ALESSI Charles, Grégoire, Jean

Par Jacques Girault

Né le 25 janvier 1920 à Toulon (Var), mort le 31 juillet 2001 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; ouvrier de l’Arsenal maritime de Toulon, secrétaire du syndicat CGT (1952-1976) ; maire communiste de Moulinet (Alpes-Maritimes) (1977-2001).

Fils d’un ouvrier du port originaire de la province de Pesaro (Italie, région des Marches) qui avait vécu à Moulinet, Charles Alessi, dont la mère était une Italienne très croyante, reçut les sacrements catholiques. Habitant la cité de Rodeillac, il effectua à Toulon sa scolarité et passait ses vacances à Moulinet. Après avoir obtenu le certificat d’études primaires, il devint apprenti charpentier-tôlier à l’Arsenal maritime à partir du 14 septembre 1938 (atelier des constructions neuves). Membre des Jeunesses communistes depuis 1937, collecteur du syndicat, mis à pied un jour après la grève des bras croisés du 30 novembre 1938, il fut admis comme ouvrier temporaire charpentier tôlier, le 8 juin 1940. Il passa successivement aux ateliers des hydravions, des bâtiments en fer, des réparations puis à nouveau des hydravions et enfin, au laboratoire central de l’artillerie navale en juillet 1948.
Au début de la guerre, matelot au Ve dépôt à Toulon, Alessi fut envoyé jusqu’à l’armistice en Afrique du Nord (Mers-el-Kébir, Mostaganem). Revenu en France, il passa trois mois en chantier de jeunesse dans l’Allier avant de revenir à Toulon. Marié religieusement, en avril 1941 à Toulon, il laissa donner les sacrements catholiques à ses trois enfants.
Pendant la guerre, Alessi fut, sous le pseudonyme de « Jacques », un des animateurs de la résistance, dans l’entreprise (diffusion d’un journal, La Cloche, sabotages, grèves - 11 novembre 1943, avec drapeau tricolore déployé malgré la présence allemande, 14 juillet 1944 -, adhésion au Front national). Lors de la Libération, il participa aux luttes armées à Vidauban et à Toulon.
En 1945, membre du conseil syndical du syndicat CGT des personnels civils du port de Toulon (Arsenal maritime, maintenant Direction des armes et constructions navales), Alessi anima la reconstruction rapide des ateliers grâce notamment à l’engagement syndical, et fut envoyé quelques semaines à Casablanca en 1945 pour des raisons de travail. Il subit une retenue de salaire de quinze jours pour une prise de « parole dans un restaurant corporatif », le 21 novembre 1947 « en vue de consulter le personnel pour ou contre une grève », selon les termes figurant dans son dossier. En 1948, il quitta Toulon pour exercer à Paris la responsabilité de secrétaire de la fédération CGT des travailleurs de l’État, chargé de la trésorerie (1948-1949). En mai 1951, il fut un des dirigeants d’une grève pour l’obtention du salaire national dans les arsenaux. Il anima aussi des actions contre la guerre d’Indochine. Selon un rapport non daté figurant dans la notice biographique remplie pour le Parti communiste, il aurait mis en cause par lettre le secrétaire du syndicat de l’arsenal de Cherbourg, ce qui constituait « une grosse faute » et mit fin à ses responsabilités fédérales.
Membre de la commission exécutive de l’union locale CGT depuis le 23 mars 1946, revenu à Toulon en 1952, Charles Alessi, secrétaire général du syndicat de l’Arsenal, participa, avec d’autres dirigeants communistes et syndicalistes, au moment du « complot », à une manifestation violente à la Bourse du Travail, le 30 mai 1952. Près de cinquante militants furent arrêtés et vingt, dont Alessi, le 13 juin 1952, furent inculpés « de complot contre la sécurité intérieure de l’État ». Il bénéficia d’un « non-lieu » comme ses camarades et fut libéré le 28 juillet 1952. Pendant sa détention à la prison Saint-Roch, il participa à plusieurs délégations de détenus qui demandèrent que les modalités du régime politique, obtenu à la mi-juillet, soient appliquées.
Le 6 novembre 1953, Alessi redevint secrétaire général du syndicat et le demeura jusqu’en 1976, restant à la commission exécutive jusqu’à sa retraite en 1980. Il siégea à la commission exécutive de la Fédération CGT des travailleurs de l’État. Délégué au congrès confédéral (juin 1955), il fut membre de la commission de vérification des mandats. Au congrès de 1965 (mai), il devait intervenir. En raison du manque de temps, son allocution ne fut pas prononcée et fut publiée dans le compte rendu in extenso (p. 394-398). Il y montrait notamment l’activité syndicale à l’Arsenal. Il était membre du bureau de l’Union départementale CGT depuis 1956. En 1968, il dirigea les manifestations et les grèves des ouvriers de l’Arsenal qui obtinrent notamment l’intégration des salariés en régie indirecte dans la régie directe. En 1971 et 1974, il dirigea les actions pour maintenir le système d’avancement et conserver le caractère national de l’Arsenal. Administrateur de la Mutuelle de la Marine depuis 1956, il y fut détaché en 1976 comme responsable des questions sociales.
Membre du Parti communiste depuis 1944, secrétaire de la cellule de l’atelier des hydravions en 1946, membre du comité de la section communiste de l’arsenal (1946-1948, puis à nouveau à partir de 1951, puis du bureau de la section), Alessi suivit une école fédérale (août 1947) et l’école centrale syndicale de quatre semaines (15 mars-10 avril 1948) organisée par le Parti. Le 14 mars 1949, le secrétariat du parti accepta sa candidature présentée par la fédération du Var pour l’école centrale de quatre mois (29 mars-30 juillet 1949). Membre du bureau de la fédération communiste du Var en 1953, il en fut écarté en mai 1954 car « très fatigué physiquement », il avait dû arrêter « son activité militante pendant plusieurs mois ». Il estima que son « retrait » était « justifié ». Il demeura membre du comité fédéral jusqu’en juin 1962. Il fut candidat aux élections municipales de Toulon sur la liste à direction communiste « d’Union républicaine et laïque » qui obtint, au premier tour, 13 644 voix sur 95 789 inscrits et 15 907 voix au deuxième tour, le 21 mars 1965.
Charles Alessi devint conseiller municipal de Moulinet, puis maire communiste, élu avec les deux-tiers des voix en mai 1977. Il fut régulièrement réélu jusqu’en 2001 avec toujours plus de 80 % des voix. Il obtint notamment la réouverture de l’école communale en 1995, réalisa la construction de logements sociaux, la rénovation de l’église, de chapelles, la création de gîtes ruraux et d’une station d’épuration. Doyen des maires du département, ses luttes pour la défense des intérêts de la commune le firent surnommer « le Lion de la Bévéra ». Candidat communiste pour le conseil général dans le canton de Sospel, il fut battu de peu. Membre du conseil d’administration et de la commission permanente du parc national du Mercantour, il était aussi vice-président du SIVOM du canton de Sospel et de l’association des communes forestières et du SITALPA.
En même temps qu’une cérémonie religieuse dans son village, ses obsèques civiles, à Toulon, furent l’objet d’un important rassemblement au cimetière de Lagoubran, le 3 août. Une cérémonie officielle se déroula dans le village de 250 habitants, deux semaines plus tard. En hommage à son ancien maire qui avait fait notamment bien avancer le dossier sur l’intercommunalité (intégration de la vallée de la Bévéra dans la communauté d’agglomérations de la Riviéra et de Menton), le conseil municipal décida de donner son nom, en 2002, à un foyer pour autistes.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article9837, notice ALESSI Charles, Grégoire, Jean par Jacques Girault, version mise en ligne le 10 octobre 2008, dernière modification le 7 octobre 2018.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F7 15371. — Arch. Troisième région maritime, C 26. — Arch. comité national du PCF. — Arch. privées J. Bessone et E. Luciano. — Presse locale. — Renseignements fournis par la mairie de Moulinet et par la famille de l’intéressé.

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