JOUVANCE Emmanuel

Par Claude Geslin et Jean-Luc Pinol

Né le 16 octobre 1889 à Campbon (Loire-Inférieure), mort le 28 septembre 1947 à Pornichet (Loire-Atlantique) ; métallurgiste ; militant syndicaliste et socialiste de Saint-Nazaire (Loire-Inférieure).

Emmanuel Jouvance exerça des responsabilités dans le syndicat des métallurgistes de Saint-Nazaire dès 1915. Il connut, de 1918 à 1923, les commissions mixtes départementales et y participa en compagnie des principaux responsables métallurgistes du département (Blancho, Ribrac, Péneau...). Leur succès entraîna de nombreuses adhésions et l’on évaluait à plus de 4 000 le nombre des métallurgistes syndiqués dans le département en 1920. Ceux-ci restèrent fidèles au syndicat après la grève de 1920. En revanche, la scission réduisit, à Saint-Nazaire, le nombre des adhérents à une centaine en 1922. Jouvance participa aux côtés de Blancho à la reconstitution du syndicat de Saint-Nazaire. Dès 1923, les effectifs étaient suffisamment nombreux pour empêcher le patronat d’appliquer une diminution de salaires et pour obtenir la signature d’une convention. En 1924, les effectifs doublaient. En 1925, Jouvance remplaça Blancho devenu maire de Saint-Nazaire, à la tête du syndicat. Il mena le combat pour l’amélioration constante de la convention que le syndicat signait tous les deux ans avec le patronat (primes de travaux salissants, majoration des heures supplémentaires, augmentation des salaires, primes de vie chère qu’il s’efforçait de faire intégrer progressivement dans les salaires, etc).

En 1925, il avait aussi remplacé Blancho comme secrétaire de l’Union locale de Saint-Nazaire. Il créa de nombreux syndicats chez les ouvriers de l’énergie électrique, les ouvriers du gaz, les ouvriers des Ponts et Chaussées, les ouvriers de Donges (Loire-Inférieure), permettant aux ouvriers de ces professions d’obtenir des statuts et des conventions qui leurs étaient favorables. Il fut amené à diriger cinq grèves particulièrement importantes de 1925 à 1935. Trois d’entre elles furent couronnées de succès : la grève de Trignac (1926), la grève des charbonniers de Saint-Nazaire (qui dura soixante trois jours) puis celle des ouvriers de l’usine Kuhlman à Paimbœuf (quarante-trois jours). Il organisa et anima la marche des chômeurs de Saint-Nazaire sur Nantes en juin 1933. Poursuivi en correctionnelle pour avoir ouvert une souscription en faveur des condamnés du 1er Mai 1934, il fut condamné à 50 F d’amende avec sursis. Membre influent de l’Union départementale CGT (il en fut trésorier adjoint en 1925-1926 et de 1928 à 1940, et membre de la commission administrative pendant plusieurs années, notamment de 1927 à 1932) il présenta les thèses des syndicalistes de Saint-Nazaire sur la presse régionale syndicaliste et politique lors des congrès de 1930 et 1931. En 1930, il proposa que Le Travailleur de l’Ouest, organe de la Fédération du Parti socialiste SFIO de Loire-Inférieure publié à Saint-Nazaire, devienne le journal officiel de l’UD. Il se heurta surtout à l’opposition des syndicats nantais et de Rochet, secrétaire de l’Union locale de Nantes. Finalement, sur proposition de Péneau (autre Nantais mais secrétaire de l’UD), la question fut renvoyée aux syndicats pour étude. En octobre 1931, au XVIIIe congrès de l’UD, Jouvance présenta la même thèse. Il fut combattu cette fois par Rouaud, secrétaire du syndicat des métallurgistes de Nantes. Le congrès essaya de concilier les deux thèses en invitant les syndicalistes de Saint-Nazaire à mieux collaborer au journal syndical Le Réveil syndicaliste (organe des syndicats nantais) et en engageant les syndicalistes à proposer leur collaboration au Travailleur de l’Ouest. En fait, Jouvance avait échoué devant l’opposition des Nantais.

Dès 1934, il parvint à réunifier les syndicats métallurgistes de Saint-Nazaire (les ex-CGTU entrant dans la CGT). Il resta secrétaire du syndicat unifié jusqu’en novembre 1936. Il démissionna alors (il fut remplacé par Marcel Blanchard) pour occuper le poste de secrétaire permanent de l’Union locale de Saint-Nazaire qui venait d’être créé (auparavant, seul le syndicat des métallurgistes avait un permanent). Il le resta jusqu’en 1940.

Lors du IXe congrès de la Fédération CGT des Métaux en 1929, Jouvance fut élu délégué de la 18e région fédérale (Loire-Inférieure) ; son suppléant était Péneau. À ce titre, il participa au comité fédéral. Il conserva cette fonction jusqu’en 1935, date à laquelle il fut élu à la commission administrative fédérale. Lors du XIIe congrès fédéral, en 1935, il fut désigné pour négocier la fusion avec la Fédération unitaire. Il déclara à cette occasion : « je veux bien encore tendre la main à tous ceux qui hier nous ont tant dénigrés, je veux bien faire toutes les concessions, aller aussi loin que cela est possible, mais je veux les surveiller, je veux qu’ils me donnent le droit de les surveiller » (compte rendu du congrès, p. 228). Après la réunion du comité national interfédéral du 1er mars 1936 à Toulouse, Jouvance fit partie de la commission administrative paritaire. Après le congrès d’unité en 1936, il fut membre de la commission exécutive fédérale. Le XIVe congrès fédéral, en 1938, le confirma dans cette fonction.

Jouvance fut aussi conseiller prud’homme entre les deux guerres, président local de la caisse d’assurances sociales Le Travail et membre du bureau du comité local du Front populaire (au nom des syndicats).

Militant du Parti socialiste SFIO, il fut élu conseiller municipal de Saint-Nazaire en 1925 et réélu en 1929 et 1935. Il fit partie en 1937-1939, de la commission exécutive de la Fédération socialiste de Loire-Inférieure.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article97026, notice JOUVANCE Emmanuel par Claude Geslin et Jean-Luc Pinol, version mise en ligne le 2 novembre 2010, dernière modification le 2 novembre 2010.

Par Claude Geslin et Jean-Luc Pinol

SOURCES : Arch. Dép. Loire-Atlantique, série M. — Le Travailleur de l’Ouest, 1925-1940 — Comptes rendus des congrès de la Fédération CGT des Métaux, 1929, 1931, 1933, 1935, 1936, 1938. — État civil de Campbon.

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