17 septembre 1998. — État civil.