ZIMMERMANN Lucien

Né dans une commune francophone de la vallée de la Bruche, Lucien Zimmermann grandit dans une famille de trois enfants. Son père, originaire d’Ernolsheim-sur-Bruche (Bas-Rhin), était facteur et, durant ses loisirs, travaillait la terre. Sa mère était originaire de Barembach, où son père était boulanger-épicier. C’était une femme « très active, très entreprenante et très patriote ». Lucien Zimmermann dit avoir vécu dans « une famille humble et active et toujours très solidaire et dans un environnement religieux catholique omniprésent ». Il passa son certificat d’études en 1940, peu avant l’arrivée des Allemands. Sa sœur, élève de l’École normale de Sélestat évacuée en 1939 à Bergerac (Dordogne), refusa de rentrer en Alsace nazifiée. Son frère aîné fut obligé de faire le Reichsarbeitsdienst (RAD, Service du travail obligatoire du Reich), mais, à son retour, sa mère organisa sa désertion, ainsi que celle de plusieurs autres jeunes gens du village et de la région. En représailles, les parents furent arrêtés le 27 octobre 1943 : après un séjour au « camp de rééducation et de sûreté » de Schirmeck (Bas-Rhin), ils furent transplantés à Breslau (Basse-Silésie). Le jeune Lucien, apprenti dans une compagnie d’assurances à Strasbourg, fut hébergé par une tante à Barembach, jusqu’à son incorporation à 15 ans, le 30 août 1944, comme Flakhelfer (auxiliaire de DCA) en Tchécoslovaquie. Il fut envoyé ensuite à Breslau où ses parents étaient internés. C’est là qu’il fit la connaissance d’un requis du STO, originaire de Lyon et ancien jociste, qui lui donna le livre Pêcheur d’hommes. La famille rentra d’Allemagne le 4 juin 1945.
Au cours complémentaire de Schirmeck, il passa le brevet élémentaire et le BEPC. Il se présenta ensuite au concours de garde des Eaux et forêts et à celui d’élève bureau- exploitation de la SNCF. Reçu aux deux concours, il opta pour la SNCF. En 1949, il fit encore un complément de service militaire à Metz, mais il était devenu très antimilitariste. Il se réclamait du modèle de Gary Davis, le premier « citoyen du monde ».
Affecté à la gare de Schirmeck, syndiqué à la CFTC, il fut élu au comité directeur de l’Union des syndicats chrétiens de cheminots d’Alsace et de Lorraine. En 1953, lors de la reprise du travail décidée par la CFTC, il se remit en grève, tout seul, en étant le plus jeune des employés de la gare. Vers 1960, il assuma la responsabilité de secrétaire du syndicat CFTC des cheminots de Schirmeck. Le 11 février 1965, lors du congrès extraordinaire de l’Union, il fit partie de la minorité ralliée à la CFDT. Vers la fin de 1964, il avait participé à la fondation de l’Union locale CFDT de Schirmeck, dont il devint le président. Cette UL aida à la constitution de sections syndicales dans de nombreuses entreprises de la vallée industrielle. La grande grève de 1969 chez Jeudy fut très dure et dépassa tout ce qu’on avait pu voir depuis 1936. La grève de quatre semaines de Controls-France en 1972 faisait suite à 150 licenciements. Le conflit, contre le travail au rendement, chez Coframaille dura également quatre semaines et se termina par un succès, mais l’usine ferma quelques années plus tard et tout le personnel fut licencié.
Ces actions locales n’empêchèrent pas Lucien Zimmermann de continuer à participer aux réunions du comité national de la Fédération CFDT des cheminots et à celles de l’UD CFDT du Bas-Rhin (jusqu’en 1970). Il fut également maire de Barembach de 1977 à 1989. Il se présenta aux élections cantonales de 1967 (et se désista pour le candidat FGDS), puis en 1973 et 1985, comme candidat du Parti socialiste.
Lucien Zimmermann explique son engagement syndical et politique à partir de la découverte de la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) à Breslau, puis grâce à sa lecture, durant plusieurs décennies, de Témoignage Chrétien, enfin par son adhésion à l’Action catholique ouvrière.