BARETTE Raoul, Sosthène

Par Jean Maitron, Claude Pennetier, Georges Clause

Né le 11 janvier 1891 à Coulonces (Calvados), mort le 9 octobre 1969 à Paris (XVe arr.) ; ouvrier puis agent d’assurances ; secrétaire de la Région communiste du Nord-Est ; membre du comité central (1926-1929).

L’Humanité, 12 janvier 1928.

Ouvrier syndiqué dès 1909, Raoul Barette n’adhéra à aucune organisation avant le congrès de Tours (décembre 1920). Il rejoignit alors le Parti communiste et devint l’animateur de la section ARAC de Saint-Quentin (Aisne). Considéré comme responsable des incidents survenus à l’occasion du « Bal Bicolore » de cette ville, il fut condamné à un an de prison le 13 mars 1924. La Fédération communiste le présenta comme candidat d’amnistie aux élections législatives du 11 mai 1924. Il obtint 10 577 voix et arriva en tête de la liste du Bloc ouvrier paysan. Les portes de la prison d’Amiens s’ouvrirent en juin 1924. Barette reprit ses fonctions militantes et fonda à la fin de l’année le journal L’Exploité de l’Aisne. Les premiers résultats étaient excellents : le premier numéro s’était vendu à trois mille exemplaires. Mais sous la pression du patronat local, l’imprimeur se déroba. On tenta alors de trouver un imprimeur à Paris, mais les difficultés étaient telles que l’organisation communiste de l’Aisne, qui en discuta au congrès de Tergnier, renonça au journal. Celui-ci fut sauvé par une entente des sections des trois départements de l’Aisne, des Ardennes et de la Marne qui allaient constituer la Région communiste du Nord-Est, et par une combinaison avec La Dépêche de l’Aube, journal du Parti à Troyes. Les deux journaux seraient imprimés à Troyes, deux pages auraient la même composition, deux autres seraient différentes et régionales. Mais Troyes était trop loin de l’Aisne ; il s’ensuivit des retards qui rendirent la combinaison impraticable, même après avoir fait passer la rédaction à Reims en mars 1925 pour la rapprocher de l’imprimerie.

C’est pour cette raison que Barette était venu s’installer à Reims où il cumulait les fonctions de rédacteur et de gérant du journal, assumant en outre d’importantes responsabilités avec l’Ardennais Vassart dans les organismes de la région communiste du Nord-Est (Aisne, Ardennes, Marne), où il était délégué à la propagande puis secrétaire général en juin 1925. Mais à partir du 15 mai 1926 le journal fut imprimé à Reims à l’Imprimerie moderne de la Champagne. La rédaction faisait appel à la collaboration des militants des trois départements et le gérant fut R. Lenoir, auquel succédèrent Chausson, puis Pelle.

Barette était alors un orateur fréquemment mis à contribution à Reims. Il prit la parole à la réunion qui suivit l’assassinat de Matteotti, au meeting commémorant la mort de Jaurès, à la célébration de l’anniversaire de la Commune etc. Il organisa des réunions dans les villes voisines, notamment à Fismes (5 novembre 1925) où il commémora l’armistice de 1918. Les thèmes principaux de ses discours ou de ses articles étaient la misère ouvrière et l’antimilitarisme. Il s’insurgeait contre les campagnes du Maroc ou de Syrie, conflits voulus par les financiers ou les affairistes pour exploiter de nouveaux débouchés économiques. Il estimait que les buts véritables de la guerre de 1914 n’étaient pas plus exaltants. Dans une prosopopée des morts de la Grande Guerre il s’écriait : « Nous sommes morts pour une cause que nous avons crue sacrée, nous avons été trompés. Si nous étions là nous serions en avant pour vous guider vers une humanité meilleure et plus juste. » Il voyait des analogies entre la situation de 1871 qui avait engendré la Commune et celle de l’après-guerre de 1918 où tous les éléments d’une révolution étaient rassemblés.

Les difficultés économiques étaient propices à une agitation fasciste. Barette lutta contre les « chemises bleues » de Reims par la plume et par l’action directe : il participa notamment le 27 juin 1926, au retour du congrès de Lille, à une manifestation antifasciste qui finit par une bagarre. Il était intervenu au congrès communiste national de Lille, le 21 juin 1926, sur l’expérience des écoles de formation de Bobigny et Clichy qu’il avait vraisemblablement fréquentées. Cependant sa collaboration à L’Exploité se raréfiait. En 1928, deux faits importants pour son existence se produisirent : il fut condamné à un an de prison pour un discours antimilitariste prononcé le 1er avril 1927 à Reims et arrêté en avril 1928. Il intervint à la conférence nationale de Saint-Denis le 26 juin 1927. Le PC en fit son candidat à la députation dans les Ardennes, dans la 2e circonscription de Mézières, c’est-à-dire « La Vallée Rouge » où il recueillit 2 947 voix. Maintenu au second tour en raison de la tactique « classe contre classe », il obtint 2 077 suffrages. Le socialiste SFIO Boutet fut élu.

Raoul Barette entra au comité central du Parti communiste lors du congrès national de Lille (20-26 juin 1926). Il quitta Reims au printemps 1929 après un conflit avec le comité régional ; Lareppe, Fouilloux puis Lucien Sampaix lui succédèrent au secrétariat régional. Il cessa d’appartenir au comité central à partir du congrès de Saint-Denis (31 mars-7 avril 1929).

Barette avait épousé en premières noces Rose Poulet. Divorcé, il se maria avec Gilberte Alexandrine Devillard.

En 1932, Barette habitait Limoges (Haute-Vienne). Succédant à Penaud, il fut, pendant quelques mois, secrétaire de la 25e Union régionale CGTU. Il en démissionna quelques semaines après pour raisons extra-syndicales. Il participa cependant au congrès de l’Union régionale les 25 et 26 novembre 1933.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article98060, notice BARETTE Raoul, Sosthène par Jean Maitron, Claude Pennetier, Georges Clause, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 3 juin 2021.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier, Georges Clause

L’Humanité, 12 janvier 1928.

SOURCES : RGASPI, 495 270 6442. — Arch. Nat. F7/13114, année 1928. — Arch. Dép. Aisne, 11 477 et 4 300/1. — Arch. Dép. Marne, 30 M 66 et 30 M 68. — BMP, bobines 284, 305, 317 (renseignements recueillis par Jacques Girault). — L’Exploité, 1926-1928. — Les Cahiers du Bolchevisme, n° 39, 11 février 1926. — État civil du XVe arr. de Paris. — La Voix Libertaire, 11 novembre et 16 décembre 1933.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable