BENOIST Paul

Par Jean Gaumont

Né le 23 septembre 1867 à Troyes (Aube), mort le 5 mars 1936 à Sens (Yonne) ; ouvrier bonnetier ; syndicaliste ; socialiste ; mutualiste ; coopérateur.

Fils d’un employé de chemin de fer, Paul Benoist fut orphelin de très bonne heure et, à l’âge de sept ans, dut être placé dans un orphelinat religieux où il demeura jusqu’à quatorze ans. On le mit alors en apprentissage dans la bonneterie. Marié en 1892, il fut aussitôt socialiste militant dans le Parti ouvrier français (POF) de Jules Guesde. Une petite coopérative de consommation, « la Sociale », fut fondée à Troyes en 1892 par le militant socialiste Étienne Pédron venu quelques années auparavant de Reims pour organiser la propagande. Benoist fut un adhérent de cette coopérative socialiste qui vécut quelques années et servit de centre au POF troyen. L’année suivante, en 1893, Benoist contribua à la fondation du syndicat des apprêteurs en bonneterie qui fusionna bientôt dans un syndicat général des bonnetiers et il prit une part active à la grève des bonnetiers de 1900. La grève dura deux mois et demi et se termina par un échec.

Chassé de la fabrique qui l’employait en raison de son action pendant le conflit, Benoist fut quelque temps employé dans la coopérative qui avait succédé à « la Sociale » et qu’avaient créée Chauvin et Lucien Deslinières : « la Coopération nouvelle » qui n’eut qu’une très brève existence. Après la disparition de ces coopératives, la plupart des ouvriers militants socialistes, gagnés à la pratique de la coopération par leurs propres expériences, entrèrent à « la Laborieuse », la plus importante société locale, fondée en 1886 par des ouvriers syndiqués de la métallurgie, et qui représentait une importante institution de plus de 2 000 familles et dont le chiffre d’affaires dépassait le million.

Benoist avait également adhéré à cette société et, sans cesser d’appartenir à son syndicat, s’intéressa de plus en plus à la coopération de consommation. Peu à peu initié, au cours des années 1902 à 1905, aux mécanismes coopératifs, il fut élu en 1905 au conseil d’administration. Président de la « Laborieuse » en 1907, Benoist, d’accord avec le comité fédéral régional, invita la Bourse des coopératives socialistes à tenir à Troyes son sixième congrès qu’il organisa en mars-avril 1907. La « Laborieuse », entraînée par lui dans le sillage de la coopération socialiste, donna son adhésion à la Bourse et à son Magasin de Gros. En 1908, Paul Benoist fut élu membre du conseil d’administration du Magasin de Gros et y resta jusqu’en 1932. Il siégea aussi parmi les membres du conseil central après la guerre et jusqu’en 1932. En 1910, il représenta la Bourse des coopératives socialistes au congrès des coopératives suisses à Lugano.

Sa société, concurrencée à Troyes par de puissantes sociétés capitalistes à succursales, modifia ses premières méthodes de centralisation des ventes dans un unique local, suivit ses rivales sur leur terrain commercial et ouvrit des magasins dans divers quartiers de la ville : six de 1907 à 1911. Elle fit construire un siège social-entrepôt, agrandit sa boulangerie, créa après études confiées à son président et à un autre administrateur une pharmacie mutualiste qui devint l’une des plus prospères de France. La « Laborieuse », avec ses présidents successifs, Benoist, Aubriot, Paul Gruyer, était devenue, en 1913, une grande société comptant trois mille familles et faisant plus de deux millions de vente.

Pendant la guerre de 1914-1918, Benoist, mobilisé pendant quelques mois, revint bientôt prendre place au conseil, fut élu à l’administration de la fédération régionale de l’Est, et fut désigné par le ministère de l’Armement pour grouper les achats des sociétés coopératives qui avaient dans leur sein des ouvriers mobilisés dans les usines de guerre. Avec Lagrange, fondateur et directeur de la coopérative de Château-Thierry, réfugié à Sens et à qui il fit appel comme technicien, il décida que les excédents réalisés ne seraient pas répartis et resteraient acquis à la fédération régionale. Lors de la constitution de l’Union des coopérateurs de l’Aube la somme de 120 000 francs, ainsi capitalisée, servit de premier fonds social.

Créée le 1er mai 1919 par Paul Benoist, Lagrange et autres, l’Union des coopératives de l’Aube ouvrit un certain nombre de succursales dans le département sans parvenir malheureusement à obtenir l’adhésion des sociétés les plus importantes : « la Laborieuse » de Troyes, « l’Union » de Romilly, « les Coopérateurs de Sainte-Savine » etc... En 1931 on décida de fusionner cette société avec l’Union des coopératives du sud de l’Aisne qui entreprenait de réaliser le bloc des coopérateurs de Champagne et qui y réussit plus tard avec la fusion de la « Laborieuse ».

Obligé de quitter sa ville de Troyes pour se fixer à Sens où il occupa un modeste emploi à l’entrepôt des coopérateurs de Champagne de cette ville, Benoist y mourut en 1936.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article99157, notice BENOIST Paul par Jean Gaumont, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 18 novembre 2022.

Par Jean Gaumont

SOURCES : Documents coopératifs et, pour l’essentiel, note rédigée par P. Benoist.

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